La crypto s’impose pour les transferts d’argent vers l’Amérique du Sud
Frais de réseau. L’Asie du Sud-Est, l’Afrique et l’Amérique du Sud sont des zones géographiques où les envois de fonds depuis l’étranger représentent des sommes colossales et le phénomène semble prendre de plus en plus d’ampleur à la faveur des mouvements de population toujours plus importants. Baptisés remises migratoires ou remitance en anglais, ces transferts d’argent réguliers proviennent des diasporas parties s’installer et travailler dans d’autres pays qui envoient à leurs familles une part de leurs revenus. Mastercard vient de publier un livre blanc à ce sujet en étudiant particulièrement la situation de l’Amérique latine et sans surprise, la cryptomonnaie s’impose irrémédiablement comme une solution évidente pour des millions de personnes à la recherche d’un moyen facile et peu onéreux d’envoyer ou de recevoir ces fonds. Focus aujourd’hui sur une utilisation très pragmatique de la crypto, loin des clichés et plus près de la vraie vie des gens.
Les envois de fonds des diasporas coûtent toujours très chers
Quelques chiffres pour commencer et pour comprendre l’ampleur du phénomène avec tout d’abord cet extrait de Dialogues économiques publiés par le CNRS qui souligne l’importance de ces envois de fonds dans l’économie de certains pays et qui cite, par exemple, le Tadjikistan ou le Kirghizstan où ils représentent plus de 30 % du PIB national ! Le rapport de Mastercard précise lui qu’en 2022, une personne sur dix vit dans un foyer recevant ce type de fonds et qu’ils représentent à l’échelle mondiale environ 831 milliards de dollars, soit davantage que le PIB de la Suisse pour donner un élément de comparaison.
Mais un des problèmes récurrents reste le coût moyen de ces transactions qui est depuis toujours très élevé. Il représente ainsi 5,8 % du montant envoyé en Amérique latine contre une moyenne mondiale de 6,3 %, mais il peut monter jusqu’à 25,5 % dans certaines régions les plus pauvres du monde. Vertigineux. Dans ces conditions, il n’est pas surprenant que chacun cherche une autre solution et la cryptomonnaie qui se démocratise est devenue en quelques années une alternative sérieuse au racket des sociétés existantes qui profitent allègrement d’une situation de monopole particulièrement avantageuse. Il faut noter également qu’une grande partie des transferts, presque la moitié selon la Banque Mondiale, passe par des moyens informels de type Hawala. Lire ou relire, à ce sujet, l’histoire surprenante de Meron Estefanos.
La crypto en passe de changer complètement les règles du jeu selon mastercard
Dans ces conditions, le rapport de Mastercard identifie un certain nombre d’options qui témoignent « de l’émergence d’une réalité complètement nouvelle en matière de transferts de fonds mondiaux ». Ainsi, cette région du monde reçoit 43 % des envois de fonds par voie numérique (contre 52 % pour le reste du monde) et ils devraient atteindre 20 milliards de dollars d’ici à 2026. Parmi les nouveaux canaux de transfert, les auteurs citent MoneyGram et Stellar qui proposent maintenant des transferts utilisant l’USDC et SBI Remit qui le fait via Ripple. Binance est évidemment devenu aussi un acteur incontournable du secteur, comme Mastercard lui-même qui a noué un partenariat avec la plateforme crypto locale Belo.
Cependant, certaines pesanteurs empêchent actuellement ces solutions crypto de prendre encore plus d’ampleur selon le géant des paiements :
« Les efforts actuels de numérisation se limitent aux transferts de fonds eux-mêmes. Afin de numériser pleinement et de réduire les coûts de manière plus générale, les écosystèmes de monnaie numérique dans les pays bénéficiaires doivent être favorisés. Il ne suffit pas qu’un destinataire reçoive l’argent sur un compte, une carte ou un portefeuille s’il ne peut pas effectuer de paiements numériques lorsqu’il dépense cet argent. »
Rapport Mastercard – Source : The future of remittances in Latin America: Digitalization, multiple rails, and the strategic role of partnerships
Il s’agit, en effet, maintenant de trouver de nouvelles solutions plus faciles et plus pratiques pour passer de la crypto aux devises nationales ou, encore mieux, de carrément pouvoir dépenser ces cryptos directement dans son pays au quotidien. Ainsi, le « tissage intelligent de partenariats entre divers acteurs » est indispensable pour tous les prestataires de transferts de fonds afin de créer les conditions d’un réel écosystème durable, conclut le rapport. La cryptomonnaie démontre jour après jour qu’elle est bien au chevet des populations les plus fragiles, et l’Amérique latine comme l’Afrique en sont les exemples les plus évidents.