Gestion de bitcoins par les Banques – Le Comité de Bâle veut contraindre, sans interdire
Prévenir pour éviter de guérir – Durant l’entre-deux-guerres, les puissances occidentales, accompagnées de la Suisse et du Japon, ont mis en place la Bank for International Settlements (BIS), lors du traité de Versailles, afin de gérer le remboursement des dettes allemandes découlant de la Première Guerre mondiale. 30 ans plus tard, les gouverneurs des banques centrales de ces mêmes pays ont instauré le Comité de Bâle, la branche Régulation de la BIS. Son objectif est d’encadrer les pratiques bancaires à travers le monde. Le Comité n’a pris de l’importance qu’après la crise de 2007-2008, qui a mis en lumière les défaillances du système bancaire. Avec ses règlements Bâle I, II et III, le Comité de Bâle définit les politiques de gestion des risques des banques. Il entend maintenant prévenir les risques liés aux actifs numériques.
Les besoins de fonds propres selon Bâle III
Au terme du règlement Bâle III, lorsqu’une banque offre un prêt à une institution financière, elle doit détenir des liquidités en réserve en fonction du profil de risque de l’institution partenaire. Une grande banque aura un risque inférieur à celui d’une institution financière issue d’un pays émergent. Par ailleurs, chaque actif possédant un profil de risque, une obligation d’État aura un meilleur profil de risque qu’une action d’une start-up technologique. C’est la notion de pondération des risques du règlement Bâle III.
Les banques doivent donc conserver 8 % du profil de risque de l’actif en réserve. Par exemple, si les obligations d’État vont avoir un score de risque de 0 %, les banques n’auront donc pas à conserver de contrepartie. Un actif jugé plus risqué aura un score de 10 %. Les banques devront donc conserver 0,8 % de la valeur de cet actif en réserve (10 % * 8 %).
Le Comité de Bâle vient de publier un document de consultation relatif aux risques liés à la détention d’actifs numériques pour les banques. Ce papier propose une double approche concernant les exigences de fonds propres pour les cryptoactifs détenus par les banques.
2 profils de risques pour les crypto-actifs
Pour les cryptoactifs, Bâle propose 2 grands groupes de pondération du risque :
- Le premier comprend certains actifs traditionnels tokenisés et les stablecoins qui relèveraient des règles existantes et qui seront traités de la même manière que les obligations, les prêts, les dépôts, les actions ou les matières premières ;
- Le deuxième groupe comprend les actifs numériques, comme Bitcoin, qui seraient soumis à un nouveau « traitement prudentiel conservateur » avec une pondération des risques de 1 250 % en raison de leurs « risques uniques ».
« Les fonds propres seront suffisants pour absorber une perte totale sur les positions en cryptoactifs sans exposer les déposants et autres créanciers de premier rang des banques à une perte. »
Communiqué de presse de la BIS
Formulée simplement, cette règle impose aux banques d’avoir 100 000 dollars de réserves pour 100 000 dollars de bitcoins achetés. Cette règle est extrêmement contraignante pour les banques. Il existe peu d’actifs qui sont assortis d’un traitement aussi sévère.
Parmi eux, on retrouve les investissements dans des produits financiers complexes pour lesquels les banques ne disposent pas d’informations suffisantes sur les expositions sous-jacentes. Les credit default swaps (CDS) opaques, ayant causé la crise des subprimes en 2008, sont le parfait exemple de ce type de produits. Bitcoin est donc relégué au rang de produits financiers douteux et dangereux.
Fondamentalement, la BIS considère que la possibilité que le prix d’un actif numérique aille à 0 dollar est réelle, ce qui est tout à fait raisonnable. Rappelons que les actifs numériques remplacent la confiance mutuelle entre 2 acteurs économiques par une confiance mathématique. S’il existe une faille dans ces mécanismes, un actif numérique peut donc parfaitement être détruit et s’effondrer. Malgré les risques moindres pour Bitcoin, cela reste plausible pour des centaines d’autres réseaux. Une perte de 100 % est difficilement admissible sur des opérations de grande envergure. C’est pourquoi le Comité souhaite, à tort ou à raison, adopter une approche conservatrice.