Après avoir traité du Bitcoin, d'Ethereum, des altcoins et des stablecoins au sein de divers Chapitres, découvrons ensemble la finance décentralisée (Decentralized Finance ou DeFi) ! Dans cet article introductif, nous répondrons à une dizaine de questions que les débutants se posent à son sujet. Nous espérons que ces points clés vous donneront l’envie d’aller plus loin, et de consulter les différents articles de ce Chapitre de notre Encyclopédie !

Table des matières
- 1. Qu’est-ce que la finance décentralisée ?
- 2. Quels sont les avantages de la finance décentralisée par rapport à la finance traditionnelle ?
- 3. Quels sont les différents services et applications disponibles dans la finance décentralisée ?
- 4. Qu’est-ce qu’une plateforme d’échange décentralisée (DEX) ?
- 5. Comment fonctionnent les smart contracts dans la finance décentralisée ?
- 6. D’où proviennent les rendements dans la finance décentralisée ?
- 7. Quels sont les risques associés à la finance décentralisée ?
- 8. Quelles sont les plateformes et les protocoles DeFi les plus populaires ?
- 9. Quelles sont les interactions entre finance décentralisée et systèmes financiers classiques ?
- 10. Quelles sont les tendances à surveiller, et que peut-on espérer à l’avenir pour la finance décentralisée ?
1. Qu’est-ce que la finance décentralisée ?
Avant toute chose, commençons par définir ce qu’est la finance. Selon le Larousse, la finance est :
- « L’ensemble des professions qui ont pour objet la monnaie, l'argent et ses moyens représentatifs, notamment les valeurs mobilières. »
- « La science de la gestion des patrimoines individuels, des patrimoines d'entreprise et des deniers publics. »
C’est la deuxième définition qui nous intéresse aujourd’hui : la finance est une science de gestion. Chez le Journal du Coin, nous nous amusons souvent à le résumer de façon triviale :
« La finance, c’est faire de l’argent avec de l’argent ! »
Benoît Huguet
Ainsi, la finance regroupe un ensemble de professions et de services permettant de gérer son patrimoine, qu’il s’agisse d’actifs financiers, d’argent liquide, d’immobilier, etc. Le but étant bien sûr de conserver ou de faire fructifier la valeur de ce patrimoine au cours du temps.
Sans aborder le caractère centralisé des institutions financières, nous savons que ce sont des humains qui sont chargés de gérer les finances d’autrui. Des humains qui sont soumis à des lois précises, et qui sont assermentés par différentes institutions et organismes de contrôle.
La notion de finance décentralisée est consubstantielle à l’apparition des cryptomonnaies, et plus précisément des technologies de registre distribué dont les blockchains. On pourrait donc dire naïvement que la DeFi est la finance appliquée aux cryptomonnaies. Cependant, le concept va plus loin que cela : l’objectif de cette rubrique encyclopédique est de couvrir ses nombreux aspects.
Nous proposerons donc cette définition générale : la finance décentralisée est un écosystème financier, basé sur les smart contracts, ne nécessitant pas d'intermédiaire ou organe central de contrôle pour assurer le respect des obligations contractuelles entre les parties. La DeFi offre toute une gamme de services existant dans la finance traditionnelle, mais aussi des produits financiers innovants et uniques.
Dans l’univers de la finance décentralisée, les institutions et les régulations sont remplacées par du code informatique. Ce code est déployé et exécuté sur des plateformes de smart contracts, la plus célèbre d’entre elles étant Ethereum. On parle donc d'applications décentralisées ou dApps pour désigner ces plateformes et ces services.

2. Quels sont les avantages de la finance décentralisée par rapport à la finance traditionnelle ?
La caractéristique fondamentale de la finance décentralisée est ainsi l’absence de tiers de confiance. Les banques, courtiers ou compagnies d’assurances sont remplacés par des smart contracts. Ces contrats intelligents et autonomes permettent d’effectuer un ensemble de tâches, qui étaient autrefois réservées à des professionnels assermentées.
