Les USA à l’assaut des stablecoins, une domination par la régulation – Crypto Focus

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Ça régule SEC – Le bras de fer entre le régulateur US et l’écosystème crypto est bel et bien enclenché. Alors que tout au long de l’année 2022, la pression réglementaire s’est renforcée, la faillite de FTX a peut-être bien, une fois pour toutes, attiré l’attention du régulateur sur le secteur. Des cryptomonnaies longtemps ignorées, mises de côté, sous-estimées et qui désormais se trouvent sous les feux des projecteurs. Une mise en lumière pas toujours appréciable ni amicale. Et, une régulation dont les enjeux dépassent le simple cadre cryptomonétaire. Décryptage du dossier.

La SEC s’attaque à la crypto

Kraken, première victime : le staking remis en cause

La SEC (Securities and Exchange Commission) sort les crocs. Début février, nous apprenions que Kraken écopait d’une amende de 30 millions de dollars. Une somme conséquente, que l’État américain accapare de manière opportune pour renflouer ses caisses. Une amende pour avoir proposé à ses clients son offre de staking avant de s’être enregistré auprès du régulateur. En jeu derrière cette interdiction, une notion qui a toute son importance pour l’avenir du secteur crypto : la qualification ou non des cryptomonnaies comme actifs financiers. Où dit plus simplement, comme des actions (securities en anglais).

Une qualification qui trouve échos dans le procès en cours entre la SEC et la société Ripple. Car si les cryptos sont un jour catégorisées comme des actions, les entreprises émettrices devront répondre au même cadre réglementaire. Un cadre nullement en adéquation avec le fonctionnement décentralisé de cette technologie. Et qui apportera avec lui des contraintes autrement plus complexes auxquelles devront se soumettre les acteurs du secteur.

Mais si la SEC commence à interdire le staking, est-ce la fin des technologies en Proof of Stake comme Ethereum ? La question pourrait se poser. Face à cette menace, Joe Lubin, co-fondateur d’Ethereum et de la fondation ConsenSys, et Brian Armstrong, patron de Coinbase, sont montés au créneau. Pour eux, il y a très peu de chance pour que des solutions comme Ethereum soient un jour qualifiées comme tel. Toutefois, en sera-t-il de même pour toutes les cryptos ? Là demeure toute la question.

La SEC demande un accès direct aux bases de données des exchanges

Mais ce n’est pas tout. Dans un second temps, la SEC a demandé à avoir accès aux registres client de l’exchange Kraken afin d’identifier les utilisateurs tombant sous le coup de sa juridiction. Les clients américains donc. Un moyen comme un autre aussi pourquoi pas dans un avenir proche de prélever les taxes sur nos cryptos. Mais nous reviendrons sur le sujet plus tard dans cet article.

Un coup dur pour Kraken donc et un avertissement pour toutes les entreprises sous le coup de la loi américaine. En effet, le régulateur semble avoir préparé un traitement de choc pour le secteur crypto. Gary Gensler, patron de la SEC, a partagé début février une liste de contraintes à respecter, de sorte à encadrer plus rigoureusement les agissements de ces sociétés. Des sanctions et une surveillance accrue susceptible d’effrayer ces acteurs, de les empêcher de se développer et finalement de les faire fuir vers des juridictions plus ouvertes. La frontière est fine entre réglementation et interdiction. Une frontière qu’il faudra assurément que les USA trouvent s’ils veulent s’assurer de la maîtrise de ce secteur émergent. Un contrôle aux enjeux colossaux comme nous le verrons par la suite.

La SEC s'attaque à l'exchange crypto Kraken à grands coups de sanctions.
L’exchange Kraken acculé par la SEC

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L’affaire BUSD, c’est une belle histoire…

Le BUSD, fleuron de l’association entre Binance, premier exchange du monde, et Paxos, société émettrice du Paxos Gold, réplique du cours de l’or. Et émetteur aussi, donc du BUSD qui a fait une entrée remarquée parmi les stablecoins au cours du précédent bull run. Grappillant progressivement des parts de marchés aux deux leaders, l’USDT de Tether et l’USDC de Circle. Ces stablecoins sont des cryptomonnaies dont le cours est indexé à celui du billet vert, le dollar américain.

Une pression du géant Binance sur ses concurrents qui n’a cessé de se renforcer l’année dernière. À l’automne 2022, la plateforme a d’ailleurs stoppé sa prise en charge de tous les « petits » stablecoins, incluant dans le lot l’USDC de Circle, son principal concurrent. De fait, les utilisateurs détenant ces cryptomonnaies ont vu celles-ci converties en BUSD. De quoi booster instantanément la présence de ce dernier dans le haut du panier des capitalisations crypto.

