Bruno Le Maire se dit favorable à une « monnaie numérique publique »
Bruno Le Maire, Ministre de l’Economie vient de se déclarer formellement pour la mise en place d’une monnaie numérique émise et administrée par les banques centrales en Europe.
Cette initiative se veut une réponse à la Libra du réseau social Facebook. Le Ministre rejoint ainsi les rangs des responsables politiques de plus en plus nombreux à travers le monde à se positionner sur ce sujet stratégique.
Un Ministre sur la ligne de front
C’est à l’occasion d’une interview fleuve pour le média La Croix que le Ministre de l’Economie Bruno Le Maire a fait état sans la moindre ambiguïté de ce qui peut maintenant être considéré comme une position officielle : La France doit être force de proposition, afin de faciliter l’émergence de monnaies numériques, placées sous l’égide des banques centrales.
De façon assez cocasse, voici soudain qu’une devise numérique se voit tout d’un coup parées de toutes les vertus, dès lors qu’elle serait administrée par des banques centrales – et non plus vulgairement acéphale : simplicité d’utilisation, réduction des délais des paiements trans-frontaliers, le tout pour des frais minimaux sont autant d’éléments présentés comme quasiment révolutionnaires – mais vous connaissez la musique.
Les amateurs de longue date de cryptomonnaies pourront donc au choix se réjouir de cette soudaine clairvoyance, ou lever les yeux au ciel, selon l’inspiration du moment.
Unanimité sans frontières
La position défendue n’est pas une surprise : déjà, au lendemain de la présentation du Livre Blanc de Libra, M. Le Maire avait appelé à une réaction rapide des Etats. Il avait annoncé la constitution d’une Task Force sur le sujet, dans la perspective du sommet du G7 Finance devant prendre place quelques semaines plus tard.
Ainsi qu’annoncé, ce sommet avait en effet consacré une large part de ses travaux à l’évaluation de cette première incarnation des « monnaies des GAFAM ». Ce sommet avait vu poindre une méfiance affirmée de la part des Etats-nations présents.
Hier, M. Le Maire a d’ailleurs réaffirmé cette conviction, en disant que « la France refuse qu’une entreprise privée se dote des moyens de la souveraineté d’un Etat ». Il préconise également que le sujet des monnaies digitales sous contrôle des banques centrales soit inscrit au programme des prochaines réunions du FMI et de la Banque Mondiale en octobre prochain.
C’est que le sujet est dans toutes les têtes désormais. Nous rapportions hier encore les propos de Christine Lagarde, actuelle directrice du FMI devant bientôt prendre les rênes de la BCE : elle aussi se disait très « intriguée ». Rappelons que du côté de la banque centrale britannique, son gouverneur Mark Carney s’est fait le porte-voix d’une telle initative, espérant qu’une telle monnaie puisse ringardiser le dollar.
Enfin, du côté de la Chine, l’hypothèse d’une monnaie numérique de banque centrale est prise très au sérieux, même si la banque centrale chinoise a déjà plusieurs fois apporté des démentis aux diverses informations parues dans la presse.
On le voit, les différentes forces en présence se mettent en ordre de bataille. La question de l’émergence de formes de monnaies numériques (assaisonnées ou non d’un peu de sauce blockchain) paraît désormais dépassée : seules semblent encore se poser celles du « Quand ? » et du « Comment ? ».