MakerDAO invente le stablecoin « décentralisé » avec réserves en bons du Trésor US
Les sirènes de la facilité – Les temps sont difficiles pour les stablecoins, scrutés de près depuis le désastre de l’UST de Terra (LUNA). La communauté de MakerDAO (MKR) semble ainsi préférer jouer la sécurité plutôt que la décentralisation. Elle va en effet se couvrir avec les émissions de dettes obligataires des États-Unis.
Pour MakerDAO, les cryptos c’est bien, mais les bons du Trésor US c’est mieux
À ses débuts, l’émission du stablecoin DAI du projet MakerDAO ne se faisait qu’en mettant en contrepartie seulement et uniquement des ethers du réseau Ethereum (ETH). Par la suite, de nombreux autres crypto-actifs se sont ajoutés comme garanties possibles à l’emprunt de ce stablecoin du dollar américain.
Le dernier vote de gouvernance de MakerDao va cette fois faire sortir le projet du secteur des crypto-actifs, lui préférant un classique pilier de la bonne veille finance traditionnelle. Bien centralisée donc. En effet, l’organisation autonome décentralisée (DAO) a approuvé, ce 6 octobre 2022, une transaction pilote d’un million de dollars pour acheter des bons du Trésor américain (T-bills).
À terme, c’est un objectif total de 500 millions de dollars d’investissement dans les dettes obligataires à court terme des USA que souhaiteraient mener les équipes de MakerDAO, ainsi que dans des obligations d’entreprise. Dans une proportion de 80% pour les T-bills, et 20% pour les émissions de dettes d’entreprises.
Se séparer de l’USDC pour au final se précipiter dans les bras de l’Oncle Sam ?
La décision de MakerDAO, qui va créer un moyen de pression supplémentaire des USA sur le protocole du stablecoin, est en totale opposition avec son plan de décentralisation d’août dernier.
En effet, suite au harcèlement judiciaire des régulateurs américains contre le mixeur Tornado Cash (mené par un service du Département du Trésor justement), le projet MKR s’inquiétait de sa dépendance à Circle. En effet, le stablecoin USDC de Circle représentait alors plus de 50% des crypto-actifs de garantie du DAI.
La peur des « répressions réglementaires » aurait-elle déjà abandonné Rune Christensen, co-fondateur de MakerDAO ? Il semblait pourtant alors pencher vers la voie de la décentralisation (objectif originel du DAI), plutôt que ce qu’il appelait la « voie de la conformité ».
Le chant des sirènes de la valeur refuge (risk off) que représentent les obligations US en période de fortes tensions économiques semble avoir fait pencher la balance dans cet autre sens. Le DAI va très prochainement être confronté à deux choix. Rester libre dans la rudesse de la vie sauvage du marché crypto, ou préférer la laisse et le collier rassurants de la finance traditionnelle.