Tout ce que le projet Libra nous raconte (et plus important, tout ce qu’il nous cache !)

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J’aimerais vous épargner quantité de poncifs journalistiques pour évoquer le projet Libra, la cryptomonnaie de Facebook. Cependant, il faut convenir que l’exercice sera difficile, en raison du raz de marée médiatique de ces derniers jours, faisant suite à la publication de son Livre blanc, plus attendu qu’un tome inédit de Harry Potter… 

En effet, au travers de centaines d’articles dédiés, que n’a t’il pas été dit ad nauseam sur le projet de devises numérique du géant social  ? « Ce que vous devez savoir sur Libra », « les X choses indispensables à connaitre sur le projet Libra (vous allez liker la 6e !) », « Libra, des risques d’apocalypse zombie non négligeable » (j’aurais adoré lire le dernier, j’avoue).

En effet, alors même que les médias crypto spécialisés (et le Journal du Coin plus que tout autre), anticipent le phénomène et ses implications potentielles depuis des mois, c’est un peu comme si la planète médiatique et politique toute entière venait de se réveiller en sursaut il y 4 jours : diantre, Facebook – peut-être l’entité la plus hégémonique par nature depuis l’apparition du lichen – voudrait devenir encore plus hégémonique ? Quoi, Zuckerberg voudrait créer un nouveau Bitcoin ?

S’il faut convenir que la venue au monde de la Libra pourrait représenter, du point de vue de la crypto, l’événement le plus signifiant (dans le sens, le plus impactant) depuis l’apparition de Bitcoin, il convient de conserver la tête froide et de se garder de se laisser emporter par le maelstrom actuel de news, tellement symptomatique de notre époque.

Tour d’horizon de ce qu’est réellement le projet Libra, et peut-être plus important encore : de ce qu’il n’est pas ! 

Projet Libra : des mois de rumeurs…quasiment toutes confirmées !

Cela pourrait sembler remonter à des siècles, mais on rappellera que tout commence durant l’été 2018, avec des rumeurs autour du recrutement d’une équipe dédiée à la blockchain par la firme californienne.

Facebook manifeste alors ce qui pourrait s’apparenter à une simple curiosité de principe pour le sujet crypto, au même titre que beaucoup d’entreprises cette année-là. Las, on est en plein hiver crypto et après tout, une entité aussi gigantesque que Facebook passe son temps à racheter diverses start-ups ou faire des incartades sur des sujets expérimentaux, sans réelles ambitions.

Même si la communauté sent bien qu’il y a une perturbation dans la force, il faudra cependant attendre un article du très sérieux New York Time pour officialiser les choses : 50 personnes travaillent d’arrache-pied, sous la supervision de l’ancien président de PayPal, David Marcus sur un « FaceBook Coin » ! Coup de tonnerre dans la communauté qui oscille entre incrédulité et début d’intérêt pour un projet qui pourrait prendre une ampleur inédite.

Depuis lors, et sans que la firme de Mark Zuckerberg ne confirme ou n’infirme jamais quoi que ce soit, le projet fera l’objet de nombreuses rumeurs et autres leaks permettant à Facebook de bénéficier d’une forme de couverture médiatique permanente, sans avoir l’air d’y toucher.

À la lecture du Libre blanc du projet, mais également des statuts de la Fondation Libra, la plupart de ces rumeurs se révèlent tellement justes, qu’il est douteux de ne pas y voir autre chose qu’une stratégie bien huilée.

La sortie du Livre blanc et l’officialisation de Libra

On commence par la révélation au monde du projet Libra. C’est supposément une petite bourde de Laura McCracken, cadre européenne de Facebook qui dans le cadre d’une interview spoil début juin l’imminente révélation du projet, annonçant même la date du 18 juin, information qui se révélera au final parfaitement exacte. Ainsi, c’est effectivement à cette date que surgissent du néant le site officiel de Libra, associé au Livre blanc et celui du portefeuille Calibra.

Les noms du projet et du token

Si beaucoup de commentateurs – dont votre serviteur – se sont essayés au fil des mois à la divination (FacebookCoin, LikeCoin, CoinMark…), la monnaie sera finalement baptisée la LIBRA (au féminin en français donc). À noter que l’intitulé « Projet Libra », utilisé en interne s’est finalement imposé pour qualifier à la fois la monnaie, mais également la Fondation basée en Suisse, supposée en assurer la gouvernance.

