Un Non-Fungible Token (NFT) est un actif numérique unique avec des caractéristiques qui lui sont propres. Traduit en français par Jeton Non Fongible (JNF), les cas d’utilisation sont majoritairement numériques. Des NFT de Spells of Genesis ou Rare Pepes sur CounterParty jusqu’à l’enchère de Beeple chez Christie’s et l’euphorie qui en a suivi, ces tokens ont beaucoup évolué dans le temps. Aujourd’hui, ils sont utilisés de manière croissante parmi un éventail de secteur très varié : l’art, des objets de jeux vidéo, des pass d’accès, des terrains virtuels ou encore des tickets de cinéma.
Qu’est-ce qu’un Non-Fungible Token – NFT ?
En quelques mots : un NFT est un token unique créé grâce à un smart contract en utilisant une blockchain et qui peut contenir plusieurs metadonnées, comme le nom de la collection à laquelle il appartient, le wallet qui l’a créé, des liens externes, ses caractéristiques, etc.
Il est le contraire d’un actif fongible dont voici la définition que nous propose le vénérable Larousse :
“Se dit de choses qui se consomment par l’usage et qui peuvent être remplacées par des choses de même nature, de même qualité et de même quantité”
Larousse
Par exemple, deux bouteilles d’eau d’un litre provenant de la même source. Même nature, même qualité, même quantité. Dès lors où l’une de ces conditions n’est pas respectée, la chose perd en fongibilité. L’exemple le plus parlant est celui de la disponibilité des pièces euros en provenance du Vatican.
Dans les mondes virtuels ou Metaverse, les NFT servent à identifier les parcelles de terrain en fonction de leur localisation sur une carte mais aussi leur largeur et hauteur. Un autre exemple est celui de l’art qui permet d’attribuer un nombre limité d’éditions d’une œuvre numérique.
Et entre ces deux extrêmes, il y a les Semi-Fungible Token (SFT) qui accroissent les nuances de fongibilité. Pensés pour être produits massivement et parfois consommés, ils gardent quand même une identité qui leur est propre. C’est dans l’univers des jeux vidéo que les SFT sont beaucoup utilisés, notamment pour créer plusieurs éditions d’un même équipement. Ils peuvent être aussi utilisés dans l’art pour les éditions multiples ou encore de manière utilitaire, par exemple avec des tickets de cinéma.
Pas certain d’avoir tout compris ? Voici une vidéo explicative qui vous permettra d’y voir plus clair sur les NFT en 5 minutes ;
Comment fonctionne un NFT ?
La Base technologique : la blockchain
Les NFT sont intégralement construits sur des blockchains, avec Ethereum étant la plus populaire pour la création et l’échange de ces actifs. Ethereum est privilégiée en raison de sa capacité à exécuter des smart contracts robustes et flexibles, qui automatisent les règles de création, de transfert et de gestion des NFTs. La blockchain assure la transparence, en enregistrant chaque transaction de manière immuable, garantissant ainsi la propriété et l’authenticité des actifs numériques.
Pour rappel, une blockchain est un réseau décentralisé de nœuds (ordinateurs) qui vérifie, enregistre et sécurise chaque transaction. Contrairement aux bases de données traditionnelles où les données peuvent être modifiées par une autorité centrale, une blockchain empêche toute altération après qu’une transaction est validée et ajoutée à la chaîne de blocs.
Cette immuabilité est cruciale pour les NFT, car elle assure que chaque œuvre ou actif numérique est authentique et que son historique de propriété est inaltérable.
Les normes des NFT : ERC-721 et ERC-1155
Les NFT Ethereum sont créés selon des standards spécifiques, en particulier ERC-721 et ERC-1155. Le standard ERC-721, le plus couramment utilisé, permet la création de jetons non fongibles, où chaque jeton est unique et indivisible. Par exemple, dans le cas d’un NFT représentant une œuvre d’art numérique, chaque œuvre possède un identifiant unique qui la distingue des autres.
Le standard ERC-1155 permet de créer à la fois des jetons fongibles et non fongibles dans un même contrat intelligent. Ce standard est souvent utilisé dans l’univers des jeux vidéo, où certains objets (comme des armes ou des skins) vont être fongibles, tandis que d’autres (comme des avatars ou des items rares) sont non fongibles. Cette flexibilité permet également de réduire les coûts de transaction en regroupant plusieurs jetons dans un même contrat.
Les métadonnées et le stockage
Les métadonnées d’un NFT sont essentielles pour garantir sa provenance et son identité. Elles contiennent des informations telles que l’auteur, la date de création, et des liens vers des fichiers numériques associés, comme des images ou des vidéos. Le contenu des métadonnées peut être stocké on-chain (directement sur la blockchain) ou off-chain via des systèmes de stockage décentralisés comme IPFS ou Arweave. Le stockage off-chain est souvent utilisé pour les fichiers volumineux, mais cela pose des questions sur la durabilité et l’accessibilité des fichiers si le lien est rompu.
