Bitcoin et BIP-177 : La révolution qui pourrait changer la façon de compter ses BTC
Sur Bitcoin, le consensus est roi. Ainsi, chaque modification, même minime, doit d’abord passer par d’importantes discussions et atteindre un consensus communautaire. Depuis deux semaines, une proposition enflamme les débats : la proposition BIP-177. Derrière celle-ci se cache un projet de réforme importante de la manière dont nous comptons et affichons les bitcoins. Elle pourrait ainsi marquer la fin des longs chiffres à décimales pour laisser la place à une unité de base plus simple.
Les satoshis, ces grains de sable qui compliquent tout
Pour comprendre la proposition BIP-177, il faut d’abord revenir sur un problème vieux comme Bitcoin lui-même. Depuis sa création, un bitcoin est divisible en cent millions d’unités appelées satoshis. En référence au nom du créateur pseudonyme du protocole.
Dans la pratique, cela veut dire que pour la moindre transaction du quotidien, on se retrouve à manipuler des montants minuscules, comme par exemple 0,000045 BTC ou 23 000 sats. Une gymnastique mentale, anodine pour les utilisateurs avertis, mais devient vite un casse-tête pour le commun des mortels.
Et la situation n’est pas allée en s’arrangeant avec la hausse du prix du bitcoin. En effet, plus la valeur en dollars du BTC grimpe, plus les montants à payer en bitcoins pour des achats courants deviennent petits, et plus les décimales s’accumulent.
Résultat : des chiffres à rallonge après la virgule et une peur grandissante de se tromper d’un zéro ou d’une virgule. Ce n’est pas pour rien que de nombreux commerçants ou plateformes préfèrent afficher les prix en dollars, en euros, ou en satoshis, dans une tentative de rendre les choses plus lisibles.
Mais cette multiplication des unités et des façons de compter ne fait qu’ajouter à la confusion générale. Entre ceux qui parlent en BTC et ceux qui préfèrent les satoshis (sats), personne ne s’y retrouve vraiment.
C’est là qu’entre en jeu la proposition BIP-177, avec une promesse : simplifier ce casse-tête.
La proposition BIP-177 : un changement radical dans la dénomination
Ainsi, la proposition BIP-177 partagée fin avril par John Carvalho et Mark Erhardt, vise à revoir la manière dont on pense les unités de Bitcoin.
En pratique, celle-ci propose que ce que l’on appelait jusqu’ici un satoshi devienne un bitcoin, et ce que l’on appelait un bitcoin deviendrait cent millions de bitcoins. Cela peut sembler absurde au premier abord, mais l’idée est de coller à la réalité du protocole, qui ne connaît que les entiers.
Dans la pratique, cela voudrait dire que votre portefeuille n’afficherait plus 0,000034 BTC, mais 3 400 bitcoins. Le symbole ₿ serait utilisé pour distinguer cette nouvelle unité, mais le code « BTC » resterait, représentant désormais cent millions de ces unités de base. Les termes « satoshi » et « sat » disparaîtraient progressivement, même si l’on imagine mal la communauté les oublier du jour au lendemain.
Les développeurs à l’origine de cette proposition, John Carvalho et Mark Erhardt insistent sur le fait que ce changement ne touche en rien le protocole ou la quantité totale de bitcoins en circulation. Il s’agit uniquement d’une question d’affichage et de présentation.
Simplifier pour favoriser l’adoption : les promesses de BIP-177
L’argument principal en faveur de BIP-177 est de rendre Bitcoin plus accessible, plus compréhensible et moins intimidant.
Aujourd’hui, la plupart des novices peinent à comprendre pourquoi un paiement de 0,0001 BTC correspond à une somme importante. En effet, étant habitués aux monnaies fiduciaires, les chiffres à virgule sont perçus comme très petits, alors que dans le cas de Bitcoin, ils ne le sont pas forcément.
En affichant les soldes en nombres entiers, le BIP-177 a pour but de simplifier la vie des utilisateurs. Ainsi, plus besoin de compter les zéros après la virgule ou de vérifier si l’on a mis la bonne quantité de sats.
Un paiement de 10 000 bitcoins, dans ce nouveau système, serait aussi simple à comprendre qu’un paiement de 10 000 unités de n’importe quelle autre monnaie.
Enfin, les développeurs soulignent que ce changement serait plus cohérent avec la réalité technique du protocole. Car Bitcoin, au fond, ne connaît que les entiers. Les décimales sont une invention des interfaces, une couche de complexité qui n’a pas de raison d’être d’un point de vue informatique.
Les critiques et les doutes : N’est-il pas trop tard ?
Mais toute révolution a ses sceptiques, et BIP-177 ne fait pas exception. Pour beaucoup, le terme « bitcoin » est sacré. Changer sa définition reviendrait, selon eux, à brouiller encore plus les repères et à créer plus de confusion. Certains redoutent que les utilisateurs ne sachent plus de quoi on parle quand on évoque un « bitcoin », et que les arnaques se multiplient, profitant de la transition.
D’autant plus que cette évolution nécessiterait un effort commun. En effet, il ne faudrait pas que pendant des années, plusieurs systèmes d’affichage coexistent. Cette période de flou pourrait être propice aux erreurs, aux pertes de fonds, voire à des litiges entre utilisateurs et services. Les échanges, les portefeuilles et les médias devraient tous s’aligner, ce qui paraît difficile à organiser à l’échelle mondiale.
Malgré les critiques, l’idée fait son chemin. Des personnalités influentes, comme Jack Dorsey, fondateur de Twitter, soutiennent la proposition.
« Les sats sont tellement déroutants pour les personnes qui commencent à se familiariser avec le bitcoin. Les bits de bitcoin sont meilleurs, et le bitcoin seul est meilleur. »
La mise en place de BIP-177, si elle devait avoir lieu, se ferait probablement en douceur. Les portefeuilles pourraient proposer une option pour afficher les soldes en « bitcoins » ou en « BTC » classique, le temps que les habitudes évoluent.
En parallèle, un autre débat fait rage. En effet, les équipes du client Bitcoin Core ont décidé de retirer la limite de stockage dans l’OP_RETURN, jusqu’ici cloisonné à 80 octets. Une prise de position qui n’est pas au goût de tous et qui a enflammé les débats.
Renaud H.
Ingénieur en software et en systèmes distribués de formation, passionné de cryptos depuis 2013. Touche à tout, entre mining et développement, je cherche toujours à en apprendre plus sur l’univers des cryptomonnaies et à partager le fruit de mes recherches à travers mes articles.
