Kraken : Jesse Powell (PDG) donne son avis sur la régulation

Aujourd’hui, nous avons une actualité régulation originale puisque ce n’est pas une autorité étatique qui nous expose ses idées, mais bien un exchange. À ce titre, Kraken entre dans les détails de son refus de coopérer avec le NYAGNew York Attorney General ou procureur général de New York -. Kraken revient également sur les raisons de son départ du Japon. Enfin, l’exchange nous propose sa vision de la réglementation crypto et de la protection du consommateur.

La publication de Kraken du 22 avril 2018 est rédigée par son directeur général Jesse Powell qui nous rappelle que Kraken est un acteur clef du secteur, et ce depuis 2011. Il évoque par la suite les raisons pour lesquelles les cofondateurs de Kraken se sont lancés dans cette aventure :

Jesse_Powell-Twitter-@jespow
@jespow

« Nous avons quitté nos emplois confortables en tant que fondateurs d’une entreprise prospère, motivés par la volonté de construire un échange licite et professionnel capable de faire le pont entre les cryptoactifs et les institutions financières traditionnelles. C’est encore notre mission aujourd’hui. C’est une mission que nous ne pouvons accomplir sans travailler avec les organismes de réglementation. » Jesse Powell

 Le questionnaire du NYAG

Comme nous vous l’avions rapporté, Kraken a décidé de ne pas répondre au questionnaire envoyé par le NYAG à 13 exchanges. Ce questionnaire comprenait de nombreuses demandes, trop nombreuses pour Powell, 34 pour être exact.

Kraken estime avoir déjà répondu à une partie de ces questions lors des audits réalisés par les autorités étasuniennes en 2014 et 2017. Par ailleurs, certaines de ces informations sont considérées comme secrètes par l’exchange soit pour des raisons commerciales, soit pour des raisons de sécurité.

Jesse Powell affirme, pour justifier ce refus de coopérer, qu’il aurait donné la même réponse au procureur général de Corée du Nord.

Enfin, l’exchange déclare être prêt a collaborer avec l’État de New York pour remplacer le système de Bitlicense en vigueur. Si Kraken a fui New York et sa Bitlicense, ce n’est pas pour se soumettre à des demandes aussi invasives.

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Le départ du Japon de Kraken

Kraken est le premier exchange à s’être implanté au Japon. Il a participé à la création d’une organisation d’autorégulation dans le pays. Toutefois, l’exchange n’a pas réussi à obtenir une part de marché significative au pays du soleil levant, largement devancé par Bitflyer. Dès lors, Jesse Powell a annoncé :

« Ironiquement, après tous les efforts que nous avons déployés pour faire adopter le VC Act  – Virtual Currency Act – au Japon, nous avons décidé de prendre du recul. » Jesse Powell

Le directeur général de Kraken affirme que l’exchange a été victime d’une campagne de dénigrement de la part de ses compétiteurs. En effet, les exchanges japonais sont accusés d’avoir calomnié certains tokens pour ralentir leur progression. Toujours selon Kraken, leurs concurrents auraient employé ces stratégies, car ils n’avaient pas les capacités techniques nécessaires pour proposer ces tokens.

Powell apparaît amer quant à ses concurrents japonais, mais loue le marché qu’il estime « très compétitif ». De fait, il considère que le VC Act constitue un exemple d’une législation équilibrée. De même, il reconnaît les efforts et le travail mis en œuvre par la FSA – Financial Services Authority – pour arriver à cette réglementation. Le VC Act n’est pas parfait, mais reste un bon exemple de la marche suivre pour créer un marché crypto compétitif et fonctionnel. Tellement compétitif que Kraken n’a pas réussi à s’y implanter durablement, voyant sa part de marché réduire inexorablement au profit de Bitflyer.

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Une bonne politique réglementaire selon Kraken

Par la suite, la publication évoque l’expérience qu’a développée l’équipe de Kraken en matière de législation. C’est grâce à cette expérience que Jesse Powell nous donne les 21 points clefs d’une bonne régulation crypto.