Les smart contracts, entre automatisation et sécurité
Les smart contracts sont des programmes auto-exécutables qui jouent un rôle clé dans la gestion des NFTs. Ils sont programmés pour automatiser toutes les conditions liées aux transactions et à la propriété d’un NFT.
Création et gestion automatisée
Lorsqu’un NFT est créé (ou « minté »), un smart contract enregistre ses détails sur la blockchain. Ce contrat détermine des paramètres clés, tels que l’identité du propriétaire, les conditions de transfert, et éventuellement, les royalties pour les créateurs. Un artiste peut, par exemple, spécifier dans le contrat qu’il percevra un pourcentage de chaque revente.
Ce mécanisme est entièrement automatisé : dès qu’une transaction a lieu, le smart contract s’exécute et transfère les fonds et les droits de manière sécurisée et transparente.
Transparence et sécurité du NFT
Les smart contracts offrent une transparence totale puisque leurs règles sont visibles publiquement sur la blockchain. Une fois déployés, ils ne peuvent pas être modifiés, ce qui élimine le risque de fraude. Grâce à la décentralisation, les transactions de NFT n’ont pas besoin d’intermédiaires, ce qui réduit les frais et accélère les échanges. Les utilisateurs peuvent vérifier à tout moment la légitimité d’un NFT en consultant l’adresse du smart contract associé.
Fonctionnalités avancées des NFT : les royalties et l’interopérabilité
Les smart contracts permettent également de créer des fonctions avancées, telles que les royalties. Chaque fois qu’un NFT est vendu sur un marché secondaire, un pourcentage des bénéfices est automatiquement reversé au créateur d’origine. Cela représente une innovation majeure pour les artistes, leur garantissant un revenu continu même après la première vente.
Quelques collections de NFT célèbres
Nom | Société/Artiste | Date de création | Type | Prix de vente |
Everyday : the first 5000 days | Beeple | 21/02/2021 | Art | 69,346,250 de dollars |
CryptoPunks | Yuga Labs | 06/2019 | Collectibles | Gratuit |
RAREPEPE : Nakamoto Card | Mike | 2016 | Art / Collectibles | 204 de dollars |
Spell of Genesis | EverdreamSoft | 15/09/2016 | Jeu mobile | ? |
Quantum | Jennifer & Kevin McCoy | 05/2014 | Art | 1,4 million de dollars en 2021 |
CryptoKitties | Dapper Labs | 11/2017 | Collectibles | 3 dollars |
Proof of Attendance Protocol (POAP) | POAP Inc. | 02/2019 | Utile | ? |
Quelle est l’utilité des NFT ?
Les expériences autour des NFTs se sont enchaînées année après année. Grâce à la plateforme Counterparty sur Bitcoin en 2014, le jeu Spell of Genesis a pu sortir ses premières cartes en 2015. En 2016, ce furent les memes Rare Pepes qui envahirent la marketplace, créant ainsi un mouvement artistique qui allait marquer toute sa génération et les suivantes.
En 2017, c’est sur Ethereum que CryptoPunks a fait son airdrop, Decentraland a commencé à travailler sur son metavers et Dapper Labs a participé participe à la création du standard des NFTs sur Ethereum avec CryptoKitties.
Au fur et à mesure des années, plusieurs cas d’usage utilisant les NFTs se sont donc dessinés :
- De l’utile
- De l’art
- Des jeux vidéo
- Des objets de collections
Il aura fallu attendre mi-2018 pour qu’un standard (l’ERC-721) sur Ethereum voit le jour et permette une inter-utilisation des tokens sur cette blockchain.
Depuis, d’autres métavers comme The Sandbox ou Voxels se sont développés, plusieurs place de marché artistiques comme SuperRare ou Known Origin sont apparus et des jeux vidéo comme Gods Unchained ou Axie Infinity ont connu plusieurs mises à jour importantes.
En plus de ces différents projets, plusieurs blockchains spécialisées NFT ont vu le jour comme WAX, Ronin ou Flow, sans compter les sidechains qui ont été adoptées pour échapper aux frais d’Ethereum.
Comment créer un NFT ?
Pour créer un NFT, aujourd’hui plusieurs options existent mais techniquement, il faut passer par un smart contract qui contiendra toutes les informations liées au NFT. Grâce à des plateformes comme Opensea, Rarible ou SuperRare, il est devenu très simple de minter (créer) des NFT sur de nombreuses blockchains. Il suffit de télécharger un wallet crypto comme Metamask ou Frame et de suivre les procédures de création de NFT sur les marketplaces.
