Ethereum : Vitalik Buterin dévoile comment décentraliser le staking via The Scourge

Ethereum est en perpétuelle évolution, et l’un de ses cofondateurs, Vitalik Buterin, vient de publier la troisième partie de sa série « Possible Futures of Ethereum ». Cette troisième partie traite de The Scourge, l’une des étapes du développement d’Ethereum, selon la roadmap publiée en 2023. Cette nouvelle publication aborde un ensemble de menaces qui pèsent sur l’écosystème d’Ethereum.

Ainsi, Buterin aborde de nombreux sujets, tels que les dangers du staking centralisé, les nouvelles techniques pour optimiser la construction de blocs ou encore les ajustements économiques du staking. 

Optimiser la construction des blocs

Selon Vitalik Buterin, l’un des principaux défis actuels sur Ethereum réside dans la construction des blocs. 

En effet, la validation des transactions est centrale au bon fonctionnement d’Ethereum. Ainsi, ce mécanisme doit être à la fois rapide, équitable et sécurisé. 

Mais le problème se trouve dans la manière dont sont construits ces blocs. Actuellement, les constructeurs de blocs (block builders) sont les acteurs principaux qui décident des transactions à inclure dans les blocs.

Pour rappel, Ethereum utilise actuellement un modèle intitulé PBS pour Proposer-Builder Separation. Il s’agit d’un mécanisme qui sépare la fonction de proposition de blocs, par les validateurs, de celle de construction de blocs, par des entités spécialisées appelées « builders ». 

Ces derniers utilisent des algorithmes pour maximiser les profits en extrayant la MEV (Maximal Extractable Value). Si ce modèle permet aux validateurs de se concentrer sur des tâches plus simples, il crée néanmoins un risque de centralisation autour des builders. 

Bien qu’il divise les rôles entre les proposeurs de blocs et les constructeurs, il centralise le pouvoir entre les mains de quelques constructeurs dominants. Par exemple, en octobre 2022, la concentration de certains builders a engendré une importante censure sur le réseau.

Une situation qui pourrait se reproduire actuellement, comme le souligne Vitalik Buterin. En effet, deux constructeurs dominent aujourd’hui la construction de 88 % des blocs sur Ethereum.

Selon Vitalik Buterin, la concentration de la construction de blocs pourrait mener à des abus de pouvoir, qui iraient à l’encontre des principes de décentralisation du réseau.

Les Solutions de Vitalik Buterin

Vitalik Buterin propose deux approches pour contrer ce phénomène. 

D’une part, il propose le modèle FOCIL + APS (Fork-Choice-enforced Inclusion Lists + Attester-Proposer Separation). Cette solution permettrait de redonner aux proposeurs de blocs une partie du pouvoir de sélection des transactions, via des listes d’inclusion qui doivent obligatoirement être incorporées dans le bloc par les builders. Ce modèle réduit la centralisation en répartissant les responsabilités entre plusieurs acteurs, tout en limitant leur pouvoir.

En effet, les block builders seraient forcés d’inclure certaines transactions, ce qui réduirait les chances de censure.

D’autre part, Vitalik propose une autre méthode appelée BRAID qui distribuerait la construction des blocs entre plusieurs proposeurs. Cela permet à chacun d’entre eux de générer des listes de transactions et d’utiliser un algorithme déterministe pour définir l’ordre des transactions.

Vitalik insiste sur la nécessité de limiter les conflits d’intérêts tout en augmentant la décentralisation, ce qui est crucial pour conserver l’ethos d’Ethereum.

Refondre l’économie du staking

Actuellement, environ 30 % de l’ensemble des ETH en circulation est déposé en staking. Une situation qui ne convient pas à Buterin.

« C’est bien plus qu’il n’en faut pour protéger Ethereum contre des attaques à 51 %. Si le pourcentage d’ETH en staking augmente considérablement, les chercheurs craignent un autre scénario : les risques qui surviendraient si la quasi-totalité des ETH était déposée en staking. »

Explique Buterin

Ainsi, Vitalik Buterin met en garde contre plusieurs dangers : 

• La transformation du staking en une tâche obligatoire pour tous les détenteurs d’ETH pousserait les utilisateurs à privilégier des solutions centralisées, comme les jetons de staking liquides (LST) ; 
• L’affaiblissement de la crédibilité du mécanisme de slashing, les sanctions pour mauvaise conduite ;
• La centralisation dangereuse si un seul jeton liquide venait à dominer, comme c’est actuellement le cas avec Lido.