Et Global Coin alors ? Et bien RIP petit ange parti trop tôt… Alors même que cet intitulé semblait bien ancré dans les têtes, il est possible que sa tonalité quelque peu totalitaire ait finalement été jugée trop clivante. Par ailleurs, quelqu’un dans l’équipe a peut-être fait remarquer que GlobalCoin (GLC)… ça existait déjà !

Quoi qu’il en soit, habituez-vous : LIBRA ( « Balance » en latin, à la sonorité positive dans de nombreux langages), vous n’avez pas fini d’en entendre parler !

Un stablecoin, backé sur 5 devises fiat

C’est en substance comme cela qu’est évoquée à demi-mot la crypto made in Facebook depuis les premiers jours. Plus précisément, revenait régulièrement l’idée d’un panier de 5 devises fiat, réputées pour leurs solidités, parmi lesquelles ont aurait retrouvé l’Euro, la Livre, le Dollar ou le Yen.

Le Livre blanc confirme donc cette projection initiale, même s’il se garde bien d’identifier formellement les devises concernées et parle « d’actifs sous-jacents », voire de « Divers dépôts bancaires et titres gouvernementaux à court terme ».

« La Libra est conçue pour être une cryptomonnaie numérique stable qui repose entièrement sur une réserve d’actifs réels (la réserve Libra) et qui est soutenue par un réseau d’échanges concurrentiel pour l’achat et la vente de la Libra ». Livre blanc de Libra.

Cette précaution a probablement vocation à ne pas déclencher de levées de boucliers des banques centrales concernées, avant d’avoir pu déployer des opérations séduction dont Mark Zuckerberg a le secret

Une sortie début 2020, sur Messenger et WhatsApp

Si le début de l’année 2020 a globalement été régulièrement évoqué, les documents récemment publiés se veulent plus prudents en évoquant dorénavant « le premier semestre 2020 ». Nul doute qu’au regard des défis techniques et de conformité qui s’annonce, ce délai ne sera pas de trop. On peut ainsi anticiper un lancement officiel de Libra et de Calibra à l’été 2020.

Quant à la sortie au profit exclusif des utilisateurs de Messenger et de WhatsApp dans un premier temps, la communication officielle tend non seulement à indiquer que Libra sera probablement déployée sur tout l’écosystème de la galaxie des applications Facebook, mais peut-être même au-delà, avec une ouverture potentielle plus large qu’imaginée du portefeuille Calibra (voir plus loin, les déclarations du PDG de Facebook).

Un Libra peut en cacher un autre

Si Global Coin a lâchement disparu dans la fumée d’une boule de ninja, il n’a pour autant jamais été question, que d’un seul token au cours des derniers mois. Pourtant, le Journal du Coin évoquait très tôt, l’intérêt économique et stratégique d’une structure moins basique, incluant deux cryptomonnaies distinctes.

C’est ainsi que si la Libra est évoquée pour ainsi dire à toutes les pages de la documentation du projet, une mention bien plus discrète d’un « Token d’investissement Libra » doit retenir l’attention.

« La réserve sera investie dans des actifs à faible risque qui produiront des intérêts au fil du temps. (…) le reste des profits sera utilisé pour payer des dividendes aux premiers investisseurs du Libra Investment Token pour leurs contributions initiales. » Notice réservée aux membres fondateurs

Ainsi, réservé aux entités ayant investi 10 millions de dollars pour opérer un des nœuds du réseau, ce « token premium » aura vocation à rétribuer en dividendes les contributeurs à la fameuse Réserve Libra. Cela va sans dire, mais il s’agira nécessairement d’un Security Token.

1 milliard de dollars de tour de table ?

Information fuitée assez tôt, la proposition par Facebook de faire rentrer des fonds d’investissement traditionnels à hauteur d’un milliard de dollars dans le projet avait de quoi étonner. En effet, en quoi une entreprise comme Facebook (dont on rappellera qu’elle a engrangé plus de 22 milliards de dollars de bénéfices en 2018), aurait besoin – telle la vulgaire start-up face à sa première ICO – de faire appel à financement extérieur ?

En réalité, s’il apparaissait rapidement que sur le fonds, il s’agissait effectivement de donner des gages au reste du secteur, il fallait surtout voir dans ces informations, les prémices de la mise en place de la vente de 100 nœuds du futur réseau Libra, à 10 millions l’unité.

