Ce guide fait partit de la série sur l’achat de Bitcoin. La France n’est pas un paradis fiscal, c’est le moins que l’on puisse dire, certains allant même jusqu’à qualifier d’enfer fiscal. Les impôts et les taxes en tout genre pullulent, et les formulaires et démarches administratives associées n’en finissent pas. Évidemment, Bitcoin et les cryptomonnaies ne font pas exception ! Vous vous demandez à quelle sauce vous serez mangé cette année ?
Vous êtes au bon endroit ! Nous vous proposons ici un guide simplifié pour tout comprendre à la fiscalité 2024/2025 de Bitcoin. Nous avons décrypté les textes officiels afin de vous expliquer quoi faire, comment le faire et quand le faire. Nous espérons que ce qui suit vous épargnera des erreurs et bien des maux de tête. Bon courage !
Temps de lecture estimé : 15 minutes
Table des matières
Les obligations fiscales liées à Bitcoin en France
Avant d’entrer dans les détails, voici un résumé de ce en quoi consistent les obligations fiscales liées à Bitcoin.
- Vous devez payer des impôts sur vos bénéfices (sauf si le total des cessions annuelles de l’ensemble des membres de votre foyer ne dépasse pas 305 €).
- Vous n’êtes imposable que si vous avez échangé vos bitcoins contre une monnaie fiat (euro, dollar…), des biens ou des services. Les transactions en cryptomonnaies (dont les stablecoins) ne sont pas imposables.
- À partir du moment où vous avez effectué ne serait-ce qu’une seule transaction contre une monnaie fiat, des biens ou des services, vous devez fournir un historique détaillé de tous vos achats et ventes de cryptomonnaies, depuis votre tout premier achat.
- Vous devez déterminer à quelle catégorie d’investisseur vous appartenez (particulier ou professionnel)
- Vous devez choisir le régime d’imposition qui vous convient le mieux (PFU ou ajout aux revenus imposables)
- Vous devez déclarer tous vos comptes cryptos à l’étranger (si vous avez utilisé des plateformes d’échanges centralisées hors de France)
- Vous devez effectuer ces déclarations durant votre déclaration des impôts sur les revenus.
À l’heure actuelle, vous n’avez pas à déclarer des portefeuilles non custodial de type Ledger ou Metamask.
Pratique : quand et comment remplir vos obligations fiscales ?
Calendrier des déclarations : dates clés en 2025
Au moment de l’écriture de ces lignes (novembre 2024), les dates exactes ne sont encore connues pour 2025. Cependant, comme chaque année, vous devriez pouvoir commencer à déclarer vos revenus à partir de début avril.
La date de fin dépendra du département dans lequel vous résidez. Pour les déclarations en ligne, elle se situe habituellement :
- Aux alentours de la mi-mai si vous résidez dans les départements dont les numéros vont de 01 à 19 ou si vous êtes à l’étranger ;
- Fin mai pour les départements dont les numéros vont de 20 à 54 ;
- Début juin si vous habitez dans les départements dont les numéros vont entre 55 et 976.
Pour une déclaration papier, les délais sont plus courts et la date limite devrait se situer aux alentours de la mi-mai 2025, quel que soit votre lieu de résidence.
Notez bien ces dates dans votre calendrier : si vous déclarez en retard, l’administration fiscale vous fera payer des pénalités.
Vous serez ensuite « invité » à payer vos impôts fin septembre 2025.
Déclarer vos plus-values
Déterminer votre régime fiscal
Commencez par déterminer à quelle catégorie d’investisseur vous appartenez. Les régimes d’imposition sont différents pour les particuliers et les professionnels.
Les règles ne sont pas clairement définies pour établir une frontière entre les deux. Cependant, la qualification de professionnel ne concerne qu’une toute petite partie des investisseurs en bitcoins. À vous d’estimer en toute honnêteté si vous apparentez à un professionnel ou non en prenant en compte ces critères :
- le montant de vos trades (est-il important par rapport à vos autres activités ?)
- le nombre de vos transactions et la durée de vos positions (plus elles sont courtes et nombreuses, plus vous avez de chances d’être considéré comme un pro)
- les moyens utilisés (si vous utilisez des robots, des stratégies avancées comme le hedging …, vous plus vous avez de chances d’être considéré comme un pro)
Voici ce qui vous attend suivant le régime retenu :
- Particulier : vous devrez vous reporter à l’article 150 VH bis du Code général des impôts. Vous aurez le choix entre 2 options :
– Payer la flat tax qui consiste en un Prélèvement Forfaitaire Unique (PFU) de 30 % de la valeur de vos plus-values (12.8 % d’impôts et 17,2 % de prélèvements sociaux)
– Inclure vos plus-values dans vos revenus globaux auxquels seront appliqués le barème progressif de l’impôt. Si vous n’êtes pas imposable, vous devrez quand même payer les prélèvements sociaux de 17,2 %.