Les solutions envisagées

Pour résoudre ces problèmes, Buterin propose plusieurs approches.

L’une des solutions consiste à rendre le staking compatible avec un jeton de staking liquide (LST) décentralisé et sécurisé. Pour ce faire, il envisage de plafonner les pénalités de slashing à environ 1/8, ce qui rendrait 7/8 de l’ETH staké insensible aux sanctions et donc éligible à être intégré dans un LST. 

Une autre proposition est de créer un système de staking à deux niveaux : un niveau de staking sans risque pour les utilisateurs lambda, et un niveau plus risqué pour les validateurs plus expérimentés, qui offrirait des rendements plus élevés.

Cependant, Buterin critique cette solution à deux niveaux, car elle serait équivalente à une autre option plus simple : réduire les émissions d’ETH en fonction de la quantité d’ETH déposés en staking. En abaissant les rendements du staking au fur et à mesure que la participation augmente, Ethereum pourrait limiter la centralisation sans recourir à des solutions complexes.

Un autre point important concerne la captation du MEV (Maximal Extractable Value), une source de revenus pour les stakers qui est actuellement opaque et volatile. Pour réguler cette source de revenus et éviter une centralisation accrue via la MEV, Buterin propose de rendre ces revenus transparents pour le protocole, via des mécanismes comme le MEV smoothing ou encore via des enchères pour obtenir le droit de proposer des blocs. Selon Buterin, cela aiderait à mieux équilibrer les incitations économiques pour les stakers, tout en réduisant la volatilité des revenus.

Solutions au niveau des applications

Bien que des modifications soient nécessaires au niveau de l’infrastructure de base d’Ethereum, des solutions au niveau des applications peuvent également minimiser les risques de centralisation du staking. Voici quelques-unes des stratégies proposées par Vitalik Buterin.

Matériel spécialisé pour le staking

Des entreprises comme Dappnode commercialisent des équipements conçus pour simplifier l’exploitation d’un nœud de staking. Ces appareils pourraient offrir d’autres services décentralisés, comme exécuter des nœuds pour des VPN décentralisés.

Staking collaboratif

Le staking en équipe (Squad staking) d’Obol permet à plusieurs participants de staker ensemble. Cela réduit les exigences de surveillance permanente du nœud pour un solo-stakers. Avec l’évolution vers des preuves de validité et des nœuds stateless, cette solution pourrait faciliter le staking pour les plus petits wallets.

Airdrops pour solo-stakers

Certains projets, comme Starknet, ont distribué des airdrops aux solo-stakers pour encourager la décentralisation. D’autres projets pourraient envisager des stratégies similaires pour favoriser un réseau plus aligné sur les valeurs de décentralisation.

Marchés décentralisés de constructeurs de blocs

En combinant des technologies comme les ZK-rollups, les MPC et les TEE, il est possible de construire un marché décentralisé de constructeurs de blocs, qui participe aux enchères tout en garantissant la confidentialité et la résistance à la censure.

Minimisation du MEV au niveau des applications

Certaines applications pourraient réduire la fuite de MEV vers la couche L1. Par exemple, en mettant toutes les opérations en attente et en les exécutant dans le bloc suivant, ou en réalisant davantage de calculs hors-chaîne, comme le fait Cowswap. Cela réduirait les incitations pour les constructeurs à exploiter le MEV.

Dans les deux premiers numéros de cette série d’articles, Buterin a abordé d’autres étapes du développement d’Ethereum. D’une part, il a abordé les modifications nécessaires à la finalisation de l’étape « The Merge ». D’autre part, il est revenu sur les évolutions incluses dans l’étape « The Surge ». De quoi finir l’année 2024 avec une bonne vision sur les développements qui arriveront dans les mois et années à venir sur Ethereum.