Libra sera une monnaie mondiale

Les ambitions initiales étaient claires : faire des 2.7 milliards d’utilisateurs des services de l’écosystème Facebook (incluant donc Instagram, WhatsApp et Messenger), les bénéficiaires d’un service à l’envergure mondiale.

Si techniquement cette ambition demeure, on notera cependant qu’à peine quelques jours après l’annonce officielle, pour la Russie ce sera « niet » et pour l’Inde (marché Ô combien stratégique pour Facebook), les choses semblent bien mal engagées. On ne parlera même pas de la Chine, Marc Zuckerberg continuant à se fracasser sur le Great Wall numérique érigé par Pékin.

“Alors comme ça on veux disrupter le dollar ?”

Ce que ne sera PAS Libra

Libra n’évoluera pas sur une blockchain décentralisée et distribuée (enfin pas avant des années)

« Libra sera d’abord une blockchain avec permission. (…) notre volonté est que le réseau Libra devienne un réseau sans permission.(…) L’une des directives de l’association sera donc de travailler avec la communauté pour élaborer et mettre en œuvre cette transition, qui devra débuter dans les cinq ans après le lancement public de la blockchain Libra ». Livre blanc de Libra.

En raison du challenge technique et du nombre d’utilisateurs anticipé, Facebook affirme ne pas avoir d’autre choix que de conserver une blockchain « avec permission », tout du moins les 5 premières années.

Autrement dit, la blockchain de Libra ne sera pas tout à fait privée, mais plutôt à considérer comme une blockchain de consortium où seuls des acteurs préapprouvés (en l’occurrence les opérateurs des 100 premiers Nœuds du réseau) se verront attribuer des possibilités d’actions.

En sens, la blockchain Libra sera uniquement distribuée entre quelques acteurs sévèrement filtrés et ne sera décentralisée qu’entre ces mêmes acteurs.  Ni plus ni moins qu’un Conseil Administration tout ce qu’il y a de plus classique en somme (mais avec de la blockchain dedans).

Autrement dit, l’absolu contraire de ce que propose Bitcoin avec ses 10 000 nœuds distribués à travers le monde, constituant un réseau que n’importe qui peux rejoindre ou quitter librement et gratuitement.

Libra ne sera pas un outil de spéculation

Même un géant comme Facebook aura à franchir de nombreux obstacles de taille, alors même que les régulateurs de tout poil, les politiques et les Banques Centrales ne laisseront rien passer au réseau social Californien. Cependant s’il y a bien quelque chose que les concepteurs de la Libra ont souhaité éviter à tout prix, c’est le reproche récurrent fait à la plupart des cryptomonnaies : leurs propension naturelle à fluctuer brutalement et à faire, à ce titre, la joie des spéculateurs, et surtout des supposés manipulateurs de marché.

Hors de question en effet que le bon père de famille américain ou l’étudiante suédoise se lève le matin pour s’apercevoir que ses 100 LIBRA ont perdu comme par enchantement 30% de leur valeur !

Voici donc la réponse à tous ceux qui se hype à l’idée de pouvoir « investir » dans la LIBRA: aller plutôt ouvrir un Livret A (ou, à la limite, ruez-vous sur les actions Facebook)!

La libra sera d’une absolue et ennuyeuse stabilité; Si vous en achetez 1000 pour 1000 dollars au moment de la sortie officielle, il y a de fortes chances que vous récupériez 1000 dollars à la revente 3 ans plus tard.

Libra n’a pas vocation à vous rendre….plus libre

Ne vous laissez pas embrumer par les promesses marketing “d’une meilleure inclusion financière” ou des mirages du “pouvoir rendu aux consommateurs”.

Là ou Bitcoin porte en lui le potentiel de remettre l’individu au centre du jeu économique en lui offrant un pouvoir d’action et de décision inédit, le projet Libra n’a pour sa part qu’un objectif concret et planifié : apporter plus de puissance et de richesse à ses créateurs.

Ni plus ni moins. Et ne pas avoir conscience de ce schéma, c’est ne rien comprendre aux règles qui animent notre monde capitalistique. Entendons nous bien, il n’est pas interdit à ses concepteurs d’être par ailleurs animés des meilleures intentions, de la même manière que l’on peut être certain que la Libra apportera très certainement un gain réel et quantifiable à de nombreux individus.

Mais il convient cependant d’être pleinement éclairé : depuis que Mark Zuckerberg a introduit Facebook en bourse, la notion de « satisfaction utilisateur » est subtilement passée derrière celle de « satisfaction des actionnaires » (et considérant les mésaventures de pauvre Zack ces derniers temps sur le sujet, croyez bien que cette nouvelle configuration est tout sauf anecdotique s’agissant de la bonne marche de l’entreprise).

