EOS vs Ethereum

En ce début d’année 2019, de nombreuses interrogations pèsent encore sur la technologie blockchain. Convaincus par son caractère disruptif, des développeurs indépendants tentent d’apporter leur pierre à l’édifice en bousculant la manière de concevoir des applications web ainsi que le comportement des entreprises. Deux blockchains présentent un intérêt tout particulier et tirent leur épingle du jeu par le biais de différents aspects innovants : EOS et ETHEREUM.

Qui sont ces artisans qui développent les blockchains de demain et que proposent-ils réellement ?

Informations générales

Ethereum (ETH)

Vitalik Buterin
Vitalik Buterin, développeur russo-canadien de 24 ans, à l’origine du projet Ethereum lancé en 2013.

Ethereum est pionnier dans son domaine puisqu’il se comporte comme un ordinateur mondial sur lequel des applications web peuvent être déployées de manière décentralisée.

Cependant, la plus grande révolution d’Ethereum réside dans l’implémentation du smart-contract qui permet d’auto-exécuter des actions en fonction de conditions prédéfinies par 2 ou plusieurs entités.

Pour financer son projet, Buterin lance une ICO (Initial Coin Offering) en 2014 avec son équipe et récolte pas moins de 18 millions de dollars.

Le cours des cryptomonnaies ayant flambé fin 2017, l’Ether (ETH) atteint les 1500 $ l’unité et s’échange actuellement (janvier 2019) autour des 130 $.

EOS (EOS)

Daniel Larimer, entrepreneur et développeur américain à l’origine du projet EOS lancé en 2017.

Créateur de nombreux projets blockchain à succès (BitShares, Steemit), EOS est la corrélation de nombreuses années de recherche et développement sur l’idéal blockchain selon Larimer.

Par le biais de cette nouvelle technologie, il se présente en sérieux concurrent à Ethereum sur le marché des applications décentralisées.

Le financement du projet par une ICO est tout simplement le record absolu en la matière avec 4 milliards de dollars récoltés.

La cryptomonnaie EOS atteint les 22 $ l’unité au mois d’avril 2018 et s’échange actuellement (janvier 2019) autour des 2,5 $.

Aspects techniques

Le trilemme des blockchains émis par Vitalik Buterin suppose qu’un système blockchain ne peut assurer tout au plus deux des trois propriétés suivantes :

  • La décentralisation
  • La sécurité
  • La scalabilité

C’est en partant de cette problématique que les deux informaticiens tentent de concevoir la technologie blockchain qui pourrait résoudre ce trilemme.

Dans un premier temps, Ethereum a été lancé avec le consensus de proof-of-work, celui-ci ayant fait ses preuves sur la blockchain Bitcoin. Le problème de ce consensus est qu’il n’assure plus correctement le principe de scalabilité au sein d’un réseau nécessitant un grand nombre de transactions.

De ce fait, Buterin s’est lancé l’optique d’implémenter le consensus de proof-of-stake au sein du réseau Ethereum, celui-ci permettant une plus grande scalabilité, mais induisant une sécurité plus faible.

Cette phase du projet appelée « SERENITY » est l’étape finale dans le changement total du consensus (PoW to PoS). Cependant, cette transition n’est toujours pas effective (repoussée 3 fois) car elle peut présenter de nombreuses failles de sécurité.

Qu’est-ce que le consensus de proof-of-stake ?

Contrairement à la proof-of-work qui permet de valider un bloc en fonction de ressources informatiques, la proof-of-stake offre la possibilité à n’importe qui possédant de la cryptomonnaie Ethereum de tenter de valider un bloc. C’est le principe de démocratie directe.

Cela signifie qu’un utilisateur du réseau va soumettre la validation d’un bloc en mettant ses fonds sous séquestre et sera récompensé de manière proportionnelle à ses fonds engagés.

Avec ce consensus, un nœud du réseau va donc être sélectionné aléatoirement en fonction de son solde en cryptomonnaie pour être le prochain validateur de bloc.

Bien entendu, plus l’on possède de fonds, plus l’on a de chance d’être sélectionné.

Ce système, plus scalable que la proof-of-work, tend également à être plus décentralisé, mais induit quelques problèmes de sécurité.

Pour EOS, le constat est sans appel. La proof-of-work n’a jamais été envisagée et la proof-of-stake n’est pas en mesure de répondre complètement au trilemme des blockchains pour Daniel Larimer.

Ce dernier a alors imaginé le consensus de DPoS (Delegated proof-of-stake) qui tire parti de certaines propriétés du consensus POS, mais en y ajoutant le vote démocratique qui est censé offrir une plus grande sécurité au réseau.

Qu’est-ce que le consensus de delegated proof-of-stake ?

Ce processus a pour objectif d’impliquer tous les utilisateurs de la communauté. En d’autres mots, les détenteurs de la cryptomonnaie EOS vont élire 21 délégués qui seront les garants du réseau en validant les blocs.

N’importe qui peut devenir délégué en démarrant une campagne de promotion et en essayant de convaincre les utilisateurs du réseau de lui attribuer des votes.

Dans la situation actuelle (17/01/2019 – voir image ci-dessous), il faut obtenir au moins 83,513,422 votes pour faire partie des 21 délégués du réseau EOS.

La puissance de vote d’un utilisateur est inhérente à son solde en EOS, ce qui signifie 1 EOS = 1 VOTE et par conséquent le fait de posséder 1000 EOS octroi 1000 votes à distribuer.
Un utilisateur peut également annuler ou modifier son vote pour un autre producteur et il peut répartir ses votes entre plusieurs producteurs.