…qui attire le regard de la SEC

Toutefois, le Département des Services Financiers de New York (NYDFS) vient de décider de mettre le nez dans les affaires de Binance et de Paxos. Il juge qu’il y a ici matière à enquête en ce qui concerne une potentielle violation des lois sur la protection des investisseurs. De fait, le régulateur a ordonné à Paxos de cesser toute collaboration avec Binance en ce qui concerne le BUSD. Et d’arrêter purement et simplement d’émettre celui-ci. Une mise en application quasi immédiate qui prendra effet à partir du 21 février prochain.

Changpeng Zhao (CZ), le CEO de Binance, se défend de toute infraction et tente de se désengager du conflit entre la SEC et Paxos. CZ tente même de renouer le dialogue avec la SEC et de trouver un accord. La société Paxos, quant à elle, dément toute accusation et s’estime dans son bon droit sur le sujet. Des négociations multipartites qui risquent donc d’être mouvementées. Et qui, d’une certaine manière, remettent en question le secteur tout entier.

Le BUSD, un stablecoin au cœur du conflit entre Binance, Paxos et la SEC.
Le BUSD, une pression américaine sur les stablecoins qui pose question

La réglementation crypto, un enjeu stratégique

La crypto et le web3, un secteur clé sur l’échiquier géostratégique

De toute évidence, les USA, par l’intermédiaire de leur régulateur, cherchent à asseoir leur contrôle cette nouvelle économie du web3. Mais aussi à conserver et à renforcer leur présence dans ce secteur technologie hautement stratégique pour l’avenir. Preuve en est, la hausse de leur implication dans le minage de Bitcoin juste après le ban de la Chine, en mai 2021. Les fermes de minage au Texas ont fait partie des grandes gagnantes de cette transition.

Et en effet, même si Bitcoin et les cryptos dérangent l’hégémonie du dollar, par leur proposition de valeur concurrente, il semble impossible pour le gouvernement américain de les éradiquer. Il est en revanche bien plus judicieux d’en faire partie, d’y prendre une part majoritaire pour mieux pouvoir contrôler cet ennuyeux adversaire de l’intérieur. Comme on dit, soit proche de tes amis et encore plus proche de tes ennemis.

Les États-Unis sont obligés de s’impliquer dans le secteur crypto. Et ils le font déjà, car ils n’ont pas le choix. Ne pas le faire revient à laisser le champ libre à de potentiels adversaires. Malgré elles, les cryptos font pleinement partie de la lutte de pouvoir qui s’exerce entre les différents pays du monde. Contrôler les stablecoins, pour les USA typiquement, c’est aussi renforcer la puissance du dollar dans ce secteur cryptomonétaire, candidat potentiel à l’infrastructure de notre économie de demain.

La réglementation crypto, une dualité USA – Europe

Et, quoi de mieux pour contrôler que de réguler ? Longtemps considéré comme crypto-friendly, les États-Unis n’ont cessé ces derniers mois de doucher les espoirs des entreprises crypto. Lors de l’émergence d’un nouveau secteur, la mentalité américaine tendait jusqu’alors à laisser celui-ci se développer. Et, à ne mettre en place une réglementation adaptée que, dans un second temps, en s’appuyant sur les professionnels du domaine. Une réaction somme toute logique et qui s’opposait jusque ici à la vision européenne.

L’Europe est plutôt connue pour réguler tout de suite, très fort, et réfléchir ensuite. Quitte à priver les entreprises de perspectives de développement et à prendre de fait du retard dans la course à la technologie. Une méthode somme toute discutable. Et, qui a des impacts direct sur la puissance technologique des États. Il suffit de constater la prédominance insolente des GAFAM sur l’Internet d’aujourd’hui. Des GAFAM qui sont tous américains.

Et en effet, ici, la crypto touche en plein cœur de nos instances financières qui de fait, se méfient. Bitcoin vient soudain défier leur pouvoir de contrôle sur la monnaie. Il n’est donc pas étonnant de voir les gouvernements lutter corps et âme pour bannir ces choses effrayantes que sont les cryptos. Que ce soit le gouverneur de la banque de France, de la banque d’Italie ou encore Christine Lagarde, la présidente de la BCE (Banque Centrale Européenne) en personne. Beaucoup d’attention pour un Bitcoin censé être inutile et condamné à disparaitre si l’on en croit les médias. Toutefois, leur incapacité à maitriser l’inflation et l’impression monétaire sans limites dont ils usent à l’envi ne prêche pas pour eux. Cela constitue d’ailleurs le socle même des raisons qui ont conduit à la création de Bitcoin.

