Minute régulation : France, États-Unis, Émirats Arabes Unis

Bienvenue dans votre minute régulation de la semaine ! Nous repartons aujourd’hui pour un tour d’horizon des tentatives de régulation des cryptomonnaies. Cette semaine, nous accorderons une attention particulière à la France et aux États-Unis. Je vous avais déjà fait part d’un potentiel système d’agrément des ICOs en France au mois de mars. Cette mesure vient d’être concrétisée et sera surement votée en septembre avec le reste du dispositif PACTE.

France : loi PACTE et AMF

Loi PACTE

AMFLe 18 juin 2018 le projet de loi a été présenté en conseil des ministres par notre ministre de l’économie Bruno Lemaire. La loi PACTE – ou plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises – entend faire grandir les PME françaises afin de les rendre plus compétitives. Ce texte est le résultat de huit mois de travail en concertation avec diverses autorités. De plus, il a fait l’objet d’une consultation au public récoltant plusieurs dizaines de milliers de réponses de la part d’entrepreneurs.

À l’heure de la mondialisation, notre ministre de l’économie s’inquiète de la taille des entreprises françaises. C’est pourquoi il entend réformer le cadre réglementaire pour les PME par le biais des 70 articles qui composent le projet de loi. Les devises numériques ne sont pas au centre de cette réforme et pourtant elles ne sont pas laissées-pour-compte.

Le projet présenté en Conseil des ministres comprend des dispositions sur les ICO. L’AMF mettrait en place un système d’agrément pour les ICO. L’ensemble des ICO agréees formera une « liste blanche » des projets aux termes de la loi. Cette liste devrait être un outil précieux pour les investisseurs. Afin d’intégrer cette liste blanche, les porteurs d’ICO devront se soumettre à certaines obligations. L’AMF pourra leur imposer de mettre en place un mécanisme de séquestre pour les fonds levés, ainsi que des exigences renforcées en termes de KYC.

Par ailleurs, l’AMF a déjà établi la liste noire des acteurs crypto, ce qui nous amène à notre prochain point.

AMF & exchanges non autorisés

Le régulateur des marchés financiers avait déjà publié une liste de sites proposant des services d’investissement sans y être autorisés en mars dernier. Cette semaine, elle a étoffé cette liste noire. En effet, l’AMF a ajouté quatre nouveaux sites à sa liste de sites proposant en France des services d’investissement non autorisés. Aux termes de la loi du 9 décembre 2016 sur la transparence et la lutte contre la corruption, il est formellement interdit de proposer des services d’investissement à des particuliers sans autorisation de l’AMF.

D’ici à 2019, nous devrions donc avoir une liste noire assez complète et une liste blanche ne demandant qu’à être remplie d’ICOs prometteuses et innovantes.

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États-Unis : Caroline du Nord et IRS

Vers une BitLicense Nord-Carolinienne

L’état de la Caroline du Nord a adopté un projet de loi connu sous le nom de « House Bill 86 ». L’assemblée de Caroline du Nord a ratifié de manière unanime ce projet de loi en date du 14 juin 2018. Actuellement, ce texte ne requiert que la signature du gouverneur Roy Cooper pour entrer en vigueur.

Cet acte ajoute de nouvelles terminologies à la législation de l’État, telles que monnaies numériques, Bitcoin ou encore tokens. En plus de ces définitions, la version finale de ce projet de loi met en place un système de licence pour les entreprises voulant proposer des services liés aux devises numériques. Enfin, le gouverneur pourra à tout moment requérir les données stockées par les entreprises licenciées.

