Faire le Djihad en bitcoins – Une énorme filière djihadiste française se finançait en BTC, elle est démantelée
Des terroristes friands de bitcoins – Mardi 29 septembre, le parquet national antiterroriste a démantelé un vaste réseau de financement terroriste. Plusieurs centaines de milliers d’euros auraient en effet transité depuis la France vers la Syrie. Les accusés auraient utilisé des cartes prépayées, achetables en bureau de tabac, qui délivrent un certain montant en bitcoin.
Un montage bien huilé
Un paquet de cigarettes, un billet de loto et un ticket de bitcoins ? Depuis 2019, des suspects avaient acheté plusieurs coupons en France, qui ont ensuite été transmis par photo à des djihadistes présents en Syrie. Le 24 janvier 2020, une enquête préliminaire avait été ouverte pour « financement du terrorisme », à la suite d’une alerte de Tracfin. Les enquêteurs ont pu identifier deux hommes, basés dans le Nord-ouest syrien, et qui se seraient chargés d’encaisser les coupons. Cette méthode était pourtant déjà connue. Depuis 2013, certains réseaux utilisaient des mandats cash, tels que Western Union, pour alimenter la branche djihadiste en Syrie.
Au total, 29 hommes sont accusés en France de blanchiment de fonds et de financement du terrorisme. Le procédé est pourtant d’une facilité déconcertante. Dans le pays, plusieurs services, tels que Digycode ou Keplerk, permettent d’acheter des coupons prépayés en bureau de tabac, sur lesquels se trouve un montant précis de bitcoin (100€, 250€ …). Ces cartes disposent d’un QR code et il suffit de l’envoyer en photo pour obtenir le montant en bitcoin.
DIGYCODE s’affirme pro-actif
Afin d’avoir un point de vue interne à l’affaire, nous avons pu échanger avec Villegas Christopher, président de DIGITAL SERVICE, qui édite la marque DIGYCODE incriminée dans l’affaire.
« Chaque euro dépensé dans des bitcoins via l’achat de nos cartes DIGYCODE a préalablement fait l’objet d’un contrôle d’identité. C’est le cas dès 1 euro. Ce KYC n’est pas réalisé en bureau de tabac, mais directement sur notre plateforme en ligne. C’est d’ailleurs ce qui a permis à TRACFIN de remonter la chaîne. Il ne faut pas se tromper, le démantèlement de ce réseau est une bonne nouvelle et montre que le système fonctionne. »
L’ACPR, qui dépend de la Banque de France, réclame ainsi déjà un profilage du client ainsi qu’un dispositif de classification des risques. D’ici la fin de l’année, toutes les plateformes qui vendent des cryptomonnaies devront être accréditées par le PSAN (auprès de l’AMF).
Cette affaire met une nouvelle fois en relief la difficulté à contrôler un flux financier vers une contrepartie valorisable sur le marché secondaire. La problématique existe pour les montres de luxe et le marché de l’occasion. Elle est encore plus compliquée à gérer pour les cryptomonnaies et les plateformes de changes, en raison de la possibilité de transférer de la valeur sur de petits montants. Espérons que les médias traditionnels ne fassent pas l’amalgame entre Bitcoin, les entreprises françaises offrant ces produits innovants (Digital Service et KeplerK)…. et l’usager final de notre affaire : des terroristes.