Ainsi, il pourra y avoir autant de fondations, d’ONG à but non lucratif, de déclarations laudatives que l’on voudra, Libra à vocation in fine à devenir une machine à cash tout ce qu’il y a de plus traditionnelle, et tout dans l’histoire nous a démontré que ce type de mécanique ne s’encombre pas d’ambitions humanistes.

Une aura de mystère : les questions encore en suspens

Il est vraisemblable que même Facebook anticipe de larges adaptations de Libra, probablement rendues nécessaires, à la fois par les réactions du monde bancaire et politique, mais également résultant de l’accueil que lui réservera le grand public à travers le monde. Ainsi, il n’est pas illogique à ce stade que de nombreux aspects ne soient pas vraiment explicités, voire même carrément passé sous silence !

Combien « vaudra » une libra ?

C’est une question relativement importante. Si les stablecoins existants sont traditionnellement étalonnés sur un mode 1:1 (le Tether (USDT) par exemple, qui est supposé valoir exactement 1 dollar), nous évoquions dans un article précédent que Facebook pourrait s’inspirer de certaines de ses expérimentations précédentes en matière de système de paiement interne, et considérer une valeur de 10 cents de dollars par token.

Or, même si l’inévitable mention « taux de change non contractuel » apparaît sur le site officiel, les illustrations d’ores et déjà consultables de l’App Calibra tendent à démontrer que 1 Libra pourrait équivaloir à environ 1 dollar.

À qui sera réellement destinée la Libra ?

S’il semble évident que de Paris à New York, les populations aisées des pays occidentaux pourront utiliser la monnaie Libra et le wallet Calibra, visionner la première vidéo de présentation du projet donne des indices assez clairs sur le « cœur de cible » de Facebook : les 1.7 milliard d’individus défavorisés n’ayant pas accès à des services bancaires de base (mais en revanche disposant plus communément d’un smartphone).

https://www.facebook.com/tomek.konicki.7/videos/2132223653543076/

« This is Libra, and It’s just the beginning »ça sonne comme une menace un peu, non ?

La Libra sera t-elle une « vraie » cryptomonnaie ?

C’est l’un des débats qui anime tout particulièrement la communauté crypto ces derniers jours : avec sa centralisation et sa distribution toute relative (pour être poli) et sa nature de stablecoin, la Libra aux yeux de certains ne mériterait pas le statut de « cryptomonnaie ». Or, rien ne saurait être plus faux !

Ainsi, alors même que les réactions parfois sanguines se multiplient en réaction à ce que beaucoup considèrent comme un dévoiement des « valeurs » de la sainte blockchain originelle, il convient de demeurer crédible, revenir aux fondamentaux et s’entendre sur les plus petits dénominateurs communs concernant la notion de « cryptomonnaie » qui fondamentalement doit :

  • Être une devise électronique (c’est-à-dire évoluant dans un contexte informatique virtualisé),
  • échangeable de pair à pair,
  • de manière décentralisée, via une blockchain,
  • fonctionnant sur les principes de la cryptographie,
  • intégrant l’utilisateur pour son émission et la validation de ses transactions.

De ce point de vue, qu’on trouve ça réjouissant ou pas, la Libra est sur le papier l’incarnation la plus parfaite d’une cryptomonnaie.

On pourrait même aller plus loin et considérer que la Libra correspondra probablement même bien plus à la définition académique du concept de monnaie qu’une grande majorité des shitcoins qui peuplent actuellement le Market Cap : elle sera en effet déployée pour de réels échanges de valeurs, permettra d’acquérir des services et des biens, et sera potentiellement utilisée par des centaines de millions de personnes.

La Blockchain de Libra et le wallet Calibra constitueront-ils un écosystème fermé ?

La blockchain Libra, taillée sur mesure

Jusqu’à cette semaine, rien n’avait filtré sur les spécifications techniques de la blockchain apte à accueillir la charge colossale du projet Libra.

