Zetachain : la blockchain qui les connecte toutes – analyse fondamentale
Le 1ᵉʳ février 2024, après plusieurs mois de mise au point, la blockchain Zetachain lançait son mainnet et profitait de l’occasion pour récompenser avec un airdrop une partie des utilisateurs ayant contribué au testnet. Le but du projet ? Proposer une blockchain de layer 1, supportant des contrats intelligents omnichains génériques, c’est-à-dire capables de connecter toutes les blockchains. L’idée est de créer un écosystème unifié, ou les dApps et les utilisateurs peuvent utiliser les jetons de toutes les blockchains, le tout sans avoir besoin de bridge. Penchons-nous ensemble sur les points essentiels du projet, afin de voir plus en détails ce qu’il propose et comment il fonctionne.
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Table des matières
Présentation du projet et cas d’application
Le projet en quelques mots
ZetaChain est à la fois une blockchain de couche 1 et une plateforme de contrats intelligents avec une connectivité intégrée à toutes les blockchains.
Les smart contracts y sont ominchains, ce qui signifie qu’ils peuvent gérer des actifs et des données sur n’importe quelle blockchain, même celles qui n’ont pas de capacités natives de contrats intelligents. Cette interopérabilité agnostique à la chaîne, les rend capables d’interagir avec toutes les blockchains : Ethereum et tous ses rollups, mais aussi tous l’écosystème Cosmos avec l’Inter Blockchain Communication (IBC), ou encore Bitcoin et ses forks (Dogecoin, …), Solana ou Algorand …
En d’autres termes, les dApps développées sur Zetachain peuvent se connecter à toutes les blockchains et interagir avec les dApps qu’elles hébergent, offrant un accès simple, transparent et sécurisé à toutes les cryptomonnaies.
Du point de vue technique, Zetachain est une blockchain fonctionnant en Proof of Stake, construite à partir du Cosmos SDK et du mécanisme de consensus Tendermint PBFT. Ceci lui permet d’avoir un temps de bloc très court (environ 5 secondes) et de pouvoir gérer jusqu’à 4000 transactions par seconde dans des conditions de fonctionnement optimales.
Zetachain comporte une couche d’exécution compatible avec la machine virtuelle d’Ethereum (EVM) appelée zEVM. Ainsi, les développeurs peuvent utiliser du Solidity standard. Ils doivent cependant suivre des exigences spécifiques pour créer des contrats omnichains. Ils peuvent aussi utiliser une alternative à ces derniers, appelée Cross-Chain Message (CCM) Passing. Le CCM transmet des messages de données et de valeurs entre les blockchains, en utilisant Zetachain comme intermédiaire. Ceci permet de faire communiquer des smart contracts déployés sur différentes blockchains, plutôt que d’utiliser un smart contract omnichain.
Lors d’interactions entraînant des événements sur des blockchains externes, ces derniers s’exécutent directement sur les blockchains concernées.
Architecture de Zetachain
À l’instar de nombreuses blockchains, l’architecture de ZetaChain consiste en un réseau distribué de nœuds appelés validateurs.
En plus de gérer la Zetachain, ces derniers observent les blockchains externes et les événements qui s’y déroulent, et doivent parvenir à un consensus sur leurs états. Ils sont aussi responsables de la mise à jour des états des chaînes externes par le biais d’une signature à clés distribuées.
Chaque validateur contient un ZetaCore et un ZetaClient :
- Le ZetaCore est en charge de la production des blocs et de la gestion du World State.
- Le ZetaClient observe les événements sur les chaînes externes et signe les transactions envoyées à ces chaînes.
Les validateurs peuvent jouer trois rôles différents :
- Les validateurs de base : ce sont eux qui valident les blocs de la Zetachain
- Les observateurs : comme leur nom l’indique, ils surveillent les transactions, les événements et les états des chaînes externes. Ils sont divisés en deux sous-groupes : les séquenceurs et les vérificateurs. Les séquenceurs observent les actions externes pertinentes et les rapportent aux vérificateurs. Ceux-ci les vérifient et votent afin d’obtenir un consensus.
- Les signataires TSS : ils utilisent un Threshold Signature Scheme (TSS) (système de signature à seuil), une méthode de vérification de signature numérique multi-parties. Ils signent les transactions à l’aide d’une fraction de la clé nécessaire pour les valider. Un certain nombre de fractions d’une clé est nécessaire pour qu’une signature soit acceptée (par exemple 6 sur 10).
Les cas d’usages
Dans son livre blanc, Zetachain liste plusieurs cas d’usage sans être exhaustif :
- Créer des smart contracts pour gérer des actifs sur des blockchains qui ne supportent pas les contrats intelligents (Bitcoin, Monero…)
- Créer des Automated Market Maker (AMM) cross chain
- Déployer des NFT multichain
- Rendre l’identité on-chain interchain
- Permettre d’utiliser n’importe quelle cryptomonnaie et payer facilement
- …
Histoire, équipe et investisseurs
Les premières traces publiques de Zetachain remontent au 15 décembre 2021, date du premier article du blog présentant le projet. L’équipe derrière le projet est anonyme, mais ses membres auraient travaillé précédemment pour Coinbase et sur le Basic Attention Token (BAT).