À vous de calculer quelle formule est la plus avantageuse pour vous.
- Professionnel : vos gains s’apparentent à ceux des traders d’actifs traditionnels. Ils sont soumis au barème progressif de l’impôt des Bénéfices Non Commerciaux (BNC) et aux prélèvements sociaux (avec certains abattements pour les micro-BNC). Nous n’aborderons pas ce cas dans la suite de l’article.
Remplir votre déclaration
La démarche est la même pour une déclaration en ligne ou sur papier. Le site s’améliore au fil des années, mais est encore très loin d’être parfait.
Pour une déclaration en ligne, connectez-vous à votre espace des impôts puis allez sur « Accéder à la déclaration en ligne ».
La plateforme n’étant pas encore ouverte lors de la rédaction de cet article nous vous proposerons ci dessous un extrait de la version papier. La déclaration se fait sur la deuxième page du formulaire CERFA n°2042c dans la case 3AN « Cession d’actifs numériques ».
Vous devez y inscrire le total des plus ou moins-values effectuées sur l’année fiscale (voir le calcul dans le paragraphe qui suit). En cas de moins-value, cette dernière n’est ni déductible d’autres revenus, ni reportable sur l’année suivante.
Calculer vos plus-values : la méthode pas à pas
Théoriquement la formule est simple :
Dans le faits, c’est la partie la plus compliquée.
Le calcul s’effectue sur l’annexe 2086. Pour une déclaration en ligne, elle est accessible en cliquant sur la rubrique « Sélection des rubriques de la déclaration de revenus et annexes » à gauche de votre écran, puis sur « Déclarations ANNEXES ».
Les sommes calculées dans cette annexe viennent se mettre automatiquement dans les cases 3AN ou 3BN de votre déclaration principale.
En 2024, il était possible de déclarer un maximum de 20 cessions en ligne. Au-delà, il fallait obligatoirement passer par la version papier du formulaire 2086. Cette dernière n’était pas adaptée non plus, puisque prévue pour un maximum de 5 cessions ! Il fallait donc la recopier vous-même pour l’agrandir… À voir si les choses auront évolué au moment de l’ouverture des déclarations de 2025.
Pour vous expliquer facilement comment remplir les différentes lignes de ce document, prenons un exemple simple.
Voici le cas de quelqu’un qui aurait réalisé ces 4 achats de bitcoins et 2 ventes en 2024 (valeurs fictives) :
Date de l’opération | Opération | Valeur unitaire du BTC |
---|---|---|
05/02/2024 | Achat de 0.3 BTC | 40 000 euros |
03/05/2024 | Achat de 0.1 BTC | 45 000 euros |
02/06/2024 | Vente de 0.1 BTC | 50 000 euros |
07/07/2024 | Achat de 0.4 BTC | 30 000 euros |
12/08/2024 | Achat de 0.1 BTC | 25 000 euros |
15/09/2024 | Vente de 0.5 BTC | 70 000 euros |
Il a donc 2 cessions (ventes) à déclarer dans le formulaire 2086. Voici ce à quoi il ressemble une fois complété. Vous trouverez plus bas le détail du calcul pour chaque case.
- 212 valeur globale du portefeuille au moment de la cession : il faut multiplier le nombre total de BTC en votre possession par leur prix unitaire au moment de la vente.
- 213 prix de cession : il faut multiplier le nombre de BTC vendus par leur prix de vente.
- 214 frais de cession : frais prélevés lors de l’échange (ici 0,1 % du montant).
- 214, 215, 217, 218, 223 et 224 : il suffit d’appliquer les formules de calcul inscrites sur le CERFA.
- 216 et 222 : la soulte est une somme qui compense une inégalité dans un partage ou un échange. Elle devrait être nulle dans la plupart des cas.
- 220 prix total d’acquisition : il faut multiplier le nombre BTC achetés par le prix unitaire au moment de l’achat.
- 221 fractions de capital initial contenues dans le prix total d’acquisition : ce sont les fractions de capital contenues dans la valeur des cessions d’actifs numériques précédentes. Elles réduisent le prix total d’acquisition. Elles se calculent avec la formule : ligne 223 * 215 / 212 de toutes les cessions précédentes.
Le montant trouvé en ligne 224 (20 925 euros) est à reporter dans la case 3AN du CERFA 2042c. Il ne vous reste plus qu’à déclarer vos comptes à l’étranger.
Déclarer vos comptes détenus à l’étranger
Vous devez déclarer chaque compte ouvert, utilisé ou clos à l’étranger. Inutile de la faire pour les plateformes domiciliées en France (PSAN) qui font automatiquement le lien avec les impôts.
La déclaration de fait sur l’annexe 3916 – 3916-bis que vous trouverez au même endroit que la 2086 (section déclarations ANNEXES).
Cochez l’option « Compte d’actifs numériques » dans la partie 2.
