Jeux de dupes. Alors que la plateforme est officiellement interdite dans le pays, il semblerait que la Chine soit toujours le plus grand marché de Binance. Derrière les déclarations officielles de façade, de nombreux ressortissants de l’empire du Milieu ont encore recours aux services de l’exchange numéro un dans le monde, en utilisant divers moyens techniques pour contourner les interdictions. La Chine de Xi Jinping a-t-elle perdu le contrôle sur une partie de sa population ou laisse-t-elle faire Binance à dessein ? Début de réponse avec les chiffres du Wall Street Journal publiés ces derniers jours.
Dizaines de milliards, centaines de millions : des chiffres à la hauteur de la démesure de la Chine
Il est toujours intéressant de se pencher sur les chiffres quand les mots ont pris trop de place. Quand la Chine répète urbi et orbi que les cryptomonnaies n’ont pas leur place dans le pays et que Bitcoin est un cadavre à la dérive, dans les faits, dans l’intimité de leurs salons et cachés derrière des VPN, les Chinois ont un tout autre avis sur la chose. En s’appuyant sur les données internes de Binance, le Wall Street Journal a pu déterminer que la République populaire de Chine est tout simplement le premier marché de la plateforme de Changpeng Zhao.
Avec 90 milliards de volumes d’échange dans le pays en mai sur 670 milliards au total, c’est bien le deuxième pays le plus peuplé du monde qui rapporte le plus d’argent à Binance. La Corée du Sud, la Turquie et le Vietnam complètent le podium de ce début d’année 2023. En ce qui concerne le nombre d’utilisateurs, la Chine truste aussi les premières places avec 5,6 millions sur 128 millions au total. Mais le plus surprenant, c’est le nombre de personnes politiquement exposées (PPE) qui comptent parmi les utilisateurs de l’exchange.
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Binance et les autorités chinoises, c’est « je t’aime, moi non plus »
Ils seraient environ 100 000, si l’on en croit les chiffres du WSJ, qui s’appuient sur des données internes à la crypto bourse, mais aussi sur des témoignages d’anciens employés. Ces PPE sont en Chine « des personnes qui occupent des postes influents dans les bureaux du gouvernement ou qui entretiennent des liens étroits avec de telles personnes ». Normalement, les institutions financières soumettent ce type de clients ultra-sensibles à des vérifications poussées afin d’éviter le blanchiment d’argent ou des activités financières illicites. Or, il semble que Binance ait favorisé la discrétion en étant plutôt léger sur le KYC.
Cette relation privilégiée avec la Chine ne date d’ailleurs pas d’hier, puisque qu’après l’interdiction totale dans le pays en 2021, Binance aurait poursuivi ses activités, en incitant les utilisateurs à contourner la loi via différents moyens techniques. La direction actuelle se défend de telles pratiques et confirme officiellement que le site Binance.com ne fonctionne pas dans le pays et qu’il n’est pas accessible aux résidents chinois. Un porte-parole a immédiatement tenu à réagir à la publication du WSJ.
Alors, les autorités chinoises sont-elles à ce point naïves ? Difficile à croire, tant elles paraissent avoir la mainmise sur tout ce qui se passe dans le pays. Cependant, comme pour certaines expérimentations dans le web 3, le Parti communiste ne fait pas forcément ce qu’il dit, et il y a un décalage important entre la communication politique interne et la réalité du terrain.
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