Vive l’indépendance du cyberespace !

Nous allons fêter, ce 8 février, le vingt-quatrième anniversaire de la déclaration d’indépendance du cyberespace. Peut-être ne connaissez vous pas cette déclaration, alors introduisons-la. Cette déclaration, présentée par feu John P. Barlow le 8 février 1996 au forum économique mondial de Davos, était très largement en avance sur son temps.

Adressée aux gouvernements, ce texte explique pourquoi ces derniers ne peuvent pas intervenir dans le cyberespace, comment ils traitent la question de ce cyberespace pour tenter de s’y imposer et enfin comment s’établit une nouvelle civilisation au sein de ce « nouvel » espace.

Cette déclaration date de 1996. Cette année-là, Internet faisait ses débuts auprès du grand public. Très peu de monde pouvait concevoir ce que cette vie sur internet nous apporterait 24 ans plus tard. Criant de vérité et avant-gardiste, comme d’autres textes autour de la crypotoanarchie et des cypherpunks, l’ensemble de ce qui y est décrit se déroule devant nos yeux.

Les gouvernements ont eu tort, en France notamment, en nous expliquant dans les années 90 qu’internet n’avait aucun avenir (et qu’il fallait lui préférer le sacro-saint Minitel, sic), que le commerce ne pouvait s’y faire, ou encore que « les gens » ne seraient pas intéressés. Les gouvernements ont encore et toujours tort, depuis des décennies, à répétition. Les faits sont là, têtus, et à chaque fois, pour enterrer leurs idioties. Et pourtant, nombreux sont ceux qui continuent de les écouter.

OS « souverain », Cloud « souverain », DADVSI, Hadopi, boites noires, ISMI catcher, projet de loi contre la cyberhaine : on a fini par arrêter de compter par pure lassitude face à cette ribambelle interminable d’échecs cuisants. On pourrait presque faire référence à la définition de la folie par Einstein.

Nos cyber-identités n’ont pas de corps. Nous pouvons choisir l’anonymat… ou pas. Nos communications sont secrètes et maintenant intraçables.

« Un système anonyme renforce le pouvoir des individus à révéler leurs identités quand ils le désirent et seulement quand ils le désirent ; c’est l’essence-même de la vie privée. » – manifeste d’un cypherpunk, 9 mars 1993

La violence physique n’a pas lieu dans le cyberespace. Le monopole de la violence physique et de la coercition est perpendiculaire, incompatible avec le concept même de cyberespace.

Les cryptomonnaies donnent les pouvoirs économiques des plus riches aux plus démunis.

Les gouvernements sont devenus obsolètes. Ils sont terrifiés à l’idée de connaître le sort qu’on connus les hommes lors des révolutions technologiques :emploi détruits et créés.

C’est tragique, ironique et comique : le président pourrait bien finir à Pôle emploi ! Notre gouvernement pourrait à terme devenir un consensus algorithmique humain global : le cyberespace, dans l’absolu, le permettrait !

« De la même manière que l’imprimerie a modifié et réduit le pouvoir des guildes moyenâgeuses et la structure du pouvoir social, les méthodes cryptographiques vont affecter fondamentalement la nature de l’influence des gouvernements et des corporations sur les transactions économiques. » – manifeste cryptoanarchiste, 22 novembre 1992

Alors… préservons-le !

Pour son anniversaire, relisons cette déclaration, inspirons-nous du puissant désir de liberté qui y est décrit. Pour fêter cet anniversaire bien particulier, je vous propose de conclure avec cette dernière citation, tiré justement de la fameuse déclaration d’indépendance dont je ne fais que vous entretenir depuis tout à l’heure : »

« Nous allons créer une civilisation de l’esprit dans le cyberespace. Puisse-t-elle être plus humaine et plus juste que le monde que vos gouvernements ont créé. » – Déclaration d’indépendance du cyberespace, 8 février 1996

N’est pas finalement ça, que nous recherchons surtout ? Ouvrir la boîte de Pandore… et la laisser librement s’animer, loin des pressions et de la coercition de ceux qui pensent mieux savoir qu’elle les manières dont elle devrait le faire ?

Julien Guitton