
L’Europe veut-elle bloquer les stablecoins américains ? 3 questions pour tout comprendre
Depuis la nuit des temps, l’Europe et les États-Unis jouent aux chaises musicales de la régulation. La crypto n’échappe pas à la règle, et le Vieux Continent, avec son appétit pour les règles, pourrait bien s’attaquer à un gros morceau de l’écosystème : les stablecoins multi-émissions. C’est le petit nom barbare que le Conseil européen du risque systémique (CERS) donne aux stablecoins qui sont émis à la fois dans l’Union et dans d’autres juridictions, comme les États-Unis. On fait le point.
- L’Europe envisage d’interdire les stablecoins multi-émissions, perçus comme une menace systémique par le Conseil européen du risque systémique.
- Cette interdiction pourrait affecter des géants comme l’USDC de Circle, forçant une réorganisation majeure pour rester conformes dans l’UE.

Pourquoi l’Europe veut-elle interdire ces stablecoins ?
Selon des sources rapportées par Bloomberg, le CERS, le gardien de la stabilité financière européenne, aurait émis une recommandation qui fait froid dans le dos des acteurs crypto. L’organisme craint que ces stablecoins ne représentent un risque systémique. En clair, si l’un des émetteurs étrangers venait à faire faillite ou à rencontrer des difficultés, cela pourrait avoir des répercussions en cascade sur le système financier européen.
Le CERS n’est pas seul dans son combat. La Banque centrale européenne (BCE), en tant que grande sœur surprotectrice, a déjà exprimé ses réserves à de multiples reprises, comme nous vous l’expliquons dans cet article. Elle voit dans ces stablecoins une menace pour la souveraineté monétaire de l’euro, surtout quand leurs réserves sont majoritairement en dollars, investies dans des actifs américains. C’est aussi une manière de « faire de la place » pour le futur euro numérique, la MNBC (Monnaie Numérique de Banque Centrale) que la BCE a dans ses cartons.

Quels stablecoins sont concernés par cette mesure ?
Si l’interdiction est appliquée, elle viserait directement les mastodontes américains du secteur. On pense évidemment à Circle, l’émetteur de l’USDC, le deuxième plus grand stablecoin du monde. On pourrait aussi citer Paxos, l’émetteur de l’USDP, un autre acteur majeur qui opère à la fois aux États-Unis et en Europe.
Ces entreprises seraient obligées de revoir leur copie. Elles pourraient être contraintes de créer des filiales distinctes pour l’UE ou, plus simplement, de limiter l’accès à leurs stablecoins pour les résidents européens. C’est un dilemme cornélien : se conformer à la régulation européenne au risque de fragmenter leur écosystème mondial, ou se retirer d’un marché pourtant très prometteur.
Qu’est-ce que cela signifie pour le marché crypto européen ?
Pour le marché, les conséquences pourraient être importantes, même si bien sûr, le conditionnel reste de mise. L’USDC est un pilier de l’écosystème, utilisé par des millions d’investisseurs pour se protéger de la volatilité des cryptos. Le voir disparaître du paysage européen créerait un vide et pourrait isoler le marché européen. Bien sûr, il y a des alternatives, comme l‘USDT de Tether, déjà banni de l’UE, mais la concurrence serait réduite et la crédibilité des stablecoins pourrait être mise à mal par cette action réglementaire.
Cette offensive s’inscrit dans la lignée du règlement MiCA (Markets in Crypto-Assets) adopté en 2024, qui encadre déjà très strictement les stablecoins. Mais cette nouvelle recommandation du CERS va plus loin, en créant une nouvelle couche de complexité. Reste à savoir si l’Europe ne risque pas de freiner son propre développement dans le domaine des actifs numériques en tirant un coup de semonce contre les acteurs les plus établis du marché.
