BlackRock : tout comprendre à son ETF Bitcoin
Solide comme un roc – Le géant financier BlackRock a déposé jeudi 15 juin une demande d’ETF Bitcoin auprès de la Securities and Exchange Commission (SEC) des États-Unis. Cette demande pourrait avoir des conséquences majeures pour l’industrie crypto. Suivez le guide pour tout comprendre à ce dossier en 6 questions.
Table des matières
De quoi parle-t-on ?
Hier après-midi, l’unité iShares du géant BlackRock a déposé des documents auprès de la SEC des États-Unis pour la création d’un ETF Bitcoin. La rumeur avait été partagée quelques heures plus tôt par le média CoinDesk.
Pour rappel, BlackRock est le plus grand gestionnaire d’actifs au monde avec environ 10 trillions de dollars d’actifs sous gestion. On retrouve notamment dans leur portefeuille des sociétés comme Apple, Microsoft, Amazon, NVIDIA et bien d’autres.
Le document déposé auprès de la SEC nous apprend en l’espèce que Coinbase Custody agirait en tant que dépositaire pour le fonds, tandis que la banque BNY Mellon serait le dépositaire des liquidités. L’ETF utiliserait aussi les données de Coinbase pour la détermination du prix.
Ce n’est pas la première fois que Coinbase et BlackRock collaborent. En 2022, l’exchange avait annoncé qu’Aladdin, la plateforme d’investissement institutionnel de BlackRock, serait connectée à Coinbase Prime pour le trading et la garde de crypto.
Qu’est-ce qu’un ETF Bitcoin ?
L’ETF est une abréviation de « Exchange-Traded Funds ». Il s’agit à proprement parler d’un fonds. Un fonds négocié en bourse dont l’évolution de la valeur est corrélée au prix d’un sous-jacent, c’est-à-dire d’un actif ou d’un indice spécifique. Par exemple, l’ETF EURO STOXX 50 reproduit la performance de l’indice boursier européen EURO STOXX 50. Si la valeur de l’indice augmente, celle de l’ETF aussi, et inversement.
De manière générale, les ETF sont utiles pour s’exposer à différents marchés à moindre coût. Dans le cas du Bitcoin, un ETF associé à sa valeur permettrait à n’importe quel acteur d’investir dans le leader des cryptomonnaies sans avoir à le détenir directement. Cela revient en grossissant le trait à acheter des actions qui suivent le prix de l’actif : ici, le Bitcoin.
Quelle est la différence entre un ETF Spot et un ETF Futures ?
Au sein de la classe des ETF, il faut distinguer 2 types : les Spots (dits au comptant) et les Futures (dits à terme). Les ETF Spot se négocient sur la base du prix du Bitcoin directement. Il est le sous-jacent.
À l’inverse, et comme son nom l’indique, les ETF Futures suivent le cours des contrats à terme d’un actif et non l’actif lui-même. L’évolution de la performance n’est donc pas directement corrélée au prix de l’actif visé, ici le Bitcoin.
À l’heure actuelle, la SEC des États-Unis a approuvé plusieurs ETF Bitcoin Futures, mais aucun ETF Bitcoin Spot, malgré de nombreuses tentatives de sociétés comme Grayscale notamment. Dans notre cas, la demande de BlackRock porterait sur un ETF Spot, à quelques détails près…
La demande de BlackRock porte-t-elle vraiment sur un ETF Spot ?
Alors que l’ensemble de la presse a qualifié l’initiative de BlackRock comme étant un ETF Bitcoin Spot, y compris notre Journal, le sujet semble plus complexe qu’au premier abord. En effet, certaines voix se sont élevées pour prévenir que le produit proposé par BlackRock se rapprocherait davantage d’un Trust que d’un ETF.
Contrairement à un ETF, un Trust est une structure juridique où une entreprise détient des actifs pour le bénéfice d’un tiers. Un Trust est bien moins liquide qu’un ETF, ce qui signifie qu’il est plus facile d’acheter et de vendre un ETF qu’un Trust. Aussi, à l’inverse d’un ETF Bitcoin Spot, un Trust Bitcoin ne suit pas obligatoirement le prix du sous-jacent (Bitcoin). Ce sont donc deux choses différentes.
Alors qu’il n’existe aucun ETF Bitcoin Spot, il existe déjà un Trust Bitcoin porté par la société Grayscale : le GBTC. S’il ne s’agissait que d’une simple copie du GBTC, l’intérêt du produit proposé par BlackRock serait évidemment très partiel. Qu’en est-il donc ?
Dans le cas du GBTC de Grayscale, les investisseurs ne peuvent pas racheter leurs parts contre des bitcoins. S’il n’y a pas de rachat, il n’y a pas d’arbitrage possible ce qui rend quasiment impossible le maintient du prix du produit proche de sa valeur réelle.
Le GBTC évolue par exemple aujourd’hui à une valeur 43% inférieure à celle du Bitcoin. À l’inverse, le document présenté par BlackRock auprès de la SEC atteste que des parts peuvent être créées et rachetées de façon continue, permettant un arbitrage similaire à celui d’un ETF.
