Notre-Dame des Cryptos

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Drame national pour certains, complot gouvernemental pour d’autres, l’incendie de la cathédrale Notre-Dame de Paris déchaîne les passions depuis plusieurs jours. Et pour cause, l’édifice gothique est le bâtiment le plus visité d’Europe avec ses 13 millions de visiteurs annuels. La France a connu son lot de drames ces dernières années et comme tous ses prédécesseurs, l’incendie de Notre-Dame réussit l’exploit de tout à la fois rassembler et diviser. Il rassemble croyants et amoureux de la culture dans leur deuil autour de l’effondrement de la flèche en travaux. Mais aussi, les âmes charitables de la cryptosphère. En effet, plusieurs des initiatives portées par des acteurs majeurs de l’écosystème ont vu le jour cette semaine. C’est par l’action conjointe de l’association le Cercle du Coin, du journaliste de Capital Grégory Raymond et du crypto-entrepreneur David Prinçay, qu’est née l’initiative Notre-Dame des Cryptos.

La cryptosphère en renfort de Notre-Dame de Paris

Alors que le battage médiatique sur les donations des grands industriels français bat son plein, trois acteurs de la communauté crypto française ont lancé une campagne de dons en cryptomonnaies, afin de participer à la reconstruction de la cathédrale. C’est Gregory Raymond, journaliste pour Capital, qui a été le premier à enjoindre les bitcoiners à faire preuve de générosité. Il entendait montrer que notre communauté, bien que décentralisée et tournée vers le numérique, peut faire preuve d’unité et se montrer charitable envers une cause qui, au premier abord, pourrait paraître déconnectée de la cryptosphère.

Mais cette impulsion s’est immédiatement heurtée au scepticisme coutumier de certains internautes constituant la cryptosphère, lesquels n’ont pas tardé à questionner la légitimité de Grégory Raymond à recevoir ces donations communautaires. Ces inquiétudes s’expliquent probablement du fait de l’historique dense d’arnaques en tous genres qui constitue le folklore crypto, ou encore de certaines cagnottes douteuses qui ont récemment vues le jour, même si elles n’avaient pas de rapport immédiat avec les cryptomonnaies. Par exemple, vous n’êtes certainement pas étrangers à l’affaire de la cagnotte Leetchi qui devait supposément permettre de régler les frais juridiques du boxeur ayant frappé de membres des forces de l’ordre au cours d’une des manifestations de Gilets Jaunes à Paris. Cette cagnotte avait atteint des montants très élevés, avant d’être suspendue et son montant bloqué par la plateforme de financement participatif.

Dans ce contexte peu propice à la générosité, Le Cercle du Coin est venu prêter main forte au journaliste. Rapidement rejoint par David Prinçay, un entrepreneur, nos trois âmes charitables ont mis en place un portefeuille Bitcoin à multi signature pour distribuer le contrôle des fonds récupérés, et couper court aux critiques. Vous trouverez l’adresse de ce wallet sur www.notredamedescrypto.fr. Tous les fonds seront reversés à la Fondation du Patrimoine le 20 mai prochain.

Cette initiative a été rapidement suivie par Binance. En effet, la branche caritative de l’exchange a elle aussi lancé une campagne de don pour financer la reconstruction de Notre-Dame.

Les cryptomonnaies, un nouvel outil pour les campagnes de dons

Le système multi signature permet de conditionner l’accès à un portefeuille crypto à l’utilisation de plusieurs clés, leur gestion pouvant être réparties ou non entre plusieurs personnes différentes. Cette fonctionnalité illustre l’un des principaux intérêts des donations en cryptomonnaies. La multi signature apporte ainsi un gage de fiabilité et de légitimité, en évitant que le contrôle des fonds soit laissé à un seul acteur, le fameux point d’échec central. L’utilisation de trois signatures sur un modèle de multisig dit 2/3, un nombre impair, est dans le cas présent particulièrement pertinent ; étant donné qu’elle évite toute forme de blocage lié à des divergences d’opinions. Dans tous les formats de décision collégiale, un nombre impair est toujours un avantage.

L’autre avantage majeur des donations en cryptoactifs est la suppression des intermédiaires. Prenez la campagne de donation sur Leetchi dont nous parlions précédemment. Les donateurs et le destinataire supposé des donations se sont retrouvés à la merci d’une entreprise qui a unilatéralement décidé d’interrompre la campagne face à l’émoi et aux polémiques suscités par les donations. Evidemment, en l’espèce, la situation est bien différente : cette campagne de dons dédiée à la restauration de Notre-Dame ne devrait pas donner lieu à pareilles polémiques.

Au cœur de tout ce remue-ménage, le gouvernement a lancé un site pour les donations en euros afin de financer la reconstruction, regroupant les 4 prestataires retenus pour coordonner la récolte après une réunion de crise ministérielle. Cédric O, le Secrétaire d’État au numérique a ainsi déclaré en conférence de presse durant le Paris Blockchain Week Summit qu’il était ouvert à la discussion concernant la possibilité de récupérer les fonds potentiellement récoltés en crypto par l’initiative crypto-française. Pour autant, il a fixé certaines conditions pour qu’une telle possibilité se matérialise, récapitulées depuis par Grégory Raymond :

Nous pouvons cependant déplorer l’absence de positionnement franc au plan gouvernemental concernant l’infrastructure et le cadre permettant d’effectuer des donations en monnaies numériques. La France entend devenir un leader dans le domaine des cryptoactifs. En effet, pour l’heure, c’est au prix d’efforts conséquents et de négociations que l’on imagine âpres que les trois acteurs portant l’initiative essaient d’obtenir un moyen de verser le montant de leur collecte en crypto vers les institutions françaises.

Rappelons cependant que, même si le cadre législatif crypto actuel peut paraître flou sur ce point précis des dons et des réductions d’impôts afférentes, William O’Rorke avait publié fin 2017 une présentation complète de l’état de l’art en la matière juste ici. Les mêmes notions que celles évoquées par Cédric O étaient déjà listées par l’avocat : il est nécessaire de pouvoir identifier tous les participants de manière individuelle. Cette identification est nécessaire pour délivrer des reçus fiscaux nominatifs. La notion centrale de la nature du bénéficiaire (devant être reconnu d’intérêt général, à but non lucratif et gérée de façon désintéressée, sans profiter à un cercle restreint de personnes, notamment) entre en jeu, mais également la capacité du donateur à justifier du prix marchand de son cryptoactif lors de son don comparativement à son achat initial auprès des services fiscaux.

L’initiative a pour autant également été saluée, que ce soit par d’autres membres de la cryptosphère que par des crypto-députés, au rang desquels on peut compter Pierre Person.

Alors pour soutenir vous aussi l’initiative, rendez-vous sur son site dédié Notre-Dame des CryptosLet’s Rebuild It, Block by Block !

Thomas G.

Financier et juriste, je suis passionné par les cryptomonnaies depuis leur apparition sur le Deepweb. Fervent supporter du Bitcoin, je suis convaincu que les devises numériques joueront un rôle déterminant dans l'avenir de nos sociétés. Je m'intéresse tout particulièrement aux aspects financiers et législatifs des cryptomonnaies.

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