On sait dorénavant que cette infrastructure sera construite avec un langage de programmation baptisé Move, développé exclusivement à cette fin. La blockchain Libra aura ainsi vocation à pouvoir assurer la gestion de centaines de millions de comptes utilisateurs, ainsi qu’un trafic de 1000 transactions par seconde. On reconnaîtra à Facebook de tenter de donner quelques gages à la communauté en proposant :

  • Un développement sur une base d’outils Open Source,
  • L’accès à un Github (sur lequel des esprits taquins ont déjà repéré des failles critiques),
  • Une plateforme à disposition des développeurs,
  • La possibilité de charger une version Testnet de la blockchain Libra, afin de trafiquer du code.

À ce propos, et même si cette information exclusive pourrait choquer les plus sensibles, il se murmure dans les couloirs de la rédaction du Journal du Coin que certains, parmi les membres les plus respectables de la rédaction, seraient en ce moment même en train de se compromettre dans ce dossier et tenteraient de créer une forme de monstrueux hybride… L’avenir nous dira si nous assistons en direct à la naissance des premiers « Libra Maximalist ».

Le portefeuille Calibra, encore bien mystérieux

S’agissant de Calibra, les choses demeurent assez confuses et seul le site dédié à l’annonce de son lancement en 2020 permet de discerner les futurs développements.

Ainsi, on notera que si le portefeuille permettant de stocker des Libra sera implémenté directement dans les logiciels de l’écosystème Facebook, il fonctionnera également au travers d’applications dédiées disponibles sur AppStore et Android Market.

Cependant, une vraie question demeure : sera-t-il possible de rapatrier des Libra sur des portefeuilles garantissant aux utilisateurs la gestion de leurs clefs privées ? Probablement pas si l’on en croit l’ersatz de Tokenomic disponible dans les documents actuellement disponibles.

Démonstration de toute la difficulté à garantir la cohérence de communication sur un dossier aussi gigantesque, c’est peut-être à cause d’une communication un peu trop hâtive que Mark Zuckerberg himself, nous permet d’en apprendre un peu plus dans son premier post abordant frontalement le sujet :

https://www.facebook.com/zuck/posts/10107693323579671

« (…) Calibra disposera d’une équipe dévouée d’experts en gestion des risques qui s’efforceront d’empêcher les gens d’utiliser Calibra à des fins frauduleuses.(…) Nous croyons également qu’il est important pour les gens d’avoir le choix, donc vous aurez la possibilité d’utiliser de nombreux autres portefeuilles tiers sur le réseau Libra. » Post Facebook de M. Zuckeberk présentant Libra et Calibra

Ainsi, le créateur originel de The Facebook semblerait sous-entendre que Calibra sera à terme configuré pour fonctionner de concert avec d’autres portefeuilles crypto, ce qui serait de nature à encore plus dynamiser l’intégralité du secteur !

Est-ce que la Libra pourrait se révéler être un « Bitcoin Killer » ?

Hormis permettre de faire des titres racoleurs ces derniers jours, cette question a autant de sens que par exemple « L’essor de la production de sardines fera-t-il disparaître l’industrie du fenouil ? Enquête. » ou, plus sérieusement et pour rester un minimum dans le thème « Le développement du système SWIFT à t’il mit en péril la valeur de l’or physique ? »…

En effet, si la Libra est l’arrière petite fille du Bitcoin (qui n’est pas cité une seule fois dans le Livre Blanc, y’a plus de respect ma bonne dame), et partage de nombreux fondamentaux technologiques avec son illustre aîné, les propositions de valeur sont extrêmement différentes, voire antinomiques en bien des points.

Qu’une grande partie des cryptomonnaies existantes, notamment celle dont la valeur repose sur la rapidité et/ou la quantité de transactions soit menacée par Libra, c’est une possibilité en revanche crédible. Et là, on parle carrément de Ripple, Litecoin ou Stellar.

Et ces sombres perspectives pour certaines des superstars du secteur pourraient même s’avérer plus inquiétantes encore : le Livre blanc de Libra sous-entend en effet lourdement qu’à terme, des développeurs indépendants pourront se servir du réseau pour créer leurs propres applications…Ethereum, TRON ou NEO vont probablement suivre avec attention la suite des événements !

En revanche s’agissant de Bitcoinet ce n’est pas un intégriste de l’or numérique qui vous le dit – pas la moindre inquiétude à avoir. Pour le comprendre, je vous encourage à aller utilement dépenser 1 heure de votre vie en dégustant l’indispensable article publié ici même la semaine dernière : « Un scénario optimiste pour le Bitcoin ».