Toutefois, ce système peut poser un problème sur la puissance de vote que possède chaque utilisateur. En effet, cela signifie que les plus riches auront plus de poids que les pauvres comme dans un système de ploutocratie :

  • 1 EOS = 1 VOTE : favorise les riches
  • 1 UTILISATEUR = 1 VOTE : égalité des voix

Ce classement étant en temps réel, l’ordre des producteurs change régulièrement en fonction des votes de la communauté.

Le gros avantage de ce système est qu’il permet de donner le pouvoir au peuple d’élire ses représentants comme dans une démocratie représentative.

Pour respecter correctement le trilemme des blockchains, il faut que le consensus adopté respecte une gouvernance juste.

La gouvernance est l’ensemble des règles à respecter au sein du réseau à l’instar des lois dans une démocratie.

Vitalik Buterin et Daniel Larimer sont fondamentalement opposés sur la manière de gérer la gouvernance de leur réseau.

De son côté, Buterin préfère le modèle de décision off-chain qui suppose une prise de décision « humaine » entre la communauté et les éditeurs (développeurs qui travaillent sur Ethereum).

N’importe qui peut faire des propositions sur le changement de certaines règles en soumettant des EIPs (Ethereum Improvement Proposals) qui seront ensuite discutées par la communauté.

Pour Larimer, c’est l’inverse puisqu’il préconise une gestion de la gouvernance on-chain en limitant l’intervention humaine et en accordant une plus grande confiance au code informatique.

Les smart-contracts ont donc une importance fondamentale au sein du réseau EOS pour aiguiller la gouvernance. Toutefois il existe l’ECAF (EOSIO Core Arbitration Forum) pour régler les litiges entre différents partis.

Il est très complexe de juger la légitimité d’un type de gouvernance puisque tout système d’autorité est discutable. L’objectif étant toujours le même : respecter la décentralisation du réseau.

Pour le moment, aucune solution miracle n’a été trouvée et ces blockchains novatrices évoluent de manière à correspondre le plus au fameux trilemme.

Aspect développeur

L’avantage de ces deux technologies est le côté « developer-friendly » qui est un facteur d’adoption massive.

Bien entendu, du fait de son ancienneté, Ethereum possède une plus grande communauté et des ressources plus nombreuses.

EOS Ethereum
Git
Documentation officielle
Mainnet/Testnet
Forums développeurs
API
Smart-contracts
Applications en production
Tutoriels disponibles

Ethereum

EOS

Chiffres clés

Les chiffres annoncés sont souvent au-dessus de la réalité. Les deux technologies se veulent ultra-scalables en annonçant un nombre de transactions par seconde supérieur au million.

Pour vérifier l’exactitude de certaines informations, on peut se référer au mainnet de la technologie (il en existe plusieurs accessibles sur le web). Ce dernier présente l’état du réseau en temps réel.

Le site etherscan est l’un des plus connus pour Ethereum.

On peut voir par exemple que le nombre de transactions par seconde moyen sur le réseau est de 7,8.

Ce chiffre démontre bien la limite de scalabilité du proof-of-work sur le réseau Ethereum et la modification indispensable du consensus pour continuer l’adoption massive de la technologie.

Pour EOS, on peut se référer au site EOSpark qui est très clair et qui propose une multitude de statistiques graphiques (etherscan aussi).

Le nombre moyen de transactions par seconde est bien supérieur à celui d’Ethereum avec environ 60, mais cela reste tout de même bien loin du million annoncé. A noter que le record de 4000 transactions par seconde a été atteint.

Pour avoir un aperçu sur l’utilisation de ces technologies, le site DappRadar recense les applications décentralisées déployées sur chaque blockchain et fournit des statistiques intéressantes.

Prenons par exemple les 3 applications qui ont généré le plus de transactions sur le réseau Ethereum dans les dernières 24h.

L’application la plus productive dice2.win qui est un jeu d’argent a généré 5k transactions sur une période de 24 heures et 46k sur une période de 7 jours.

Du côté d’EOS, c’est l’application de jeu d’argent Dice qui est l’application la plus productive avec 431k transactions générées dans les dernières 24 heures et pas moins de 3,8 millions sur les 7 derniers jours.

Cela représente plus de 80 fois le nombre de transactions générées par l’application Ethereum la plus productive.

Un autre site, State of the Dapps offre une vue d’ensemble sur l’utilisation des deux technologies.

On constate de manière logique un plus grand nombre d’applications et de smart-contracts du côté d’Ethereum, mais on note une activité d’utilisation bien plus élevée chez EOS.

Tous ces chiffres démontrent aisément la corrélation entre le rapport de scalabilité du réseau et d’adoption massive de la technologie.

Outre les comparatifs de statistiques, on remarque une évolution de la diversité des types d’applications développées.

Même si les jeux sont toujours majoritaires, on voit apparaître des média sociaux, des applications de finance et d’assurance ou encore du stockage en ligne.

Conclusion

Tous les aspects présentés dans cet article démontrent le caractère novateur de ces deux technologies même si Ethereum tente péniblement d’adapter son modèle pour ne pas accentuer l’avance technique prise par EOS.

Quoi qu’il en soit, ces deux blockchains sont aujourd’hui les plus populaires et leur avenir est prometteur.

2019, l’année de l’adoption massive ?

Maxime Blaszka

Consultant technique blockchain