Être ou ne pas être stable. Les stablecoins porteraient-ils si mal que ça leur nom d’usage ? Si on en croit le dernier rapport de la Banque des règlements internationaux (BRI), la réponse est clairement oui. De son côté, Moody’s a même compté le nombre de fois où un stablecoin a perdu la parité avec l’actif auquel il est censé être indexé, et les résultats sont plutôt surprenants. Ces piliers de l’écosystème crypto attirent les investisseurs qui souhaitent profiter de la simplicité de la cryptomonnaie sans s’exposer à la volatilité légendaire du secteur ainsi que les inconditionnels des monnaies numériques qui les utilisent au quotidien pour éviter de repasser en devise dite Fiat (et éviter ainsi une déclaration fiscale contraignante).
Mais depuis le fameux depeg de l’UST et les sueurs froides du printemps autour du cours de l’USDC, on sait maintenant que ces monnaies numériques stables ne le sont pas toujours autant qu’on voudrait bien le croire. La parole est aux experts de la finance.
La banque des règlements internationaux pointe le manque de transparence et de crédibilité des stablecoins…
La Banque des règlements internationaux est une institution basée à Bâle qui assure la coopération entre les différentes banques centrales du monde. Depuis quelques années, celle qu’on surnomme la banque des banques centrales a décidé de s’atteler à la régulation des cryptomonnaies et elle publie régulièrement des études à ce propos. Plutôt favorable à la mise en place des monnaies numériques de banques centrales (MNBC), l’organisation présidée par le Français François Villeroy de Galhau alerte régulièrement sur Bitcoin et les autres cryptomonnaies et elle se demande aujourd’hui, dans sa dernière note de recherche, quand un réel stablecoin finira par arriver sur le marché.
Quand ces experts parlent d’un réel stablecoin, il faut comprendre à quoi ils font référence et voici pour cela un extrait du document :
« Pour que les stablecoins puissent être utilisées comme moyen d’échange, ils doivent pouvoir conserver leur valeur pendant toute une journée. Or, aucune de ces monnaies stables évaluées dans ce document n’a été en mesure de maintenir son cours de clôture à parité avec son ancrage. »
A. Kosse, M. Glowka, I. Mattei and T. Rice dans le rapport intitulé Will the real stablecoin please stand up? – Source : bis.org
Aucune variation de cours ne peut être selon eux acceptée pour prétendre au titre de stablecoin. Pour leur étude, les auteurs ont donc examiné, entre autres, les cours du Pax Gold, de l’USD Coin, de l’USDT Tether et leur conclusion est sans appel :
« Le manque de transparence sur la disponibilité des réserves et la qualité de ces dernières peut saper la confiance dans la crédibilité des stablecoins et remet en question leur capacité à maintenir leur ancrage. »
A. Kosse, M. Glowka, I. Mattei and T. Rice dans le rapport intitulé Will the real stablecoin please stand up? – Source : bis.org
… qui ont d’ailleurs bien du mal à rester stable selon Moody’s
Pour illustrer ces fameux depeg, tournons-nous maintenant vers l’étude proposée par Moody’s, qui a lancé récemment un nouvel outil basé sur l’IA qui mesure et contrôle les différents prix de ces monnaies numériques surnommées stablecoins. Nommé Digital Asset Monitor, il suit la volatilité afin d’étudier les risques dans la finance décentralisée (DeFi). Et les premiers résultats sont tombés récemment :
« Depuis le début de l’année, il y a eu 609 depeg parmi les stablecoins à grande capitalisation adossées à des devises fiduciaires. »
Rapport de Moody’s sur le depeg des stablecoins importants du marché – Source : Moody’s Analytics
Yiannis Giokas, directeur principal de l’innovation produit chez Moody’s Analytics, justifie la mise en place d’un tel outil par sa volonté de rassurer les clients potentiels :
« Nous avons vu le marché des pièces stables devenir une classe d’actifs de plusieurs milliards de dollars, représentant environ 10 % du marché de la crypto et la plupart des activités on chain. Cependant, compte tenu de la volatilité persistante de cette classe d’actifs, nous avons constaté une énorme demande de la part de nos clients pour un outil complet d’évaluation des risques de ces actifs. »
Yiannis Giokas, directeur principal de l’innovation produit chez Moody’s Analytics – Source : Moody’s Analytics
Moody’s ne sait donc pas encore s’il peut raisonnablement conseiller ce type de cryptoactif à ses clients et se laisse donc quelque temps pour analyser les résultats de son nouveau logiciel. Quoi qu’il en soit, le principe même de stablecoin continue de faire des émules puisqu’on a appris la semaine dernière que PayPal allait lancer le sien. Restera-t-il stable dans la durée ? L’avenir, mais surtout l’IA nous le dira !
