Real World Assets en approche. Les innovations en lien à la technologie blockchain sont encore loin d’avoir été toutes découvertes. Toutefois, l’idée d’en faire usage dans des domaines jusque-là réputés hermétiques fait son chemin. Et de toute évidence, cette année 2023 restera dans les annales comme le véritable point de bascule de la finance traditionnelle dans ce chaudron d’expérimentation numérique. Car depuis quelques mois, le principe de tokenisation des actifs est sur toutes les lèvres. Et selon Coinbase, elle pourrait même être un élément majeur du nouveau cycle crypto. Mais qu’en est-il réellement ?
Petite histoire de la tokenisation
Le principe de tokenisation ne date pas d’hier. Déjà en 2019, le premier sous-gouverneur de la Banque de France, Denis Beau, abordait le potentiel de la blockchain et autres DLTs (Distributed Ledger Technologies). Une technologie selon lui en capacité de « contribuer à remédier aux limites des infrastructures existantes ». Un homme visiblement clairvoyant !
Et comme le secteur des cryptomonnaies est toujours prompt à tout tester sans filet de sécurité, la tokenisation a rapidement fait partie de son paysage numérique. Une fonctionnalité tout d’abord testée par les maximalistes du Bitcoin à partir de 2020. Cela principalement afin de pouvoir aller jouer sur les terres de la DeFi d’Ethereum sans se délester de leurs précieux BTC. Et afin de réaliser cet exploit, il était nécessaire de les enrober (wrapped) à l’aide de tokens ERC-20 dont le plus populaire reste le Wrapped Bitcoin (wBTC).
Une innovation numérique qui devra donc faire ses preuves avant de commencer d’intéresser des acteurs financiers positionnés hors de la zone crypto. Car c’est seulement au début de l’année 2022 que le Forum économique mondial reconnaitra officiellement le potentiel de tokenisation lié à la blockchain.
Une technologie présentée à cette époque comme capable de permettre l’échange d’actifs numérisés comme les crédits carbone, les devises étrangères, ou encore les logements… Cela dans un « futur » plus proche qu’il n’y paraissait. Ou comment dessiner le contour des Real World Assets (RWA) en train de tout révolutionner.
Tokenisation : la prochaine révolution financière ?
En effet, dès la fin de l’année 2022, le leader mondial de la gestion d’actif BlackRock identifiait la tokenisation des titres financiers – par la voix de son patron Larry Fink – comme la prochaine révolution à venir. Cela sur le modèle des Exchange Traded Fund (ETF) quelques décennies plus tôt. Et autant dire que la confirmation de l’arrivée de ce géant de la finance traditionnelle dans cette course avait le potentiel d’en accélérer l’adoption.
Car tout va ensuite s’accélérer au cours de l’année 2023. Avec une croissance qui sera rapidement estimée à un potentiel de 16 000 milliards de dollars d’ici à 2030, selon les données du Boston Consulting Group. Soit plus de 10 fois la valeur totale du marché des cryptomonnaies. Et de plus en plus d’acteurs institutionnels emballés par la perspective d’un marché à la liquidité augmentée et à la rapidité sans équivalent.
« La tokenisation fait référence au processus de construction de représentations numériques (jetons crypto) pour les actifs non crypto (actifs de référence). Les tokenisations créent des interconnexions entre l’écosystème des actifs numériques et le système financier traditionnel. »
Rapport du Conseil des gouverneurs de la Réserve fédérale (Fed) – août 2023
Une dynamique à laquelle vont se raccrocher des acteurs bancaires comme par exemple la filiale numérique Forge de la Société Générale. Cela afin de tenter de définir le potentiel transformateur de cette technologie de la tokenisation sur les marchés traditionnels et les transactions financières. Mais également des projets comme l’un des pionniers du fonds d’investissement tokenisé – Petale – et sa plateforme Vortex. L’une des premières blockchains décentralisées de type layer 1 dédiée aux actifs réels tokenisés (Real World Assets).
Un hub de la tokenisation à Singapour
Et les initiatives liées à la tokenisation ne se comptent plus au cours de l’année 2023. Avec comme principal exemple, un véritable laboratoire à ciel ouvert développé à Singapour sous la responsabilité réglementaire de la Monetary Authority (MAS) locale. Cela afin de répondre à trois problématiques des marchés financiers traditionnels, que l’on peut résumer à liquidité, opportunité et efficacité.
En France, le sujet de la tokenisation est abordé en parallèle de la mise en place d’une monnaie numérique de banque centrale (MNBC) de gros. C’est en tout cas le sujet présenté par son gouverneur François Villeroy de Galhau en octobre dernier. Cela en plein cœur de ce qu’il identifie comme « une vague de ruptures technologiques induites par la blockchain et la tokenisation ».
« La tokenisation de la finance est une tendance nouvelle qui suscite un intérêt croissant de la part du secteur financier et de ses acteurs. Les technologies des grands livres distribués (DLT) pourraient de fait améliorer le traitement automatisé des activités de marché et post-marché et permettre ainsi au secteur financier et aux utilisateurs finaux de bénéficier d’importantes économies. »
François Villeroy de Galhau
Le principe de tokenisation est en train de bouleverser le paysage financier à l’échelle mondiale. Avec une interconnexion inédite entre l’économie traditionnelle et des fonctionnalités jusque-là réservées au secteur des cryptomonnaies. Une course dans laquelle s’inscrit également le Japon, avec une plateforme destinée au marché de l’immobilier. Un exemple parmi tant d’autres à venir du potentiel de cette numérisation des actifs réels. Une affaire à suivre…