Dans la partie 4, vous devez compléter les informations concernant votre compte et la plateforme sur laquelle il se trouve. Attention, les exchanges ont tendance à changer souvent d’adresse !
Si vous n’avez pas de numéro de compte, inscrivez les identifiants qui vous permettent de vous connecter à la place (adresse e-mail, numéro de téléphone, … ).
En partie 5, indiquez si vous avez utilisé votre compte pour un usage personnel, professionnel ou pour les deux.
Recommencez la démarche pour chacun de vos comptes à l’étranger.
Déclarer vos bitcoins issus du minage
Si vous faites du minage, vos gains en cryptomonnaies ne sont pas soumis au même régime fiscal que ceux des plus-values issues du trading. Ils relèvent de celui des Bénéfices Non Commerciaux (BNC).
La déclaration se fait sur les formulaires n° 2035 et les annexes n° 2035 A et n° 2035 B
La valeur des bitcoins minés est égale à leur valorisation en euros au moment où vous les avez minés.
Si vous réalisez une plus-value par rapport à cette valeur lorsque vous les vendez, vous devrez payer la flat tax de 30 % sur la plus-value.
Les erreurs à ne pas commettre
L’erreur la plus tentante est bien sûr de ne pas déclarer. Vous l’avez constaté plus haut, faire sa déclaration est pénible et fastidieux. Mais ce n’est rien à côté d’un contrôle fiscal ! N’oubliez pas de déclarer, même si vous n’avez pas fait de plus-value et que vous n’avez rien à payer. En cas de non-déclaration, vous risquez :
- 750 à 1 500 € d’amende par compte non déclaré (pouvant être doublé pour des comptes contenant plus de 50 000 €)
- une majoration de vos impôts pouvant aller jusqu’à 80 %.
- une amende maximum de 3 millions d’euros et une peine de prison pouvant aller jusqu’à 7 ans en cas de fraude fiscale.
Dans cet article, nous n’avons abordé que la fiscalité liée à Bitcoin. Les règles sont les mêmes pour les autres cryptomonnaies (stablecoins inclus), mais vous devrez aussi vous renseigner si vous possédez des NFTs, de l’immobilier tokenisé, que vous avez reçu des airdrops, ou que vous utilisez des produits DeFi comme le staking, le lending etc… Les règles évoluent constamment, donc n’oubliez pas de vous mettre à jour chaque année.
Rassurez-vous : vous avez tout de même droit à l’erreur ! Vous devrez cependant vous en rendre compte avant l’administration pour les contacter et faire une déclaration rectificative. Dans ce cas, vous n’aurez pas à payer d’amende ou de majoration.
Optimisations fiscales légales : ce qu’il faut savoir
Plusieurs techniques légales existent pour faciliter votre déclaration et réduire au maximum le montant de vos impôts. Nous ne vous parlerons pas de montages financiers complexes, mais simplement de deux méthodes simples pouvant être appliquées par tout particulier :
- Utilisez des portefeuilles non custodial et des plateformes décentralisées à la place des CEX. Vous n’aurez pas à vous casser la tête pour déclarer vos comptes à l’étranger.
- Évitez tout simplement les cessions imposables. Si vous voulez vendre, mais que vous n’avez pas besoin de monnaie fiat, optez pour des stablecoins. Vous n’aurez plus besoin de déclarer vos plus-values.
- Réalisez des ventes qui génèrent des moins-values (de préférence en toute fin d’année). Vous pouvez ensuite racheter immédiatement les mêmes jetons, l’idée étant simplement de faire baisser vos plus-values avant les formules de calculs imposées.
À l’étranger (pays crypto friendly)
Si l’État français vous paraît trop gourmand, vous pouvez aussi envisager de vous expatrier. Il n’existe pour l’instant pas d’exit taxe pour les cryptomonnaies, et les pays plus crypto friendly ne manquent pas. En voici quelques-uns qui n’appliquent aucun impôt sur les plus-values :
- Portugal (pour les cryptos détenues plus de 365 jours)
- Allemagne (pour les cryptos détenues plus de 365 jours)
- Suisse
- Malte
- Émirat arabe uni (Dubai)
- Salvador
- Singapour
- Île Maurice
- Bahamas
- Chypre
- Luxembourg (pour les cryptos détenues plus de 6 mois)
Attention cependant : chez eux aussi les règles changent souvent. Renseignez-vous bien avant de partir. Enfin, n’oubliez pas que l’expatriation a un cout (billets d’avion, visas, santé, …). Faîtes vos calculs sans rien oublier pour vous assurer d’être réellement gagnant.
Quoi qu’il arrive, ne négligez pas votre déclaration même si vous n’avez pas fait de plus value et n’oubliez pas de payer vos impôts. L’administration dispose de moyens de contrôle de plus en plus sophistiqués et automatisés. Si vos finances vous le permettent, vous pouvez aussi envisager de vous faire aider par des professionnels comme Waltio, un comptable ou un avocat fiscaliste expert dans le domaine.