Affaire FTX : retour sur une semaine d’auditions autour de Sam Bankman-Fried
Six jours, sept nuits – Il y a tout juste un mois, Sam Bankman-Fried participait à des émissions de télévision et postait encore des messages farfelus sur Twitter. Dans le même temps, à Miami, on démontait les trois lettres géantes qui ornaient le toit du stade de la ville. La Chambre des Représentants se posait alors la question de la pertinence d’une audience à propos de cette affaire FTX. La semaine dernière, le jeune CEO déchu échangeait encore des messages amicaux avec la présidente de cette même chambre pour discuter de sa présence ou non lors d’une audition future alors que le nom de son avocat fuitait dans la presse.
Aujourd’hui, alors qu’il est en détention aux Bahamas et qu’il risque 115 ans de prison, le Congrès a procédé à de multiples auditions pendant que le régulateur des Bahamas et les avocats de FTX sont à couteaux tirés autour des responsabilités des uns et des autres. C’est parce que l’actualité va trop vite et qu’il est parfois compliqué de tout suivre au jour le jour que nous vous proposons un condensé des événements récents autour de l’affaire FTX. Elle marquera à tout jamais une année 2022 pourtant déjà bien pourvue en rebondissements. Une semaine dans l’affaire FTX, c’est maintenant.
Table des matières
- Querelles entre les Bahamas et les avocats de FTX
- Les déclarations édifiantes de John Ray devant la Chambre des Représentants
- Sam Bankman-Fried finalement emprisonné à Fox Hill risque 115 ans de prison
- Nouvelles révélations autour de la double affaire FTX – Alameda
- Et pendant ce temps-là, au Sénat, des témoignages qui dépassent largement le cas Sam Bankman-Fried
Querelles entre les Bahamas et les avocats de FTX
Le régulateur des Caraïbes et John Ray se plaignent chacun de leur côté
Dire qu’il y a de l’eau dans le gaz entre le régulateur des Bahamas et les avocats de FTX aux États-Unis est un euphémisme. En début de semaine, la Commission des Valeurs Mobilières des Bahamas – Securities Commission of the Bahamas (SCB) – a demandé par l’intermédiaire de ses avocats à leurs homologues américains de leur fournir un ensemble de données concernant la clientèle de FTX. Fin de non-recevoir et refus catégorique, la SCB prend note et se plaint au juge du Tribunal des Faillites.
Quasiment dans le même temps, John Ray, le nouveau CEO de FTX, prend sa plus belle plume pour écrire au Premier ministre de l’archipel ainsi qu’au Procureur Général. L’objectif de cette correspondance ? Se plaindre du comportement de la directrice exécutive de la SCB. Elle, ou ses équipes, auraient aidé les dirigeants de l’ancienne équipe de l’exchange à transférer des actifs lors des premières heures de la faillite.
À la recherche de l’argent perdu de FTX
De toute évidence, des deux côtés du golfe du Mexique, la suspicion domine et chacun préserve ses propres intérêts. D’ailleurs, a priori peu confiant dans l’efficacité de la justice bahamienne, FTX annonce le recrutement d’une équipe d’experts pour tenter de mettre la main sur le milliard de dollars qui aurait disparu des comptes.
Ils sont également à la recherche des 450 millions de dollars transférés le soir même de la faillite hors des comptes de l’exchange. En tout, le montant des pertes est vertigineux et des réponses sont indispensables. Fraude ou perte financière, la question mérite d’être posée. Le 12 décembre, le témoignage de John Ray devant les députés apportera d’ailleurs un début de réponse.
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Les déclarations édifiantes de John Ray devant la Chambre des Représentants
Un témoignage qui achève la crédibilité de Sam Bankman-Fried…
Rappelons que le Congrès américain est séparé en deux chambres. D’un côté la Chambre des Représentants, et de l’autre le Sénat. Ces deux entités ont chacune une commission chargée d’enquêter sur ce type d’affaire. Dans le cas présent, c’est le Comité des services financiers de la première qui ouvre le bal avec l’audition de John Ray. Le lendemain, ce sera au tour du Sénat d’animer les débats.