D’autres projets existent et proposent une inscription avec identifiant et mot de passe ainsi qu’un paiement par carte bleue pour minter ses NFT.
Cependant, si la plateforme qui a servi à créer la collection venait à fermer ses portes, la question de la gestion du smart contract voire de l’accès à ses NFT pourrait poser des problèmes.
Il est aussi possible de déployer son propre smart contract grâce à des services comme Manifold ou Mintable. Cela permet d’avoir plus de liberté sur le code d’une part, et un contrôle sur les clés privées du smart contract d’autre part.
Comment et où acheter ou vendre des NFT ?
Une fois que les NFT sont créés, ils sont visibles publiquement et n’importe quelle plateforme qui lit les smart contracts peut afficher leur présence. Les principales marketplaces sur lesquels les achats et ventes de NFT s’effectuent sont Opensea, Rarible, Looksrare pour Ethereum ou Magic Eden et Solsea pour Solana.
Leur fonctionnement est similaire, il faut créer son wallet et posséder des cryptos avant de pouvoir procéder à l’achat ou à la vente de NFT sur ces plateformes.
Parfois, devoir configurer et acheter des crypto n’est pas si simple. C’est pour cette raison que des marketplaces comme Veve voir des exchanges centralisés comme Binance ou Crypto.com proposent aussi des services d’achat et de vente de NFT. Cependant, même si l’expérience utilisateur est très fluide sur ces plateformes, la fermeture de la plateforme entraînera l’impossibilité d’interaction avec les NFT encore hébergés dessus.
En fonction du besoin du vendeur ou de l’acheteur, plusieurs options existent donc pour répondre aux attentes. Par contre, que ça soit pour l’achat, la création d’une collection, un mint ou la vente un NFT, bien identifier le segment de marché et définir une stratégie est indispensable.
Concernant les questions d’ordre fiscal, pour le moment les NFT en eux-même sont considérés comme des OVNI notamment à cause de leur actif sous-jacent. Définir les terrains virtuels, les vêtements numériques, les oeuvres d’art à éditions multiples ou des images de profil à collectionner représente un énorme chantier qui n’est pas encore abouti. Cela dit, le cadre réglementaire sur les profits liés à l’achat et la vente de crypto existe et peut s’appliquer selon l’activité, n’hésitez pas à demander un avis à des entreprises comme Waltio.
Pourquoi les NFT sont si vertement critiqués?
Les critiques autour des NFT ont commencé à apparaître fin 2020, notamment sur l’empreinte carbone générée par l’utilisation de carte graphique pour sécuriser le réseau Ethereum. Deux ans plus tard avec The Merge, Ethereum a considérablement réduit sa consommation électrique mais ce n’était pas le seul reproche fait aux NFT.
Bien qu’il était possible d’utiliser d’autres blockchains plus éco-friendly, ce fut ensuite l’aspect financier qui n’a pas été vu d’un très bon œil. 2021 a été une année où réussir à faire du profit très rapidement était très présent sur l’ensemble du marché… ce qui a entraîné une prolifération de projet NFT sans réelle valeur mais pas seulement.
La liste des griefs s’est allongée lorsque ces promesses d’argent rapides ont attiré des attaques de piratage, phishing ou des liens frauduleux ayant pour but de voler les contenus des wallets.
Certains vendeurs peu scrupuleux n’ont pas hésité à télécharger des œuvres de plateformes comme DeviantArt pour les minter en NFT, sans même que l’auteur original de l’œuvre soit au courant. Tout cela a fortement terni l’image des NFT et diminué la visibilité (et valeur !) des cas d’application légitimes.
En tout cas, l’écosystème NFT a fait preuve d’écoute vis à vis de ces critiques, s’est adapté et continue de faire des efforts pour créer un espace suffisamment sain et sécurisé pour le plus grand nombre.
Quel avenir pour les NFT ?
Un avenir sans doute radieux, mais divisé entre une partie invisible et l’autre, visible. Les NFT sont des pièces de puzzle complémentaires aux cryptos grâce à leur possibilité d’identifier de manière unique un actif numérique. En combinant les bénéfices de la traçabilité blockchain, la sécurité crypto et les NFT, plusieurs cas d’utilisation dans la vie courante apparaissent : l’attribution de diplômes ou certificats numériques, les transferts de responsabilité dans la supply chain voir lier un bien physique avec un actif numérique.
Il est aussi probable que l’aspect sulfureux des crypto ne plaise pas à tout le monde, forçant les régulateurs à interférer au risque de de créer une contre-culture NFT radicale voire de plus en plus clandestine si les régulations ne sont pas adaptées aux usages réels. Les NFT sont un moyen et pas une finalité, c’est pour cette raison qu’ils continueront d’être utilisés de nombreuses manières à l’avenir !