Un peu de bon sens

Tout d’abord, les premiers vont d’évidence pour tout bon politique. Il est nécessaire se poser les questions relatives à la place du secteur blockchain dans le pays et quel type de réglementation adopter, si une législation est nécessaire.

Powell en profite pour rappeler aux autorités que si la fraude et le blanchiment d’argent figurent en tête de leurs priorités, il n’est pas pour autant nécessaire d’adopter des lois particulières pour ces infractions au sein du secteur des cryptoactifs. Dès lors que ces infractions sont déjà punies par la loi, il n’est pas nécessaire d’en faire des infractions particulières.

Beaucoup de libertés

Ensuite, Powell insiste en plusieurs points sur quelque chose d’important à nos yeux. La nécessité absolue de comprendre l’écosystème blockchain et de le laisser évoluer à son rythme. Le directeur général de Kraken affirme dans son point n° 7 le besoin :

« D’accepter que la technologie et l’écosystème évoluent encore rapidement et de façon imprévisible. Une erreur réglementaire pourrait finir par nuire aux consommateurs à long terme. » Jesse Powel

Il serait dangereux de vouloir prévenir des risques que l’on ne comprend pas, ainsi que d’assumer que le secteur de la blockchain présente les mêmes risques que les marchés traditionnels. Tout comme, il est vain demander aux entreprises blockchain de décrire l’intégralité de leurs procédés. À dire vrai, les autorités gouvernementales ont rarement l’expertise nécessaire pour comprendre les technologies utilisées. De plus, un tel étalage de savoir pourrait compromettre des secrets commerciaux. On peut voir ici une référence à demi cachée aux demandes invasives du procureur de New York.

Un soupçon de collaboration

La publication poursuit en rappelant que plusieurs pays concourent déjà pour devenir des « havres pour les entreprises blockchain ». Dès lors, une réglementation trop lourde pourrait faire fuir ces entreprises. Par ailleurs, les gouvernements prenant de telles résolutions, auront-ils vraiment le pouvoir de faire appliquer la loi à l’encontre d’entités étrangères ?

Enfin est posée la question de savoir s’il est vraiment nécessaire de faire rentrer les cryptoactifs dans des cases telles que « marchandises », « titres financiers » ou « devises ». En effet, le contenu de ces catégories varie d’un État à l’autre, il serait donc avisé de se passer de celles-ci par souci de simplicité.

Réduction de la criminalité

Powell affirme que « les vérifications d’identités et la surveillance des transactions sont un coût croissant » pour tout exchange en règle. Chez Kraken, c’est 200 personnessoit 25 % de l’entreprise – qui travaillent à l’application des diverses normes. À cela s’ajoute, le nombre croissant de demandes d’application de la loi venant d’organisme étatique, jusqu’à 7 par semaine en 2018.

Powell termine sur le sujet en soulignant que les exchanges majeurs travaillent d’ores et déjà main dans la main avec les régulateurs contre les criminels. Que ce soit par le partage d’information, ou le gel des actifs volés passant d’un exchange à un autre. Il en va de leur intérêt de collaborer à l’élimination des éléments nuisibles à l’écosystème.

Pour conclure, Powell encourage les législateurs à penser sur le long terme. Une législation trop hâtive pourrait être néfaste. Certes, les arnaques sont préoccupantes pour les gardiens de l’ordre public, mais elles existent depuis des siècles, tous secteurs confondus.

N’avons-nous pas tous reçu cet email d’un fameux prince nigérian qui avait besoin d’argent pour nous léguer une fortune. Pour ceux qui l’ont reçu, vous avez eu affaire à « l’arnaque nigériane » qui est l’un des scams les plus anciens qui remontent aux années 1830. Comme quoi, les exit-scam et autres n’ont pas inventé grand-chose.

Sources : Kraken || images from Shutterstock.com

Thomas G.

Financier et juriste, je suis passionné par les cryptomonnaies depuis leur apparition sur le Deepweb. Fervent supporter du Bitcoin, je suis convaincu que les devises numériques joueront un rôle déterminant dans l'avenir de nos sociétés. Je m'intéresse tout particulièrement aux aspects financiers et législatifs des cryptomonnaies.