Et devant les délégués de l’institution et sous la présidence de la démocrate Maxine Waters, le nouveau CEO de l’exchange va se livrer à une description terrible de l’état de la société qu’il a trouvé en arrivant. En presque trois heures de témoignage, il décrit le manque édifiant de structures élémentaires chez FTX et dresse un portrait au vitriol de son prédécesseur. Aux confins de l’incompétence et de la malhonnêteté, ses déclarations soulèveront des commentaires affligés de l’assemblée.
…et qui agace (encore) le régulateur des Bahamas
Mais entre les lignes, John Ray va également pointer la responsabilité des autorités des Bahamas. En se demandant à haute voix où sont passés les actifs de la plateforme et qui a bien pu y avoir accès. En bref, il accuse une nouvelle fois la SCB. Et, la réponse ne tardera pas à venir sous la forme d’un communiqué de presse cinglant qui demande aux avocats américains de ne pas entraver l’enquête avec des sous-entendus douteux. La commission se permettra par ailleurs de faire remarquer qu’elle est la première instance internationale à avoir pris une décision contre FTX.
Et puis, il y a cette histoire de courriers électroniques entre la SCB et les équipes de Bankman-Fried. Ils auraient été déplacés par la nouvelle direction de FTX pour faire croire à une collusion entre les deux parties. Les Bahamas reprochent à John Ray de vouloir réécrire l’histoire à sa convenance sans tenir compte ni des lois locales ni du déroulement des faits. Bref, le torchon brûle entre les deux camps sur fond de querelles de juristes. Mais, pendant ce temps-là, sur l’île de New Providence, les choses se précisent pour le bientôt hors-la-loi : M. Bankman-Fried.
Sam Bankman-Fried finalement emprisonné à Fox Hill risque 115 ans de prison
Ira, n’ira pas ? SBF finalement absent de son audition du 13 décembre
La question qui animait depuis quelques jours les médias était la suivante : l’ancien responsable de FTX serait-il présent à l’audition devant le Congrès le 13 décembre ? Viendra, ne viendra pas ? Le doute planait autour de sa participation et il était entretenu par des déclarations contradictoires. Après avoir appris le nom de son nouvel avocat, le compte à rebours était lancé et les heures passaient sans que l’on en sache davantage.
Mais finalement, les choses s’accélèrent au petit matin du 12 décembre. La France apprend au petit-déjeuner que Samuel Bankman-Fried a finalement été arrêté aux Bahamas. Après une collaboration réussie entre Nassau et Washington, le petit génie des affaires de 2021 est sous les verrous la veille de son audition prévue devant le Congrès.
Il faut dire qu’il a été arrêté et qu’il risque 115 ans de prison
Mais, d’audition, il n’y aura pas. Ou du moins pas tout de suite. Les autorités américaines ont finalement accéléré dans la procédure et obtenu son arrestation. Selon des sources concordantes, il pourrait être inculpé de fraudes et fraude électronique, de fraude sur les valeurs mobilières et de blanchiment d’argent, le tout en complot, soit 8 chefs d’accusation au total.
S’il est reconnu coupable, il encourt 115 ans de prison aux États-Unis. Mais aujourd’hui, c’est bien aux Bahamas qu’il est incarcéré et plus précisément au sein de la seule prison de l’archipel : Fox Hill. Sa demande de libération sous caution a été refusée. Il restera donc là-bas jusqu’au 8 février au moins, date de son audience d’extradition vers les États-Unis. On sait par des sources proches du dossier qu’il ne bénéficie d’aucun traitement de faveur, mais qu’il séjourne pour l’instant à l’infirmerie. Entre la surpopulation et le manque d’hygiène, le décalage avec sa vie d’avant risque d’être particulièrement violent.
