Loi de Finance 2022 : le jour où l’Assemblée Nationale a tourné le dos aux cryptomonnaies

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Le 5 octobre dernier, la Commission des Finances a approuvé 3 amendements relatifs à la fiscalité des actifs numériques. Malgré cela, force est de constater que le renforcement de l’attractivité des actifs numériques en France n’est pas réellement au programme. Abordons ici les principaux amendements qui en dépit de l’énergie du député de Paris Pierre Person, ont été rejetés.

La France n’est pas prête à rediriger l’économie des actifs numériques vers l’économie réelle

Le constat est sans appel, de nombreux investisseurs français laissent leurs gains en actifs numériques dormir dans leurs portefeuilles sous forme de stablecoins. Ainsi plusieurs amendements présentés à la Commission des Finances posaient comme objectif la réorientation de ces gains vers l’économie réelle en proposant davantage d’attractivité aux investisseurs. Pourtant, aussi bien la Commission des Finances que l’Assemblée nationale a rejeté ces amendements.

L’application du régime d’apport-cession

D’abord, un des amendements présentés vise à inciter la création d’entreprises spécialisées dans le domaine de la blockchain et/ou des actifs numériques. Il était ainsi proposé d’inclure un dispositif incitatif permettant l’apport de valeur en actif numérique, notamment vers les sociétés « classiques ». L’amendement suggérait de s’inspirer du régime de l’apport-cession prévu par l’article 150-0 B ter du Code général des impôts. En application de ce régime, lorsque des titres d’une société sont apportés à une autre il est possible de bénéficier d’un report d’imposition des plus-values réalisées. Même si cette proposition aurait dû être naturellement adaptée pour prendre en compte les spécificités des actifs numériques, la Commission des Finances et l’Assemblée nationale ont purement et simplement rejeté cet amendement. Le député rapporteur de cet amendement, Pierre Person s’est désolé de ces rejets :

Tweet du député Pierre Person au sujet de l’amendement rejeté par la commission des finances et par l’Assemblée nationale. Cet amendement visait à faciliter le ruissellement de l’économie crypto vers l’économie réelle.

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Création d’un régime fiscal applicable au paiement en actifs numériques

Une autre proposition qui visait l’objectif de redirection des gains crypto vers l’économie réelle était relative au paiement en actifs numériques. En effet, bien qu’il soit déjà possible de procéder à des paiements en actifs numériques le régime fiscal demeure très contraignant. Actuellement, le paiement en actif numérique est un fait générateur d’impôt sur les plus-values. Ainsi, chaque paiement, et ce sans limite de montant, doit être déclaré par le contribuable. Il doit donc s’adonner au calcul de chaque plus-value dès lors qu’il effectue un paiement en actif numérique.

L’amendement proposait d’alléger le régime fiscal pour les paiements effectués en cryptomonnaies par carte bleue lorsqu’ils sont d’un montant inférieur à 3000 €. Après avoir été retiré de l’examen par la Commission des Finances, l’Assemblée nationale a rejeté cet amendement. À nouveau, Pierre Person s’est désolé de ce rejet sur son compte Twitter en ironisant :

« L’administration préfère contraindre à déclarer un CERFA pour chaque achat d’une baguette de pain en crypto. »

Les autres amendements rejetés par la Commission des Finances et l’Assemblée nationale

Les institutions gouvernementales ne font pas de jaloux : qu’il s’agisse de mesures profitables aux particuliers, ou aux sociétés, l’heure n’est pas à la promotion des opérations en actifs numériques.

Report des moins-values en actifs numériques

L’un des amendements proposés au projet de loi de finances pour 2022 visait à permettre aux contribuables de reporter leurs moins-values sur les années suivantes. Ce n’est pas la première fois qu’une telle mesure était suggérée dans le cadre d’un projet de loi de finances. Cet amendement tel que présenté à la Commission des Finances visait à permettre le report des moins-values nettes de cessions d’actifs numériques, sur les plus-values nettes sur les 10 années suivantes. Toutefois, le texte a été révisé avant d’être présenté à l’Assemblée nationale pour réduire le report à 3 ans. Malgré cela, le texte a été rejeté lors de la séance publique qui s’est tenue cette semaine à l’Assemblée nationale.

Les mesures relatives aux sociétés

D’abord, l’un des amendements prévoyait de créer un régime spécial permettant l’attribution gratuite d’actifs numériques au profit des salariés et/ou associés. Cette mesure poursuit également l’objectif de développement des entreprises crypto. En effet, il n’est pas rare dans ces projets qu’une partie de la rémunération ou des dividendes soit versée en actifs numériques. Or, ici encore, règne une différence de traitement fiscal entre les attributions gratuites de droits sociaux et celles d’actifs numériques (AGAN). Les AGAN sont imposées lorsqu’elles sont reçues par le bénéficiaire alors même qu’il n’a reçu aucune contrepartie à cette attribution qui lui permettrait de payer l’impôt. En somme, le régime actuel applicable aux AGAN est inopérant en l’état. Par ailleurs, Pierre Person a pointé du doigt une autre divergence de traitement en prenant l’exemple de Lionel Messi :

Tweet de Pierre Person à propos de l'amendement qui vise à créer un régime d'attribution gratuites au profit des salariés.

Par ailleurs, un autre amendement proposait de défiscaliser les échanges d’actifs numériques entre les sociétés. En effet, actuellement cet échange est un fait générateur d’imposition alors pourtant que l’entreprise bénéficiaire ne réalise aucune recette et qu’elle s’expose à la forte volatilité du marché des actifs numériques. Cette mesure a également été rejetée par la Commission des Finances et par l’Assemblée nationale.

Pierre Person n’est pas décidé à lâcher l’affaire

Pierre Person agacé par la lenteur et la lourdeur de l’administration dans la prise en compte des opérations crypto a mis en garde l’Assemblée nationale. Il a attiré l’attention du gouvernement sur le fait que si la France prend trop son temps pour réglementer ces opérations, elle risque de « louper le train »un peu comme pour Internet – et donc de freiner l’attractivité du pays dans ces domaines. Cependant le député n’est pas découragé pour autant, et il a annoncé qu’un rapport serait rendu le mois prochain à propos de la situation des actifs numériques en France et des pistes d’amélioration et de transformation envisageables.

Dans un prochain article, il sera abordé les amendements auxquels l’Assemblée nationale a donné un avis favorable après l’examen par la Commission des Finances. Ces amendements seront très prochainement débattus au Sénat. À suivre… !

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Margot Marin

Avocate en devenir, j'ai mis un pied dans le monde des crypto grâce à la passion dévorante de mon partenaire de vie. Je me suis finalement pris moi-même de passion pour ce domaine, et plus particulièrement les interactions entre la blockchain et le droit.

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