Crypto : La Russie compte sur les cryptomonnaies pour contourner les sanctions internationales
De la parole aux actes. Le 8 août dernier, le Président Vladimir Poutine a promulgué une série de dispositions votées par le Parlement russe qui légalise l’extraction de cryptomonnaie dans le pays et qui permet l’utilisation de cryptomonnaie pour les paiements internationaux. Sans jamais le déclarer officiellement, ces nouvelles lois sont bien là pour contourner les sanctions prises par les États-Unis, l’Europe et leurs alliés en représailles à l’invasion de l’Ukraine. La Russie compte bien profiter des avantages de ces nouvelles technologies pour étendre ses activités économiques avec les pays qui continuent à commercer avec elle, au premier rang desquels figurent le Brésil, l’Inde, la Chine et les autres membres des BRICS+. Un rapport de Chainalysis met notamment en lumière le travail de la Banque Centrale Russe qui œuvre pour accélérer l’utilisation des cryptomonnaies pour les paiements transfrontaliers.
La Banque centrale russe est en première ligne pour mettre au point les systèmes nécessaires
A la lumière des éléments technique et des données dont elles disposent, les équipes de Chainalysis affirment que la Russie fait actuellement tout son possible pour contourner les sanctions occidentales grâce à l’utilisation de la cryptomonnaie :
« Les récents efforts législatifs favorables à la crypto font partie des efforts plus larges de la Russie pour développer des mécanismes de paiement alternatifs afin d’atténuer la pression des sanctions occidentales tout en réduisant la dépendance au dollar US, ce qui a toujours été un objectif à long terme pour la Russie, mais qui prend une dimension particulière au milieu des tensions géopolitiques croissantes actuelles. »
Valerie Kennedy, directrice des enquêtes de Chainalysis – Source : Chainalysis
Dans cette mutation d’une partie de l’économie, c’est la Banque Centrale du pays qui est notamment aux manettes et qui devrait superviser les futures transactions internationales, comme le confirme Valerie Kennedy, directrice des enquêtes chez Chainalysis :
« La Banque Centrale de Russie est le fer de lance d’une initiative visant à intégrer la cryptomonnaie dans le système financier de la Russie pour les paiements transfrontaliers, créant une infrastructure expérimentale qui permettra aux entreprises et aux entités russes approuvées d’utiliser les monnaies numériques pour le commerce international. »
Valerie Kennedy, directrice des enquêtes de Chainalysis – Source : Chainalysis
Les cryptomonnaies sont toujours très populaires dans le pays malgré les différentes interdictions
Ce changement de législation pour les russes ne devrait pas tellement impacter la vie quotidienne de la population qui avait de toute façon continué à les utiliser malgré les différentes interdictions décidées par les autorités. Comme diraient les experts de chez Chainalysis, « les interdictions générales de cryptomonnaie sont souvent inefficaces, car elles n’en limitent pas vraiment l’utilisation, mais poussent les utilisateurs plutôt vers des canaux informels ou moins réglementés ». Concrètement, les grands exchanges du pays vont être mis à contribution pour gérer les nouveaux flux et il était aussi question que de nouvelles entités soient créées dont une à Saint-Pétersbourg mais les détails sont encore plutôt flous.
La Russie compte aussi sur d’autres projets comme son rouble numérique pour s’extirper des pesanteurs actuelles et lors d’une réunion des pays des BRICS+, l’idée d’un stablecoin soutenu avec de l’or physique avait aussi été abordé. Enfin, le Système de Messagerie Financière de la Banque Centrale de Russie qui se veut une alternative à SWIFT est aussi en cours de développement bien que son utilisation soit actuellement limitée.
La grande question qui reste posée sera la réaction du camp occidental devant la croissance de ces solutions alternatives liées à la cryptomonnaie. Certes il est plus compliqué de bloquer des paiements sur la blockchain que des transactions bancaires mais le tout puissant OFAC américain (Office of Foreign Assets Control) qui dépend du Département du Trésor a montré dans le passé sa capacité à geler et à bloquer les portefeuilles crypto des ennemis de l’Oncle Sam aux quatre coins du monde. Laissera-t-il faire la Russie ? Comment régiront les grands exchanges de la planète ? Quel sera le rôle de la Chine et des grands pays des BRICS+ dans ces nouveaux systèmes ? Réponse dans les mois qui viennent.