On retrouve plusieurs anciens employés de Coinbase impliqués dans Zetachain, notamment Nathalie McGrath (ancienne DRH de Coinbase) et Juan Suarez (ancien conseiller interne) qui on servi de conseillers à l’équipe, et Dan Romero qui fait partie des premiers investisseurs.
Force est de constater que l’équipe savait frapper aux bonnes portes, puisqu’elle a levé assez de fonds (montant non public) pour faire avancer le projet après la publication de son livre blanc le 9 mars 2022. En plus de Dan Romero, on trouve plusieurs figures connues de l’écosystème parmi les investisseurs, dont Sam Rosenblum (Polychain Capital), John Yi, JD Kanani (Polygon) et HwiSang Kim (ancien CIO de Hashed).
En août 2023, ZetaChain a réalisé un deuxième round de financement et a réussi à récolter 27 millions de dollars US auprès de divers Venture Capital dont Blockchain.com, Human Capital, Vy Capital, Sky9 Capital, Jane Street Capital, VistaLabs, CMT Digital, Foundation Capital, Lingfeng Capital, GSR et Krust.
Le testnet a été lancé en août 2022 et a rapidement attiré de nombreux utilisateurs, notamment les chasseurs d’airdrops en raison des récompenses promises. Au total, plus de 3 millions de portefeuilles différents ont participé.
Le mainnet, initialement prévu pour le 19 décembre 2023, a finalement été lancé avec un peu de retard le 1 février 2024.
Tokenomics, roadmap et écosystème
Tokenomics
Comme promis, une grande partie des utilisateurs du testnet (800 000 wallets) ont été récompensés par un airdrop de 31.5 millions de jetons ZETA lors du lancement du mainnet.
Ce jeton natif du réseau et conçu pour être multichaîne à plusieurs utilités :
- Participer à la sécurité du réseau via le staking
- Participer à la gouvernance via des votes
- Payer les frais de gas sur Zetachain et d’autres blockchain
- Représenter la valeur des jetons pouvant être transférés d’une blockchain à l’autre.
Le nombre de jeton ZETA initial est de 2,1 milliards, avec une inflation prévue d’environ 2,5 % par an après quatre ans. La distribution du jeton est répartie et étalée dans le temps de la sorte :
Pourcentage | Rôle | Planning de distribution |
---|---|---|
10 % | Réserve assurant la croissance du nombre d’utilisateurs : elle sert à assurer des airdrops et des récompenses communautaires. | 4.5 % au lancement puis 0.2 % par mois pendant 5 mois après le 1ᵉʳ mois. Ensuite 1/36 par mos pendant 36 mois. |
12 % | Fonds de croissance de l’écosystème : pour distribuer des ZETA aux partenaires et aux développeurs. | 1.5 % au lancement suivi 1/42 par mois pendant 42 mois 6 mois après le lancement |
10 % | Pour les récompenses de bloc distribuées aux validateurs | Permets de récompenser les validateurs pendant 4 ans |
5.5 % | Pour distribuer des rendements en ZETA aux fournisseurs de liquidité. | 3 % au lancement et 1/48 par mois pendant 4 ans |
24 % | Trésorerie du protocole : Pour financer le développement du protocole | 2 % au lancement puis 1/36 par mois un an après le lancement |
22.5 % | Pour récompenser ceux qui contribuent le plus au développement et à la croissance de ZetaChain. | Commence 6 mois après le lancement avec 1/18 par mois pendant 6 mois suivi de 1/36 par mois pendant 2 ans. |
16 % | Pour les investisseurs | Commence 6 mois après le lancement avec 1/18 par mois pendant 6 mois suivi de 1/36 par mois pendant 2 ans. |
La tokenomics comprend donc une part importante de jetons destinés à faire grandir le projet, distribués progressivement.
Roadmap et écosystème
Si le projet est déjà bien avancé, sa roadmap n’en reste pas moins chargée et de nombreuses améliorations devraient être implémentées. Aucun délai de réalisation n’a cependant encore été rendu public pour toutes les fonctionnalités listées sur l’image ci-dessous.
L’une des priorités de l’équipe doit pour le moment être d’attirer du monde et des liquidités, ce qui peut expliquer que Zetachain ait mis en place un système de points (XP) sur le mainnet comme il l’avait fait sur le testnet, suivant la mode du moment pour inciter à l’utilisation du réseau.
L’écosystème est déjà assez développé pour une blockchain qui vient de se lancer, avec plus de 200 dApp et partenaires.
Le mot de la fin
Si Zetachain est un projet prometteur qui ambitionne d’unifier l’écosystème crypto, il est loin d’être le seul à avoir cet objectif.
D’autres, comme LayerZero, Axelar ou Wormhole, s’approchent grandement de ce que permettent les Cross-Chain Message (CCM) de Zetachain, avec des solutions technologiques différentes.
Le projet est cependant un pionnier en ce qui concerne les smart contracts omnichains.
Les performances des premiers jours de son mainnet laissent cependant penser que certaines améliorations sont encore nécessaires pour que les utilisateurs puissent avoir une expérience agréable et sans bug.
Nous verrons dans les semaines qui viennent si le réseau arrive à supporter sa charge. Comme de nombreux projets, Zetachain a réservé une partie de ses tokens pour attirer de nouveaux utilisateurs et étendre son écosystème. Reste à voir si ces derniers seront au rendez vous ou préféreront se tourner vers d’autres solutions.