Autre différence : si la demande de BlackRock est approuvée par la SEC, le produit proposé sera listé au NASDAQ, le deuxième plus important marché d’actions aux US. La cotation est une caractéristique typique des ETF, contrairement au GBTC qui s’échange de gré à gré.
En résumé, le produit proposé par BlackRock n’est pas un ETF Spot à proprement parler : au même titre qu’un Trust, il y a bien détention et gestion par une entreprise des actifs pour le bénéfice d’un tiers. En revanche, il sera perçu et commercialisé comme un ETF Spot.
Cela le rapproche typiquement du SPDR Gold Shares (GLD) qui est associé au statut d’ETF sur l’Or alors qu’il a pourtant la structure d’un Trust. C’est en tout cas l’avis d’Eric Balchunas, spécialiste ETF pour Bloomberg, qui considère que l’offre de BlackRock aura tout d’un ETF Spot.
Quel impact aurait l’approbation d’un ETF Bitcoin Spot ?
S’il est approuvé, un ETF Spot permettra aux investisseurs d’accéder facilement au Bitcoin à travers un produit réglementé listé au NASDAQ. L’exposition au Bitcoin serait directe contrairement aux ETF Futures.
Un ETF Bitcoin Spot serait aussi probablement plus liquide qu’un ETF Futures. Il simplifierait le processus d’investissement et limiterait les désagréments causés par les contrats à terme, permettant à quasiment n’importe qui de l’intégrer dans son portefeuille d’investissement.
Fatalement, cela ouvrirait la voie à un marché bien plus important. Les acteurs institutionnels pourraient détenir des « actions » du sous-jacent Bitcoin sans avoir à s’exposer aux tracas liés à son acquisition et son stockage et sans avoir à recourir à une plateforme d’échange.
Selon une enquête du NASDAQ réalisée en 2022 auprès de 500 conseillers financiers, 72 % d’entre eux seraient plus susceptibles d’investir les actifs de leurs clients dans le Bitcoin si un ETF Spot était mis à disposition aux États-Unis.
En résumé, un ETF Spot scellerait l’approbation de la finance traditionnelle et du régulateur envers Bitcoin, le consacrant comme classe d’actif à part entière. Reste à savoir si cela est souhaitable pour le maintien de la philosophie derrière Bitcoin. Le débat est ouvert…
Quelles sont les chances que la demande de BlackRock aboutisse ?
Comme évoqué précédemment, si de nombreux ETF Futures ont déjà été approuvés par la SEC, les demandes de création d’un ETF Bitcoin Spot ont pour l’heure toujours été rejetées par l’autorité américaine.
L’entreprise Grayscale, à l’origine du GBTC, tente depuis plusieurs années d’obtenir l’approbation de la SEC, en vain. Pour justifier son positionnement, la SEC précise qu’elle considère que les risques de fraude ou de manipulation du marché Spot sont trop importants.
Grayscale a contesté ces décisions en engageant un réel bras de fer juridique face au régulateur. La société estime en effet que le refus de la SEC est profondément discriminatoire et que les risques évoqués sont incohérents…
Si une décision dans cette affaire est attendue d’ici la fin de l’année 2023, Grayscale n’est malheureusement pas la seule société à s’être confrontée au refus de l’autorité américaine : VanEck, 21Shares ou Ark Invest ont notamment connu le même sort. Interrogé le mois dernier sur le fait de savoir si la position du régulateur pourrait éventuellement changer, le CEO du fonds d’investissement VanEck avait sèchement répondu « aucune chance ! ». C’est dire.
De plus, tout cela intervient alors que le secteur crypto est sous le feu des projecteurs de la SEC depuis plusieurs semaines. La SEC a, par exemple, récemment poursuivi Binance et Coinbase, les accusant d’avoir violé la loi sur les valeurs mobilières. Coinbase, qui tient pourtant, comme nous l’avons vu, un rôle clé dans le fonctionnement du produit proposé par BlackRock… De quoi générer de nombreuses questions laissées pour le moment sans réponse.
Malgré tout, BlackRock pourrait bien avoir trouvé la faille. En effet, le fonds aurait inclu un « accord de partage de surveillance » dans sa proposition, ce qui pourrait bien permettre d’éliminer le risque de manipulation de marché si cher à la SEC… Il semble aussi impensable qu’un acteur aussi puissant que BlackRock se soit engagé dans une telle procédure sans avoir étudié scrupuleusement ses chances de réussite.
Comptent-ils sur leur poids pour influencer la décision ou ont-ils des informations que l’on n’a pas ? La SEC peut-elle résister au pouvoir d’influence politique du plus grand gestionnaire d’actifs au monde ? Quoi qu’il en soit, le dépôt d’une telle demande au regard du contexte actuel en dit probablement long sur la confiance que porte BlackRock dans le Bitcoin. À suivre…
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