
Cryptomonnaies et « dons de sperme sauvages » : L’incroyable affaire de ce site clandestin en France
Un enfant à tout prix. Une plateforme de dons de sperme illégale, alimentée par des milliers de membres et des paiements en cryptomonnaies, vient d’être fermée par la gendarmerie. Un homme a été interpellé en région parisienne la semaine dernière. On fait le point.
- Une plateforme illégale de dons de sperme, Childable.net, a été démantelée par la gendarmerie, révélant un marché noir de la fertilité.
- L’administrateur du site, interpellé à Paris, a reconnu avoir contourné le cadre légal de la PMA en vendant ses dons en cryptomonnaie.
Une « PMA parallèle » hors de tout contrôle
L’information a été dévoilée par de nombreux médias le 6 juin dernier. Les gendarmes de la Section de recherches de Lille ont démantelé un site internet baptisé Childable.net, actif depuis plus de six ans.
Sa mission ? Mettre en relation des donneurs de sperme et des femmes souhaitant avoir un enfant, en contournant totalement le cadre légal de la procréation médicalement assistée (PMA).
Au moment de sa fermeture, la plateforme comptait plus de 7 000 membres. Derrière son design vieillot, un forum d’une activité frénétique. Mais surtout, une absence totale de traçabilité : impossible de savoir combien de dons ont réellement été effectués, ni dans quelles conditions.

Cryptomonnaies : Un fondateur motivé par la paternité… et l’argent
Interpellé en région parisienne, l’administrateur du site, un homme dans la quarantaine sans antécédent judiciaire, a reconnu les faits. Il expliquera ainsi vouloir “enfanter sans en assumer les responsabilités”. Selon l’enquête, il aurait lui-même réalisé plusieurs dizaines de dons depuis 2018.
Par ailleurs, l’homme proposait des abonnements payants à la plateforme. Il facturait ses dons en cryptomonnaie, comme certains autres utilisateurs. Le site devient alors un véritable marché noir de la fertilité, mêlant désir d’enfant et transactions numériques.
Des risques sanitaires et éthiques majeurs
Ce contournement du système officiel n’est pas sans conséquences. En France, le don de sperme est strictement encadré. En effet, il est gratuit, anonyme, limité à dix enfants par donneur, et soumis à des examens médicaux rigoureux.
Childable.net ignorait tout cela. Aucun dépistage, aucun suivi, aucun contrôle. Le risque de consanguinité, de transmission de maladies génétiques ou même d’abus sexuels n’est plus hypothétique. Le lieutenant-colonel Vincent Audon, de la SR de Lille, alerte :
« Mais derrière, il y a également tous les risques, notamment l’absence totale de vérification, quant à l’état de santé du donneur et de la receveuse, quant à l’existence ou non de maladies génétiques qui pourront nuire aux futurs enfants conçus avec ce don artisanal. Et puis, il n’y a aucune traçabilité. Donc, on ne sait pas combien le donneur a réalisé de dons, avec évidemment des risques de consanguinité »
Lieutenant-Colonel Vincent Audon, commandant en second de la Section de Recherche de Lille, en charge de l’enquête – Source : RTL
Une faille humaine, pas une affaire de cryptomonnaies
Pourquoi un tel site a-t-il prospéré aussi longtemps ? La réponse se cache dans les méandres d’un système officiel à la lenteur redoutable. Dans certains centres de PMA, les délais d’attente dépassent les deux ans. Face à ces listes interminables, des milliers de femmes — souvent seules, parfois désespérées — se tournent vers des alternatives, aussi douteuses soient-elles.
Notons enfin que ce n’est ni le Bitcoin, ni l’Ether qui posent problème ici. La cryptomonnaie n’est qu’un instrument, une pièce dans le décor. Le vrai ressort de l’affaire, c’est la marchandisation d’un désir d’enfant, exploitée par quelques-uns au détriment de tous.
Alors que l’on « commande » un repas, un taxi ou un partenaire d’un glissement de pouce, certains ont cru pouvoir faire de même avec la vie. Mais la parentalité n’est ni un produit ni un service : c’est un engagement, et un territoire que le droit, plus que jamais, doit défendre.