La réglementation des cryptos pave la voie d'un contrôle du secteur. Mais pourrait aussi représenter un danger si celle-ci devient abusive.
La régulation des cryptos, des enjeux critiques pour tout un secteur

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La France sur le devant de la scène réglementaire en Europe

En termes de réglementation, la France montre l’exemple. Un exemple pas toujours bon à suivre. Le dernier en date : la réglementation sur l’Agrément PSAN obligatoire qui a bien failli être voté le 24 janvier dernier. Celui-ci aurait tout simplement privé la France de toutes ses futures startups crypto. Sous couvert d’une projection factice des citoyens. Fort heureusement, celui-ci a été assoupli et converti en un enregistrement « renforcé ». Un soulagement peut-être de courte de durée, en attendant la mise en application de la réglementation MiCA (Market in Crypto Assets) d’ici 2024 selon les estimations.

Autre réglementation en cours qui fera plaisir au fisc français, un peu moins à nos portefeuilles : la loi LOPMI. La Loi d’Orientation et de Programmation du ministère de l’Intérieur. Le principe est très simple. Vous ne payez pas vos impôts ? On vous prend vos cryptos. Il s’agit d’une procédure qui autorise le gouvernement à prélever l’argent sur votre compte en banque si vous avez commis un délit, par exemple, ou si vous ne payez pas vos impôts. Une loi qui inclut également les cryptomonnaies dans son giron. De fait, les forces de l’ordre pourraient dans un futur proche être en mesure de saisir vos cryptos stockées sur un exchange comme Binance s’il s’avérait que vous êtes un mauvais payeur. Il faudra toutefois pour cela que vous soyez sous le coup d’une procédure judiciaire, bien évidemment.

Vers une dédollarisation de l’économie mondiale ?

Une réglementation crypto abusive qui pourrait s’avérer néfaste

À l’image de l’Europe donc, les USA semblent accélérer leurs manœuvres, peut-être réveillés par l’incident FTX. Alors que de toutes parts, l’étau de la SEC se resserre, les entreprises du secteur s’interrogent. À quelle sauce la régulation va-t-elle les manger ? Pourront-elles réellement continuer leur activité une fois celle-ci actée ? Pour CZ, les contraintes imposées par les instances américaines pourraient véritablement enclencher un tournant dans l’industrie. Si la pression réglementaire sur les stablecoins dollar est trop forte, nous pourrions voir ressurgir une prédominance de stablecoins basés sur d’autres monnaies. L’euro peut-être, longtemps mis de côté par la trop forte réglementation européenne. Mais aussi le yen japonais ou le dollar singapourien. Et même l’or, pourquoi pas ? Seule contrainte à des stablecoins basés sur l’or : la faible utilisation de celui-ci par les particuliers. Difficile de stocker de l’or sur notre compte en banque et de payer nos courses avec.

Bien sûr, un tel changement de paradigme n’est pas encore au goût du jour. En effet, la prédominance du dollar reste gigantesque au sein de l’écosystème crypto par rapport aux autres devises. Toutefois, en voulant réguler trop fortement les entreprises du secteur, si les USA venaient à pousser le bouchon un peu trop loin, qui sait ce qu’il pourrait se passer ?

Le secteur des stablecoins est un enjeu stratégique mondiale pour la domination de la monnaie, du dollar en particulier.
Le dollar, une domination mondiale qui arrive à son terme ?

BRICS contre USA : une scission géostratégique à venir

Les cryptos. Une maitrise technologique et économique qui pourrait devenir indispensable sur l’échiquier international dans les prochaines années. Au moment même où deux blocs distincts tendent de plus en plus à se démarquer. D’un côté, les BRICS : Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud. De l’autre, les USA et la vieille Europe. Ce qui fait la force de ces pays jadis catégorisés comme étant « en voie de développement », c’est avant tout l’exportation de matières premières. Une caractéristique qui rend le fonctionnement de leur économie très particulier et souvent à contresens du reste du monde. Typiquement, quand l’inflation augmente, propulsée par une hausse des prix de l’énergie, ces pays en tant qu’exportateurs subissent un boost de leur économie. À l’inverse de tous les autres pays du monde qui voient leurs dépenses exploser.