Mieux encore, il est très vraisemblable qu’un engouement pour le Bitcoin se fasse jour parmi les quelques % de la population qui, tôt ou tard, s’apercevront du marché de dupe que leur propose Libra : de l’ergonomie, de la vitesse et des paillettes, en échange de leur consentement à se laisser scanner, d’une manière ou d’une autre. Or, la population qui va être atteinte par Libra est tellement colossale, que ces quelques % seront de nature à littéralement faire exploser l’adoption de Bitcoin, dont on rappellera utilement qu’elle ne concerne pour l’heure que quelques dizaines de millions d’individus sur la planète, dans les scénarios les plus optimistes.

Et maintenant ?

Avec un lancement officiel qui pourrait ne pas intervenir avant 1 an, il est vraisemblable que Libra ré-adopte la discrétion qui caractérise le projet ces deniers mois. Le Léviathan nous a laissé entrevoir son envergure et devrait maintenant rejoindre les grands fonds pour quelque temps, au risque de continuer à provoquer la panique des bourgeois.

En effet, si les défis techniques restants à relever n’ont rien d’anecdotique, ce qui va se jouer les prochains mois conditionnera la capacité de Facebook à convaincre que Libra ne constitue rien d’autre qu’un PayPal amélioré, plutôt que les prémices d’un proto-État d’essence privée. Si on reconnaît à l’entreprise californienne de larges capacités d’anticipation, il est vraisemblable que la rapidité et la frontalité d’une réaction comme celle du ministre de l’Économie français Bruno Le Maire, ait pris de court jusqu’à la Direction du géant social.

Dans ce contexte, on notera que si le Crédit Mutuel fait une colère et appelle « les états à s’opposer à la cryptomonnaie Facebook », la France qui préside actuellement le G7 prévoit de créer une Task Force dans la perspective du prochain sommet mi-juillet, qui si Libra n’est jamais cité, aura vocation à « Mieux encadrer les stablecoins » (suivez mon regard hein).

Ainsi, de la capacité de Facebook à convaincre que sa monnaie interne n’a pas vocation à (trop) disrupter l’Ancien Monde, découlera les marges de manœuvre qui seront laissées à l’entreprise dans ses projets monétaires. Ce qui n’est pas sans ironie, c’est que pour parvenir à ses fins Zuckerberg pourra continuer de déployer un vecteur jusqu’alors plutôt chasse gardée des nations : la diplomatie internationale !

De toute façon, soyez sûr que Libra ne fera aucune difficulté à accepter toutes les concessions, en tout cas dans les premières années de son existence…En effet, comme le rappelle prophétiquement sa vidéo de présentation « Libra. It’s just the beginning ». 

Hellmouth Banner

Ex-rédacteur en chef du Journal du Coin j'apporte ma petite pierre à l'édifice financier global qui émerge sous nos yeux. Les insultes, scoops, propositions de sujets, demandes en mariage et autres corbeilles de fruits sont à livrer sur mes différents comptes sociaux. Vous pouvez également venir discuter sur le groupe FB associé à l'initiative Tahiti Cryptomonnaies

Commentaires

2 responses à “Tout ce que le projet Libra nous raconte (et plus important, tout ce qu’il nous cache !)


libre
La liberté ne commence que par le soulèvement des individus ! Les opprimées de la finance et de certains états commence leurs luttent en observant leur ennemies riposter a leurs efforts. Je suis l'observateur qui releve l'imposture de Facebook en proposant un shit coin pour faire avancer les pions de cette partie d’échec. Avons nous besoin d’être contrôlé pour nous faire croire que nous sommes libre ou pour créer les intérêts des uns pour nous faire imaginer de continue que nous allons vers la liberté. Je reste dans le campement du nomade opprimée et continue a croire que nous n’avons pas besoin d’être flické a haute surveillance par un shit coin non décentralisé. Nous n’avons pas besoin de savoir combien de fois j’ai tirer la chasse d’eau pour connaître le montant que je dois payer pour aller chier. Nous n’avons pas besoin de connaître et de nous faire flické pour avoir acheté un pot de yaourt a l'hypermarché. Vive les cryptomonnaies décentraliser,vive les monnaies anonymes qui sont les droits a la pudeur et a nos libertés.
Répondre · Il y a 5 ans

Ff
Aucune monnaie n'est anonyme. Quand vous avez des choses gratuite comme une carte black en échange les banques vende vos données. Donc non l'euro et autres ne sont pas anonyme. Déjà pour le monero des start-up et pays s'équipe pour la tracer
Répondre · Il y a 5 ans

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