
Fin du cash et peur de la guerre en Suède : Ethereum est la solution pour Vitalik Buterin
Ethereum à la rescousse ? La Suède fait partie des pays les plus avancés dans l’abandon de l’argent liquide comme les billets et les pièces de monnaie et la population affectionne particulièrement les paiements numériques. Mais face aux tensions géopolitiques, notamment avec la Russie, le gouvernement suédois se rend compte qu’il faudrait une solution de secours en cas de coupure d’électricité ou d’Internet. Prenant part au débat, Vitalik Buterin a estimé qu’Ethereum pourrait être une partie de la solution et plusieurs intervenants lui ont répondu. Voici un résumé de leurs échanges politiques, techniques et philosophiques.
- La Suède, championne des paiements numériques, a été confrontée à des inquiétudes face à des cyberattaques potentielles, notamment de la part de la Russie, remettant en question sa transition vers une société sans numéraire.
- Vitalik Buterin a proposé Ethereum comme une potentielle solution de secours pour des transactions hors ligne, mais des défis techniques, notamment le problème de la double dépense, demeurent non résolus.

La Suède s’inquiète d’une cyberattaque sur les réseaux de paiements
Il faut tout d’abord savoir que le marché des paiements en Suède est presque entièrement numérique. Les cartes de débit et de crédit sont les formes de paiement les plus courantes avec les applications de paiement mobile comme Swish, également très populaire dans le pays.
Mais selon un article récent du Guardian, la Suède s’inquiète des attaques hybrides de la Russie, y compris d’une éventuelle cyberguerre. Ces actions pourraient mettre hors service des infrastructures critiques comme les réseaux électriques, dont dépendent les réseaux de paiement numérique.
Le gouvernement suédois a même conseillé à ses citoyens de mettre de côté de l’argent liquide, au cas où, et pour Miranda Bryant, journaliste, c’est une évidence :
« Les pays nordiques reviennent sur l’initiative de la société sans numéraire, car leur mise en œuvre centralisée est trop fragile. Le cash s’avère nécessaire en tant que solution de secours. »
Extrait de l’article « Back to cash : life without money in your pocket is not the utopia Sweden hoped » par Miranda Bryant – Source : The Guardian

Vitalik Buterin propose Ethereum pour ce paiement hors ligne
Une réponse à cette vulnérabilité serait de développer une version hors ligne de l’argent électronique, afin que la vie économique puisse continuer même si Internet tombait en panne ou si le réseau électrique du pays est endommagé.
De plus, cette capacité rendrait la société suédoise plus inclusive, car tout le monde ne possède pas aujourd’hui une carte bancaire ou un smartphone, mais nous y reviendrons. Intéressé par le sujet, le cofondateur d’Ethereum, a pris part au débat et a posté le message suivant :
« Les pays nordiques renoncent à leur projet de société sans espèces, parce que leur mise en œuvre centralisée est trop fragile. L’argent liquide s’avère nécessaire comme solution de secours. Ethereum doit être suffisamment résilient et privé pour pouvoir jouer de manière crédible ce genre de rôle. »
Vitalik Buterin, cofondateur du réseau Ethereum – Source : Compte X
Mais la question de la faisabilité technique est aussitôt apparue et plusieurs intervenants ont donné leur avis, comme Yash Kalash, directeur de recherche en économie numérique au Centre pour l’innovation dans la gouvernance internationale. Pour lui, c’est une nécessité d‘anticiper ce genre d’évènement :
« Cette possibilité [de cyberguerre] fait de la capacité de transaction hors ligne une nécessité absolue et pas seulement une question de commodité (…) Et à l’heure actuelle, les autorités ne peuvent pas passer à un système de paiement entièrement numérique, car la technologie de paiement hors ligne n’est tout simplement pas disponible. »
Yash Kalash, directeur de recherche en économie numérique au Centre pour l’innovation dans la gouvernance internationale – Source : Cointelegraph
Pour ce spécialiste, des modèles de paiement numérique hors ligne « évolutifs et respectueux de la vie privée » ne seront pas disponibles « avant trois à cinq ans ». D’ici là, des modèles « hybrides » combinant des portefeuilles préchargés, des puces sécurisées et des communications basées sur la proximité (comme le NFC ou le Bluetooth) domineront le paysage des paiements.

La question de la double dépense surgit à nouveau
Car les différentes solutions actuelles n’arrivent pas à répondre à la problématique ancestrale des paiements numérique : la double dépense. Comme le rappelle Keir Finlow-Bates, PDG et fondateur de Chainfrog, une société de recherche et développement sur la blockchain, ces défis techniques sont les mêmes que ceux rencontrés il y a quelques années par les développeurs de cryptomonnaies :
« En fin de compte, tout se résume au problème de la double dépense ! Comment faire en sorte qu’une construction numérique se comporte comme un objet physique, de sorte qu’une seule personne puisse la posséder à la fois ? C’est le problème central de la conception et de la mise en œuvre de la monnaie numérique hors ligne. »
Keir Finlow-Bates, PDG et fondateur de Chainfrog – Source : Cointelegrah
Yash Kalash et Vitalik Buterin échangeront ensuite sur diverses options pour y arriver comme les solutions ZK (ou preuves de connaissance zéro) mais le fondateur d’Ethereum reconnaitra lui-même que tout ceci est actuellement techniquement infaisable.
Enfin, en guise de conclusion, Moa Petersén, professeur agrégé à l’Université suédoise de Lund, a rappelé les enjeux d’une société sans argent liquide :
« La disparition continue de l’argent liquide affecte de manière disproportionnée les groupes socio-économiquement vulnérables, les poussant encore plus à la marge. »
Moa Petersén, professeur agrégé à l’Université suédoise de Lund – Source : Cointelegraph
Pour lui, la faisabilité technique ne devrait pas signifier forcément la mise en œuvre d’un projet d’une telle ampleur. Il faudrait surtout se demander dans quel type de monde nous avons envie de vivre. Et il a sûrement raison. Ce n’est pas aux techniciens ou aux entrepreneurs de déterminer comment nous faisons société, mais au peuple et éventuellement à ses représentants. Pour conclure temporairement le débat, on notera différents points de vue sur la question avec l’exemple de la Suisse qui va voter pour constitutionnaliser (ou pas) l’argent liquide pendant que Gérald Darmanin appelle à la fin du cash pour lutter contre les trafics de drogues. C’est deux salles, deux ambiances de part et d’autre des Alpes.