L’absence d'intermédiaires et l’exécution automatisée des tâches via les smart contracts garantissent plusieurs propriétés avantageuses :
- Les frais associés à tous les types de services financiers sont réduits. Il y a beaucoup moins d’intermédiaires, et donc de salaires et de commissions à payer ;
- Ces services sont aussi plus rapides par rapport à leur équivalents dans la finance traditionnelle. En effet, il n’y a plus de documents à signer, de comptables à consulter : les transactions sont effectuées directement sur blockchain, en quelques clics de souris, et en quelques secondes ou minutes ;
- Les services financiers et les registres comptables sont transparents. La visibilité des transactions est ainsi publique : contrairement à la finance traditionnelle, qui est parfois très opaque, dans la DeFi, le code des smart contracts dédiés aux différents services est accessible à tous ;
- Enfin, la finance décentralisée est résistante à la censure. Aucune entité ou organe de contrôle ne peut geler une transaction, interdire un service, ne pas respecter modifier a posteriori les clauses d’un contrat.
Nous avons énuméré ici les quatre avantages majeurs de la DeFi, mais d’autres en découlent directement. Par exemple, et c’est l’un de ses attraits, les rendements proposés par les différents services sont généralement plus élevés que ceux de la finance traditionnelle. Le caractère souvent anonyme de la DeFi attirera également certains profils, mais nous reviendrons sur ce point plus tard.
3. Quels sont les différents services et applications disponibles dans la finance décentralisée ?
La DeFi offre la plupart des services et produits financiers disponibles chez les banques, courtiers et plateformes d’échange classiques ! La liste suivante n’est pas exhaustive :
- Plateformes d’échange décentralisées (DEX) ;
- Services de prêt et d’emprunt (lending) ;
- Produits d’investissement et d’épargne ;
- Produits financiers dérivés (par exemple des options, des contrats perpétuels, des contrats à terme) ;
- Oracles décentralisés (permettent d’obtenir des données du monde extérieur) ;
- Agrégateurs de rendement ;
- Assurances décentralisées ;
- Tokenisation d’actifs (actions, produits financiers, immobilier, œuvres d’art) ;
- Protocoles de trading algorithmique…
Certains instruments financiers n’existent que dans la finance décentralisée, comme le staking. Nous vous présenterons le fonctionnement de ces services et de ces applications tout au long de ce Chapitre.
4. Qu’est-ce qu’une plateforme d’échange décentralisée (DEX) ?
Une plateforme d’échange décentralisée (decentralized exchange ou DEX) est la version DeFi d’une bourse d’échange classique. Comme l’adjectif l’indique, il n’y a pas d’opérateur central : ce sont des smart contracts qui assurent la fonction de courtier. Il en existe deux types :
- Les DEX à carnets d’ordre ;
- Les DEX à faiseurs de marché automatisés - automated market makers ou AMM.
Ces concepts seront explicités dans les articles suivants. Ce qu’il faut retenir pour l’instant, c’est qu’un DEX est une plateforme d’échange de crypto-actifs gérée par un protocole (un programme informatique) et non une autorité centrale. Les règles du protocole sont codées au sein d’un smart contract, lui-même déployé sur un réseau blockchain. Ce dernier hérite donc des propriétés de ce dernier : il est résistant à la censure et accessible 24/7.
Les DEX présentent des avantages et des inconvénients par rapport à leur version centralisée classique.

5. Comment fonctionnent les smart contracts dans la finance décentralisée ?
Les smart contracts de la finance décentralisée sont particulièrement complexes. En effet, ils sont chargés d’assurer le bon fonctionnement de produits et services financiers qui vont bien au-delà du simple échange d’actifs. Leur fonctionnement est donc très variable selon le protocole considéré. Cependant, nous pouvons présenter quelques généralités.
Les smart contracts ont trois propriétés importantes : ils sont autonomes, immuables et transparents.
Dans la DeFi, ils permettent à différents utilisateurs ne se connaissant pas, et ne se faisant pas confiance a priori, de gérer des flux financiers. Ainsi, ils ont la main mise sur d’importantes réserves de fonds, que l’on appelle pools de liquidités. Il est donc crucial de les coder correctement !
Tout d’abord, il s’agit de bien architecturer le protocole assurant le service considéré. Il faut concevoir, du point de vue de la logique, son champ d’action et ses limites. Ensuite, on code les différentes règles et conditions qui encadreront leur utilisation. Une fois les contrats audités, ils sont déployés sur une blockchain, comme Ethereum.
Une fois déployés, les utilisateurs peuvent interagir avec les contrats en leur soumettant des transactions. Il peut s'agir, par exemple, d’un prêt. Ces transactions sont vérifiées, tout comme les conditions fixées dans le contrat. Si la transaction de l’utilisateur respecte les critères requis, elle est exécutée, puis la logique du contrat déclenche les événements prévus.
