Crypto et banques aux USA : La SEC campe sur ses positions et agace encore !
Etre ou ne pas être dans le bilan. Traditionnellement, dans le secteur bancaire et financier, les actifs détenus pour le compte de clients n’entrent pas dans le bilan comptable des institutions financières, mais depuis le 31 mars 2022 et la publication du Staff Accounting Bulletin n° 121 – ou SAB121 – les cryptoactifs doivent apparaître comme un passif. Or, ce changement n’arrange pas certaines institutions financières qui se retrouvent hors-jeu et dans l’impossibilité comptable de détenir de grandes quantités de crypto pour le compte de leurs clients qui peuvent être des exchanges centralisés ou même des banques.
Devant la levée de bouclier du secteur et après un travail de lobbying intense, le Sénat et la Chambre des Représentants avaient voté en mai 2024 pour l’abrogation de cette règle comptable, mais c’était sans compter sur le veto du Président Joe Biden. Quelques mois plus tard, les positions du comptable en chef de la SEC n’ont pas bougé d’un iota et cela agace fortement une partie de l’écosystème, mais pas que. On fait le point sur ce dossier.
Le comptable en chef de la SEC, Paul Munter, réaffirme les positions de la Commission au sujet du SAB121
Dans un document destiné à la presse et au secteur financier publié le 9 septembre dernier, le comptable en chef de la Securities and Exchange Commission Paul Munter a maintenu les positions de la Commission à propos du Staff Accounting Bulletin n° 121 :
« Les vues du personnel [SEC]’s dans SAB 121 restent inchangées. (…) En l’absence de faits et de circonstances atténuantes particulières, le personnel estime qu’une entité devrait enregistrer un passif sur son bilan pour refléter son obligation de protéger les cryptoactifs détenus pour d’autres. Je crois que ces rapports financiers fournissent des informations pertinentes et opportunes dont les investisseurs ont besoin pour évaluer les risques et les incertitudes particulières liées à la garde des cryptoactifs pour les autres. »
Remarks before the 2024 AICPA & CIMA Conference on Banks & Savings Institutions: Accounting for Crypto-Asset Safeguarding Obligations—A Facts-Based Analysis – Source : sec.gouv
Nos équipes arrivent à cette conclusion après des simulations et des discussions techniques, règlementaires et juridiques avec des spécialistes de tous ces domaines, explique Paul Munter et même s’il est précisé en fin de document que cette opinion est seulement celle du comptable en chef, il engage de fait le régulateur américain.
Cette position agace l’écosystème, mais aussi certains commissaires en interne
Immédiatement après la parution de ce texte sur le site de la SEC, plusieurs personnalités sont montées au créneau pour critiquer ce point de vue à commencer par Nate Geraci, le PDG d’ETF Store et grand défenseur des cryptos. Dans un message publié sur le réseau social X, il ironise sur l’immobilisme du régulateur et sur la situation actuelle en parlant de Coinbase sans jamais le nommer :
« La SEC semble camper sur ses positions concernant le SAB 121…
Ils ne veulent tout simplement pas fournir aux institutions financières « réglementées » la possibilité de conserver des cryptomonnaies.
Apparemment, ils préfèrent l’entreprise dont ils ont autorisé l’IPO [introduction en bourse] et qu’ils ont ensuite poursuivie pour conserver la grande majorité des actifs des ETF BTC au comptant. »
Nate Geraci, PDG d’ETF Store – Source : compte X
Et le secteur privé n’est pas le seul à se plaindre de cette règle comptable et de l’entêtement de la SEC puisqu’en interne aussi ça grince des dents. La commissaire Hester Peirce, connue pour être crypto-friendly, s’est dite préoccupée par la tournure des événements sur le réseau social X, et semble se désolidariser des positions du comptable en chef.
En l’état actuel des choses, les réflexions de la SEC comme les réactions courroucées de ses détracteurs ne changent strictement rien à l’affaire et la balle est toujours dans le camp de l’exécutif qui a posé un véto à l’abrogation de la règle comptable SAB121. Il faudrait maintenant une nouvelle mouture de cette règle ou un changement de politique de l’exécutif pour faire avancer ce dossier qui attendra sûrement, comme beaucoup d’autres, l’issue de l’élection présidentielle en novembre prochain pour avancer.