Les BRICS sont des pays qui possèdent leur propre monnaie, indépendante du dollar, mais qui commercent encore, pour l’instant, dans cette monnaie mondiale. Néanmoins, le conflit russo-ukrainien pourrait très bien rebattre les cartes. Notamment en obligeant tous ces pays à choisir un camp. Un camp qui selon toute vraisemblance ne serait pas celui des États-Unis. Et le rapprochement politique de ces gouvernements est perceptible, grâce notamment à l’entremise de la Chine, seconde puissance mondiale. Le gouvernement chinois, dont la vision long terme dénote avec celle plus court-termiste des politiques occidentales, cherche évidemment à assurer sa fourniture en énergie pour les 50 prochaines années. Une réflexion qui ne semble pas effleurer nos politiques français quand on voit dans quel état ils ont mis notre ancien fleuron énergétique EDF pour le simple profit immédiat du lobby bancaire. Mais ceci est un autre débat. À noter que la Chine n’est pas exportatrice de matière première, mais joue un rôle économique prépondérant sur la scène internationale en tant qu’« usine du monde ».

La dédollarisation du monde est en marche

Une scission, donc qui commence aussi à menacer l’hégémonie du dollar. L’exemple typique est l’annonce récente de l’Arabie Saoudite au sommet de Davos qui déclare réfléchir à exporter son énergie dans d’autres monnaies que le dollar. Pour rappel, l’Arabie Saoudite, principal exportateur de pétrole dans le monde, a été le pilier de la dollarisation du monde par les États-Unis. Ces derniers ayant imposé que toutes les transactions liées à cet or noir s’effectuent en dollar. En promettant en échange à l’Arabie Saoudite une protection militaire.

Un marché du pétrole qui a donc permis au dollar de conserver sa place de première monnaie mondiale alors même que les États-Unis annonçaient la rupture des accords de Bretton Woods en 1971. Une décision qui mit fin à l’adossement du dollar sur une véritable réserve de valeur, l’or physique. À partir de cet instant, cette monnaie papier a cessé de valoir autre chose que la confiance cristallisée du monde dans l’armée américaine. Et la confiance, c’est une chose fragile qui peut à tout moment se briser.

Une fragilisation que l’on voit donc à l’œuvre en ce moment même chez les partenaires historiques des États-Unis comme l’Arabie Saoudite. Une annonce qui a fait figure de tremblement de terre monétaire. Bien qu’elle ne soit pas encore mise en application aujourd’hui, la menace a été formulée à haute voix. Autre exemple, l’Inde, de son côté, commence d’ores et déjà à acheter son pétrole en roupies à la Russie.

La crypto, enjeu économique de demain

Dans ce conflit géostratégique et monétaire entre deux blocs, les cryptomonnaies sont un vecteur de domination supplémentaire, technologique et monétaire, sur lequel assoir son contrôle. Il n’est donc pas étonnant que le gouvernement américain, à travers la SEC, cherche à assurer ses arrières, à maitriser et à réguler ce secteur à travers une réglementation qui leur soit favorable. Ceci en menaçant à grands renforts d’amendes les entreprises qui leur désobéiraient. Une véritable lutte de pouvoir s’est enclenchée.

Car imaginons le pire : le dollar vient à perdre son hégémonie. À cause d’une hyperinflation, à tout hasard. Les USA pourraient alors décider de se tourner vers des solutions alternatives. Et pourquoi pas Bitcoin ? Une solution moins mauvaise que les autres qui leur permettrait peut-être d’échapper à une domination monétaire des BRICS. Mais ne nous y trompons pas, si un tel scénario devait se produire, ce serait un “Bitcoin” sur lequel l’État américain aura su asseoir son contrôle, d’une manière ou d’une autre. Via des moyens que nous n’oserions pas imaginer aujourd’hui. Il s’agit donc ici d’une menace réelle pour l’invention de Satoshi Nakamoto.

En un mot, les lignes bougent à l’échelle internationale. Aujourd’hui plus que jamais, une division du monde en deux est à l’œuvre. Et, ce n’est pas de bon augure pour la pérennité du dollar. Une monnaie de plus en plus fragile que l’hyperinflation guette. Un symbole jusqu’alors de la dominance des États-Unis sur la scène mondiale qui s’effrite peu à peu. Les USA s’enferment par ailleurs dans une boucle infernale de la dette qui, un jour ou l’autre, finira par les rattraper. Et à ce moment-là, Bitcoin et les cryptomonnaies pourraient faire figure de refuge et enfin démontrer toute l’étendue de leur proposition de valeur.

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Benjamin L.

Issu d’une formation d’ingénieur, j’ai découvert le monde des cryptomonnaies en 2020. Je me suis rapidement passionné pour cet univers en pleine expansion au sein duquel se développent les innovations de demain. J’espère, au travers de mes articles, entraîner le plus grand nombre dans cette fabuleuse aventure.

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