Les utilisateurs déclenchent des calculs et exécutent des transactions : cela a un coût - le gas sur Ethereum. Les frais sont généralement à la charge de l’utilisateur, mais certaines dApps peuvent s’en acquitter. La réduction des frais passe par la scalabilité des systèmes et l’optimisation du code : c’est un challenge permanent dans la finance décentralisée.
6. D’où proviennent les rendements dans la finance décentralisée ?
Tout comme dans la finance traditionnelle, les rendements générés dans la finance décentralisée proviennent des intérêts générés par les fonds ou les actifs prêtés. De plus, certaines activités génèrent des rendements par un service rendu. Dans le cas du staking par exemple, l'utilisateur participe à la sécurisation d’un réseau : il est récompensé par les frais d’utilisation et/ou l’inflation monétaire du protocole.
Il existe une grande variété de produits et de services pour générer des profits. Cette rémunération provient généralement :
- Des intérêts versés par les emprunteurs ;
- Des frais d’utilisation du service par les contreparties ;
- De la création de jetons numériques par le protocole ;
- De l’appréciation du cours des actifs déposés, via la loi de l’offre et de la demande.
Toutes ces sources de retour sur investissement seront explicitées en détail au cours des prochains articles, dont celui sur le yield farming.

7. Quels sont les risques associés à la finance décentralisée ?
La finance décentralisée est une nouveauté, et repose sur des technologies expérimentales. Il y a donc des risques certains.
On peut les regrouper en plusieurs catégories :
- Risques techniques : il peut s’agir de bugs dans les smart contracts du produit ou service utilisé. Si ce dernier est mal conçu ou mal codé, on peut dans certains cas extrêmes perdre ses fonds. La plateforme de smart contract elle-même peut également comporter des risques techniques, bien que ce soit rarement le cas aujourd’hui, si l’on s’en tient aux principaux réseaux du marché ;
- Risques de marché : certains produits et services dépendent de l’activité du marché considéré. Par exemple, la liquidité ou la profondeur de ce dernier peut grandement affecter les rendements des instruments financiers utilisés. La valeur des actifs peut également fortement varier, le marché crypto étant particulièrement volatil ;
- Attaques et piratages : les smart contracts gérant les produits et services DeFi sont régulièrement sujet aux attaques des hackers. En effet, des montants considérables transitent dans les coffres numériques de ces derniers. Cela fait beaucoup d’envieux, et les pirates redoublent d’ingéniosité pour trouver des failles dans le code et dérober des fonds. D’autres types d’attaques peuvent tout simplement chercher à nuire aux utilisateurs, comme le déni de service ;
- Risques juridiques : la législation entourant la finance décentralisée est pour l’instant floue et changeante selon les espaces. De même, la fiscalité entourant les différents produits est incertaine. Ces risques concernent cependant plus les développeurs que les utilisateurs.
Ces risques seront détaillés dans les articles à venir, au cas par cas.
8. Quelles sont les plateformes et les protocoles DeFi les plus populaires ?
En 2025, la finance décentralisée est un secteur encore jeune, mais plusieurs applications décentralisées ont réussi à s’imposer et à capter des parts de marché.
Voici le top 7 des plateformes en termes de liquidités agrégées :
- Lido - Liquid Staking ;
- Aave - Lending ;
- EigenLayer - Restaking ;
- Ether.fi - Staking non-custodial et décentralisé pour Ethereum ;
- JustLend - Lending ;
- Maker - Génération du stablecoin DAI contre intérêts ;
- Uniswap - Plateforme d’échange décentralisée (DEX).
Tous ces termes vous semblent barbares ? Pas de panique, l’intérêt de cette rubrique est précisément de vous rendre incollable sur ces sujets !
Ce qu’il faut retenir pour l’instant, c’est que les protocoles les plus populaires concernent le staking et le lending. Ce sont en effet des outils permettant de générer des revenus passifs aux rendements attrayants.

9. Quelles sont les interactions entre finance décentralisée et systèmes financiers classiques ?
Dans l’industrie crypto, de nombreuses entreprises ont intégré la finance décentralisée à leur offre de produits et de services. La plupart des bourses d’échange d’actifs numériques centralisées, comme Binance, proposent des produits DeFi. Il s’agit généralement de simplifier l’accès à des protocoles, souvent complexes d’utilisation pour les débutants.