Mike Lempres, directeur juridique de Coinbase, a déclaré la semaine dernière au sujet de cette nouvelle législation :

« En aidant les crypto business à se conformer à la lettre de la loi les dirigeants de l’État ouvrent la voie à l’épanouissement de ces nouvelles technologies au sein de leur communauté. » Mike Lempres

L’IRS enquête sur les gains en monnaie numérique non déclarés

IRSDéclarer et payer les taxes relatives aux cryptomonnaies, sujet sensible pour les investisseurs comme pour les législateurs. Les régimes applicables sont souvent peu clairs, ce qui entraîne certaines confusions voir une absence de déclaration des gains. Toutefois, mieux vaut supporter ce calvaire que de ne pas déclarer vos gains, les pénalités pouvant être très sévères. L’IRS – The Internal Revenue Service – intensifie ses efforts pour mettre en lumière de potentielles fraudes ou gains non déclarés aux États-Unis.

Le fisc étasunien est très bien armé pour effectuer ces recherches. En effet, l’IRS a remporté un procès contre Coinbase au début de l’année 2018, lui donnant accès à plusieurs milliers de documents concernant les utilisateurs de l’exchange. Ce type d’information permet de créer des profils permettant d’identifier les contribuables négligeant dans leurs déclarations.

De plus, l’IRS n’en est pas à sa première passe d’armes avec les cryptomonnaies. Comme le souligne Gary Alford, le responsable de la chute du marché noir en ligne Silk Road :

« Nous sommes impliqués dans ce secteur depuis 2013, nous avons donc un pas d’avance. Maintenant que de plus amples informations sont partagées nous somment impatients d’utiliser les informations que nous avons recueillies. » Gary Alford

Selon les dires d’un avocat fiscaliste new-yorkais, les gains en cryptomonnaies non déclarés au cours de l’année 2017 représenteraient plus de 90 milliards de dollars.

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Émirats arabes unis : mise en place d’un cadre réglementaire pour les cryptoactifs

Législateur d’Abu Dhabi entend mettre en place un cadre réglementaire englobant les exchanges et autres intermédiaires fonctionnant dans l’écosystème cryptomonnaies. Cette initiative s’inscrit dans la volonté de créer un environnement sécurisé et florissant pour les Fintech dans le pays. Ce projet de loi est soutenu par la FSRA – Financial Services Regulatory Authority -, qui a publié un document expliquant les lignes directrices de ce projet. Par ailleurs, Richard Teng directeur de la FSRA a déclaré :

« Les acteurs responsables du secteur des cryptoactifs recherche un cadre réglementaire exigeant qui favorise la confiance du marché. Notre engagement avec les autres régulateurs mondiaux et de prendre en compte les principaux risques mis en évidence par le secteur pour que les cryptoactifs soient plus largement acceptés et institutionnalisés. » Richard Teng

FSRA

Selon la réglementation envisagée, les nouveaux exchanges voulant opérer dans le pays devraient payer des frais d’installation à hauteur de 125 000 $ ainsi que des frais annuels de 60 000 $. De plus les prestataires de services tels que les fournisseurs de wallets devraient s’acquitter de frais initiaux de 20 000 $ ainsi que 15 000 $ annuellement.

Le projet envisage aussi la taxation des exchanges. Deux régimes sont mis en avant : le premier, pour les exchanges dont le volume journalier serait en dessous de 10 millions de dollars, entraînerait une imposition à hauteur de 0.0015 %. Le second s’appliquerait aux exchanges ayant un volume journalier de plus de 250 millions de dollars; ces derniers verseraient 0.0006 % de leurs revenus, c’est-à-dire un minimum de 150 000 $ par mois.

La FSRA classifie les devises numériques comme des commodités, et elle entend appliquer aux tokens les règles déjà en place concernant les titres financiers.

Sources : Bitcoinist  ; Bitcoin.com  ; AMF ; Economie.gouv ; Bitcoin.com || Images from Shutterstock

Thomas G.

Financier et juriste, je suis passionné par les cryptomonnaies depuis leur apparition sur le Deepweb. Fervent supporter du Bitcoin, je suis convaincu que les devises numériques joueront un rôle déterminant dans l'avenir de nos sociétés. Je m'intéresse tout particulièrement aux aspects financiers et législatifs des cryptomonnaies.