Nouvelles révélations autour de la double affaire FTX – Alameda
Financement de parti(s) politique(s) et investissements dispendieux dans l’immobilier
Sam Bankman-Fried rendra quand même public le témoignage qu’il s’apprêtait à faire devant la Commission. Sans surprise, il est toujours en boucle sur le même refrain qu’il répète à l’envi depuis plusieurs semaines. Il s’excuse encore et toujours, et continue à reprocher au monde entier ce qui relèverait plutôt de sa propre responsabilité. Mais, alors que l’on pensait voir le rythme des révélations se ralentir, il n’en est rien.
On apprendra, en effet, cette semaine que des hommes politiques cherchent à tout prix à se défaire de l’image encombrante de FTX. Ils en font de même pour les dons reçus pour financer leurs actions. Dans un autre style, les enquêteurs dépêchés aux Bahamas découvrent que l’empire immobilier de FTX pourrait représenter finalement 200 millions de dollars. La vente de ces biens immobiliers serait une priorité pour faire rentrer un peu d’argent dans les caisses.
Un groupe Telegram et des comptes en Corée du Sud comme cerises sur le gâteau
Mais d’autres rumeurs encore plus surprenantes arriveront également ces jours-ci comme l’existence d’un compte secret de la plateforme en Corée. Il aurait servi à dissimuler les dettes colossales de la société. On parle même de 8 milliards de dollars de transfert…
Et comme plus rien ne nous surprend sur les pratiques de la bande à Bankman-Fried, l’existence d’un mystérieux groupe de discussions entre les dirigeants de FTX et d’Alameda sur Signal semble finalement aussi tout à fait possible. En tout cas, c’est ce qu’indique un média australien. Info ou intox ? Sam Bankman-Fried ayant nié en faire partie, il est donc fort possible que ce soit vrai.
Et pendant ce temps-là, au Sénat, des témoignages qui dépassent largement le cas Sam Bankman-Fried
Revenons au Sénat, pour clôturer cette semaine. L’absence du principal intéressé n’aura pas empêché un moment d’échange à propos de FTX mais surtout de l’industrie des cryptomonnaies dans son ensemble. Ainsi, le 14 décembre, juste après le discours d’ouverture du président de la Commission, on a pu assister à plusieurs déclarations d’amour à la crypto mais également à quelques attaques bien placées des adversaires de Bitcoin & Co. Voici deux extraits symbolisant la diversité des débats :
« Le code n’a pas commis de crime. FTX et la crypto ne sont pas les mêmes choses. FTX était opaque, centralisé et malhonnête. Les cryptomonnaies sont open-source, décentralisées et transparentes. »
Pat Toomey, sénateur républicain de Pennsylvanie
« La crypto est devenu l’outil préféré des terroristes, des gangs de ransomware, des dealers de drogue et des états voyous qui veulent blanchir leur argent. »
Elisabeth Warren, sénatrice démocrate du Massachussetts
Au moment de refermer cette revue hebdomadaire de l’affaire FTX, on apprend que l’exchange se prépare à vendre aux enchères certaines de ses sociétés pour tenter d’augmenter ses liquidités, mais aussi que la Preuve de Réserve, si chère aux plateformes crypto ces dernières semaines, est sévèrement remise en question par le retrait officiel de Mazars. Ceci montre à quel point l’industrie est toujours fragilisée par la claque FTX et soumise depuis à des coups de pression récurrents.
Terminons en disant que Samuel Bankman-Fried dort en prison. Que les autorités américaines et bahamiennes reprendront dès lundi leurs investigations délicates pour faire la lumière sur les faits de novembre. Et, que la démocratie américaine tente toujours de comprendre ce qu’il s’est passé en auditionnant témoins, spécialistes et représentants du peuple. Beaucoup de questions restent toujours en suspens. Cependant, de nombreuses révélations sont encore à venir dans cette affaire FTX. Cet évènement alimentera également, à notre plus grand regret, les discussions des fêtes de fin d’année.
La faillite de FTX est là pour nous rappeler qu’il faut rester prudent dans cet écosystème encore bien jeune. Pour conserver vos cryptos, rien ne vaut un wallet Ledger. Les Nano S et Nano X procurent sécurité et facilité d’utilisation (lien commercial).