La police met la main sur 60 millions de $ de bitcoins… mais n’a pas le mot de passe !
C’est privé ! – Un vieil « article » traitant de la saisie de bitcoins par les autorités allemandes, permet de replonger dans l’actualité de la décentralisation, et notamment de l’importance de la clé privée dans un tel environnement. Il donne également l’occasion de nuancer le débat sur un Bitcoin (BTC) facilitant ou non le blanchiment d’argent, la réalité n’étant ni toute blanche, ni toute noire.
L’Allemagne saisit des bitcoins, mais…
Selon un article du 4 février 2021 du media allemand BR, les policiers du pays sont incapables d’accéder à plus de 1 700 BTC « saisis », appartenant à un délinquant qui a purgé une peine de plus deux ans de prison pour avoir déployé un réseau de cryptojacking. Ces bitcoins n’ont pas été volés, mais sont tous issus de ce minage illégal.
Le propriétaire du portefeuille refuse depuis de divulguer aux autorités le mot de de passe protégeant le fameux portefeuille. Ces 1 700 BTC valent plus de 72 millions de dollars au moment de la rédaction de cet article. Les autorités allemandes avaient l’intention de les vendre pour renflouer les caisses du trésor public. Elles avaient tout de même pu récupérer directement 86 BTC – sur les 1 800 BTC initiaux – qui n’auraient pas été protégés par un mot de passe, pour en tirer 500 000 euros.
Les autorités estiment que le propriétaire du portefeuille lui-même ne peut accéder à ses bitcoins. Le procureur de la ville de Kempten émet l’hypothèse selon laquelle le hacker ne connaitrait « peut-être » pas son propre mot de passe.
Décentralisation et clé privée : un avantage démontré en pratique
L’incapacité des autorités à vendre des bitcoins qu’ils ont pourtant théoriquement « saisis », montrent – certes au détriment de la justice allemande – l’un des principaux avantages offerts par un système de paiement décentralisé comme bitcoin. Seules les personnes qui possèdent la clé privée et/ou la passphrase associée d’un portefeuille bitcoin peuvent accéder aux BTC correspondants.
La justice ne peut saisir des bitcoins en émettant simplement une ordonnance de saisie, alors que cette dernière serait immédiatement appliquée par une banque qui aiderait alors au gel des avoirs de la personne concernée. Un système décentralisé comme bitcoin permet à ses utilisateurs d’être protégés par certains abus perpétrés par exemple par les institutions dans des pays où ne régnerait pas l’Etat de droit.
Bitcoin et les cryptomonnaies : du pain béni pour les criminels ?
Les délinquants et les criminels utilisant bitcoin ou un système similaire échapperaient-ils donc systématiquement à la justice ? L’idée générale de bon nombre de politiciens seraient que les avoirs des criminels resteraient alors protégés dans leur portefeuille… tant qu’ils ne les virent pas sur des bourses centralisées qui coopèrent de plus en plus avec la justice. De plus, une autre crainte serait que le crime organisé puisse choisir de se débarrasser ensuite de ces bitcoins contre une transaction en cash à l’ancienne, au sein de réseaux organisés.
Dans la pratique, et si de tels réseaux existent (et sont régulièrement démantelés par les forces de l’ordre du monde entier), une analyse minutieuse des données factuelles démontre que les cryptomonnaies ne sont que très marginalement utilisées pour blanchir l’argent du crime. Selon le plus récent rapport de Chainalysis, société spécialisée dans le suivi des fonds crypto, jamais la proportion des activités illégales n’a été aussi infime par rapport aux transactions légitimes, puisqu’elles ne représentent plus que 0,15% du total des transactions crypto en 2021 !
Ces 1 700 BTC et plus échappent donc pour le moment à la justice allemande, contrairement aux 215 BTC que les autorités ont mis aux enchères en octobre 2021. Le système judiciaire parviendra-t-il à mettre au point en 2022 un moyen de saisir effectivement, ou à défaut d’annihiler la valeur des cryptomonnaies illégales ?