En 2025, c’est beaucoup moins le cas des institutions financières et des banques traditionnelles. Nombreux sont ceux qui sont méfiants à l’égard de tout ce qui touche aux crypto-actifs. Cependant, il y a du progrès. Des acteurs de renom ont intégré des produits crypto à leur offre, comme BlackRock ou Fidelity. Les stablecoins intéressent de nombreuses institutions financières, et même certaines banques centrales.
Il n’y a donc pour leur que peu d’interactions entre systèmes financiers classiques et applications DeFi. Cependant, il y a fort à parier que des liens se nouent à l’avenir. La DeFi est devenue un secteur financier incontournable. Tout comme pour les cryptomonnaies, de plus en plus de banques attaquent ce marché.
10. Quelles sont les tendances à surveiller, et que peut-on espérer à l’avenir pour la finance décentralisée ?
La finance décentralisée est un secteur innovant qui évolue particulièrement vite. Les tendances actuelles concernent des challenges tels que la scalabilité des infrastructures, l’arrivée de nouveaux produits financiers, l’interopérabilité entre les différentes blockchains et applications, mais aussi le besoin de confidentialité.
Les solutions de layer 2
Ces couches secondaires pour Ethereum ont pour but d'améliorer sa scalabilité. Elles permettent de décongestionner le réseau, et réduire ainsi les frais de transaction pour les utilisateurs. De nombreuses applications DeFi sont désormais disponibles sur les L2. Il existe de nombreux L2 différents; la technique des rollups remporte un franc succès. Les dApps de la DeFi les plus utilisées comme Aave, Uniswap ou Compound sont désormais disponibles sur différentes couches secondaires, comme Arbitrum, Optimism ou Polygon.
Le liquid staking
Il s’agit de la tendance de l’année 2024, depuis le passage d’Ethereum en Proof of Stake. Ce mécanisme sera expliqué dans ce Chapitre. Ce qu’il faut retenir, c’est qu’il permet de créer des jetons dérivés, à partir de jetons verrouillés via le staking. Ces jetons dérivés sont liquides, et peuvent donc être utilisés dans d’autres applications DeFi. Cela rend le staking plus flexible, et permet d’imaginer de nouvelles stratégies de rendement.
L’interopérabilité et les protocoles cross-chain
Les liquidités du secteur de la finance décentralisée sont fragmentées. En effet, il existe une quantité désormais astronomique de protocoles et d’applications. Les protocoles d’interopérabilité multichaînes permettent alors aux utilisateurs de déplacer leurs actifs entre différents réseaux. À l’avenir, on peut imaginer une finance décentralisée où l’interopérabilité est totale. De nombreuses solutions ont vu le jour, comme Cosmos IBC, Synapse ou Stargate.
Les interactions entre DeFi et TradFi
Les deux univers - finance traditionnelle et DeFi - ne sont pas en concurrence. Il existe désormais des points de convergence. Plusieurs acteurs institutionnels s’intéressent à la finance décentralisée. Si le mouvement se poursuit, les deux secteurs pourraient interagir. Cela pourrait élargir le marché, et apporter des liquidités massives dans la DeFi. De même, nous pourrions imaginer des produits financiers hybrides, réunissant le meilleur des deux mondes.
La DeFi privée
Le caractère public des blockchains a un avantage certain : la transparence. Les smart contracts sont visibles par tous, et chacun peut vérifier qu’une application respecte ses promesses. Cependant, il y a un inconvénient : il est très difficile de préserver sa vie privée. De nombreux utilisateurs n’ont pas envie ou intérêt à dévoiler leurs activités financières.
Ainsi, plusieurs projets se concentrent sur la confidentialité des transactions. Des techniques cryptographiques avancées, comme les preuves à non-divulgation de connaissance ou le chiffrement homomorphe permettent de rendre les transactions privées.
Ce que l’on peut espérer
L’avenir de la DeFi dépend fortement des régulations futures qui s’appliqueront au secteur. Chaque espace législatif a son approche, et l’innovation dépend fortement de la justesse de ces dernières. Dans un cadre juridique adapté, on peut espérer une adoption massive de la part des institutions financières. De plus, avec l’évolution des interfaces et une meilleure scalabilité, la DeFi pourrait accueillir des utilisateurs qui n’ont pas les moyens de s’intéresser à la finance. On pense notamment aux applications basées sur le microcrédit ou aux assurances décentralisées, qui pourraient devenir accessibles aux non-bancarisés.
La finance décentralisée est en pleine croissance, et nous vous proposons dans les articles suivants d’en apprendre beaucoup plus sur cet univers passionnant ! Passons désormais à l'origine et les fondements de cette finance révolutionnaire.
