« Bitcoin vous fera tout perdre » : le patron de la reine des banques centrales vous veut du bien

Le Phénix Bitcoin – Cela faisait trop longtemps que la Banque des Règlements Internationaux (BRI) n’avait pas dénigrer Bitcoin et les cryptos, il fallait donc remettre une couche de critiques acerbes. Cette fois, c’est le directeur général de la banque des banques centrales qui vient annoncer la (énième) mort du roi des cryptos.

Bitcoin c’est nul, un point c’est tout

On ne compte plus les fois où des dirigeants politiques ou financiers ont prédit (sans aucun succès jusqu’ici) que Bitcoinretournerait au néant.

Dans un rapport sur les monnaies numériques paru ce 27 janvier, Agustín Carstens, le directeur général de la BRI, tente de nous alerter sur le vilain, très vilain, Bitcoin (BTC).

Attention aux âmes sensibles, c’est un véritable déchaînement de dénigrements, de mauvaise foi et de mépris :

« Un contact m’a récemment dit que Bitcoin, c’est comme « Tesla sans les voitures » – les observateurs sont fascinés par ce produit, mais la valeur réelle n’est pas soutenue. Peut-être le réseau Bitcoin devrait-il être considéré davantage comme une communauté de joueurs en ligne, qui échangent de l’argent réel contre des objets qui n’existent que dans le cyber espace. (…) les fluctuations de sa valeur font qu’il est irréaliste de fixer des prix en bitcoins. Cela compromet également son utilité en tant que moyen d’échange et en fait une réserve de valeur médiocre.  La structure du marché des bitcoins est résolument concentrée et opaque (…). »

On vous avait prévenu, comme la dernière critique en date remontait un peu, c’est bouchée double !

La BRI n'apprécie pas vraiment la concurrence de Bitcoin.
Agustín Carstens, directeur général de la BRI, se soucie de votre santé financière (si, si, juré craché) – Source photo : Bitcoin.com

L’attaque des 51%, la vieille rengaine qui n’en finit jamais

Agustín Carstens va bien plus loin, en promettant purement et simplement la ruine pour Bitcoin et ses fans :

« Par-dessus tout, les investisseurs doivent être conscients que Bitcoin pourrait bien s’effondrer totalement. »

La principale raison ? Et bien notre cher banquier s’inquiète toujours de la baisse des récompenses en BTC des mineurs dans le temps. Dans leur monde imaginaire, les dirigeants de la BRI imaginent que cette baisse de rémunération entraînerait une hausse du risque d’attaque des 51% sur Bitcoin – où un mineur malveillant réussirait à prendre le contrôle de plus de la moitié de la puissance de calcul du réseau.

« Bitcoin a besoin d’un protocole très gourmand en énergie, appelé « preuve de travail », pour traiter les transactions en toute sécurité. Actuellement, ce sont les « mineurs » qui assurent la sécurité du système et sont récompensés par des BTC nouvellement émis. Un triste effet secondaire est que le système utilise plus d’électricité que toute la Suisse. À l’avenir, à mesure que Bitcoin s’approchera de son offre maximale de 21 millions de BTC, [la récompense] des mineurs diminuera. En conséquence, les temps d’attente augmenteront et le système sera de plus en plus vulnérable aux « attaques des 51% » qui ont déjà frappé déjà des cryptomonnaies de plus petite taille. »

Festival de mauvaise foi

Comment est-ce possible en étant à la BRI d’avoir un tel niveau d’incompréhension de Bitcoin ?

Déjà sur l’argument du « temps d’attente » : le code source de Bitcoin prévoit un ajustement automatique de la difficulté de minage, justement pour que le délai de validation entre les blocs de transactions colle le plus possible aux 10 minutes. Moins de mineurs ? Alors moins de difficulté, et le délai de validation repassera à 10 minutes, après un temps d’adaptation.

Quant à l’argument « les récompenses diminueront » : seules les récompenses de bloc diminuent régulièrement, environ tous les 4 ans (tous les 210 000 blocs pour être précis). Cela grâce au phénomène de halving, qui a été sciemment voulu par Satoshi Nakamoto pour augmenter la rareté de Bitcoin dans le temps, ce qui en fait une monnaie déflationniste (qui s’apprécie dans le temps).

La récompense des frais de transaction, elle, demeurera pour toujours, ce qui assurera un revenu aux mineurs, même après le dernier halving (en 2140 tout de même, on a le temps de voir).

L’argument de « l’attaque des 51% » n’est lui pas du tout d’actualité. Malgré le dernier halving de Bitcoin en mai 2020, et des récompenses de bloc divisées par deux (de 12,5 à 6,25 BTC par bloc validé), la difficulté de minage et la puissance de calcul sur Bitcoin ne cessent de battre record sur record ! Cela diminue d’autant le risque d’attaque des 51 %.

De plus, comme le dirigeant de la BRI se contredit très bien lui-même, l’énergie électrique sur Bitcoin est supérieure à la consommation d’un pays comme la Suisse. Autrement dit : dans le monde il n’y a que 3 puissances qui seraient potentiellement capables de détourner l’électricité nécessaire à une telle attaque monumentale (sans complètement provoquer un blackout total de leur propre pays) : les États-Unis, la Chine, et éventuellement la Russie. Cela limite grandement le nombre d’attaquants en capacité de le faire… et l’intérêt d’une telle opération resterait très discutable.

Et attendez ! C’est bien d’avoir les centrales nucléaires nécessaires à une telle attaque (scandaleuse), mais il faut aussi avoir les machines spécialisées de minage (les ASIC) qui vont avec ! Et oui, mon bon monsieur Carstens, la puissance de calcul mise actuellement sur l’algorithme SHA256 de Bitcoin nécessiterait de se procurer des centaines de milliers d’ASIC de dernière génération pour effectuer cette attaque.

À part faire s’évanouir de joie Bitmain (principal fabricant d’ASIC), il faudrait surtout un sacré moment avant de se procurer ou construire assez de machines.

Bon, on va s’arrêter là, nous pourrions passer des heures à démonter, point par point, les arguments fallacieux de la BRI. On comprend qu’ils n’aient d’yeux que pour leur propre projet de monnaie numérique, mais de là à avancer des arguments aussi bidons, c’est très mesquin.

Rémy R.

Issu d’une formation universitaire en Sciences, je m’intéresse aux blockchains et à Bitcoin depuis 2013 et en ai même miné à l’époque. La bulle qui s'en est suivie m'en a détourné, mais je m'y suis replongé depuis 2017 et les étudie depuis avec passion.