Netflix : interview des réalisateurs de « Banking on Bitcoin »

« Banking on Bitcoin » est maintenant disponible sur la plateforme de streaming Nteflix. Le film indépendant retrace l’histoire de Bitcoin et envisage son futur. Selon le communiqué de presse Netflix :

« Bitcoin est l’invention la plus disruptive depuis l’arrivée d’Internet. Nous sommes actuellement dans une bataille idéologique entre les utopistes et le capitalisme dominant (…) Le film montre les acteurs qui définissent comment cette technologie va façonner nos vies »

L’impression générale est que le documentaire offre un bon aperçu de l’histoire et de l’idéologie qui sous-tend la première phase de développement de Bitcoin. De ses racines cypherpunk à aujourd’hui, le film revient sur les relations tumultueuses avec les banques et les organismes de réglementation, sur ses revers comme lors de la chute de MtGox et de Silkroad en passant par des interviews de personnes emblématiques comme Charlie Shrem, Erik Voorhees & gavin Andresen.

Cependant, les aficionados de Bitcoin risquent d’être en parti déçus pour deux raisons. Le film s’étale en effet sur des éventements un peu ancien comme Silkroad et BitLicense, et pas assez sur l’actualité récente. Cela s’explique notamment en raison de la période étudié. Le film démarre fin 2013 et se termine fin 2016.

Bitcoin Magazine a contacté le réalisateur, Christopher Cannucciari et le producteur Philip Galinsky du film pour en savoir plus sur le film et ses éventuels développements futurs.

C’est parti !

Bitcoin Magazine : quel l’état de vos connaissances sur Bitcoin avant de tourner le film et quel ont été vos rôles ?

Christophe Cannucciari : Je m’étais intéressé à la monnaie numérique lorsque je produisais un documentaire de 2009 au Kenya et que certains locaux m’avaient présenté ce qui deviendrait le « M-pesa« . Le Kenya venait de traverser une crise majeure en raison de la violence qui a suivi les élections de 2008. Les banques ont fermé leurs portes et les Kenyans se sont réunis autour d’une idée nouvelle pour se passer des banques, en utilisant le crédits téléphonique pour payer les biens et les services. A mon retour, l’idée d’innover en matière de paiement m’a scotché. Vers 2013, mon intérêt pour Bitcoin est devenu tellement fort que j’ai décidé de contribuer à sa diffusion en tant que cinéaste.

Phillip Galinsky : J’ai participé au film depuis le début. Chris était le Directeur du projet et moi dans le rôle de Producteur. Chris et moi avions déjà travaillé ensemble sur un court-métrage de trois jours et j’ai remarqué durant le tournage que le prix du bitcoin grimpait en flèche. D’autres personnes travaillant sur le projet semblaient sceptiques au début, mais à la fin du week-end, le prix a presque doublé. Chris et un certain nombre d’autres membres de l’équipe m’ont alors demandé d’expliquer ce qu’était Bitcoin et comment cela fonctionnait.

J’étais (et suis toujours) principalement intéressé par Bitcoin d’un point de vue logique et moralement conséquentialiste, alors j’ai commencé par comprendre la base de la technologie blockchain et j’ai essayé d’expliquer comment la capacité de la technologie blockchain pouvait permettre de faire fonctionner des bases de données réparties, décentralisées et résistantes à la censure, un facteur crucial pour le développement et la mise en œuvre de la prochaine génération de sociétés : mondiales, libres, et ouvertes. Mon explication technique de ses arcanes ne se sont pas révélés être la manière la plus efficace d’introduire Bitcoin à mon équipe. Plusieurs m’ont remis dans le droit chemin et ont suggéré qu’il fallait développer une information plus douce et plus facile à digérer.

Chris en particulier voulait en savoir plus sur Bitcoin en raison d’expériences antérieures qui lui ont montré le pouvoir de la technologie en tant que monnaie, et a pris note du fait que, même si Bitcoin était là depuis environ une demi-décennie, la plupart des gens n’avaient toujours pas a entendu parler de cela et il y avait peu de ressources de bonne qualité qui visaient à informer un public général sur cette technologie. J’ai alors présenté Chris à la communauté bitcoin de New York et nous avons travaillé ensemble sur les nombreuses composantes de la production documentaire.

BM : Quel est le message principal que les téléspectateurs devraient relever ?

Christopher Cannucciari : Avant que le public n’ai quelconque opinion tranchée sur Bitcoin, ils doivent de savoir d’où cela vient, comment cela fonctionne et comment il s’intègre dans la société.

Bitcoin n’est pas venu de rien, il est venu [de très loin] des épaules des cypherpunks. Bitcoin est une technologie, et les technologies ne sont ni bonnes ni mauvaises, mais sont plutôt des accélérateurs. Notre espoir est que ceux qui souhaitent se renseigner sur Bitcoin comprendront qu’il est là pour nous et que c’est à nous d’être acteur de son développement.

Le film ne couvre pas les développements survenus à partir de fin 2015 (hausse des prix en 2017, DAOs, ICO spectaculaires, sidechaines, Lightning Networks …). L’histoire de Bitcoin est tout simplement trop grande pour s’adapter à un seul film. « Banking on Bitcoin » est une première étape qui tente de définir l’essence de Bitcoin, d’où il vient et comment il a survécu à ses premiers défis. C’est une introduction, le public peut ensuite creuser plus profondément et découvrir les nombreuses histoires plus complexes.

Nous aurions certainement pu essayer d’intégrer beaucoup de développements, de sujets et de détails, mais le spectateur aurait rapidement décroché. Il était essentiel pour nous d’honorer les initiés tout en attirant l’attention de ceux qui voulaient un point d’entrée à ce sujet incroyable.

BM : Vitalik Buterin apparaît dans quelques scènes mais n’est jamais mentionné, et Ethereum n’est jamais mentionné. Pourquoi?

Christopher Cannucciari : J’ai eu des entretiens avec Vitalik à Toronto, Wences Casares à Silicon Valley et je me suis même rendu au Bitcoin Bowl en Floride. Même si j’aurais voulu utiliser tous ces entretiens, nous devions mettre l’accent sur ce qui se passait devant nous, à New York.

Ethereum mérite sa propre histoire et probablement qu’elle sera raconté dans le futur.

BM : Vous mentionnez souvent la tension entre l’esprit libertaire original, cryptoanarchiste de Bitcoin et ses nouveaux aspects « mainstream », les règlements de Ben Lawsky, les blockchains de Wall Street et de Blythe Masters. Quelle est votre propre opinion ?

Christopher Cannucciari : La scène du mouvement cryptoanarchiste à New York était incroyablement dynamique, et c’était une occasion en or pour l’Etat de l’encourager, et de donner à New York la même énergie innovante que Silicon Valley avait dans les années 1980. Ce qui s’est passé au lieu de cela, c’est que Bitcoin a été regardé avec suspicion et la réglementation à laquelle il était assujetti ont rendu difficile la participation des entrepreneurs de « garage ». Il est maintenant laissé à ceux qui peuvent se permettre de travailler avec les régulateurs.

Phillip Galinsky: il y a des conséquences positives et négatives de l’adoption de la technologie blockchain par « Wall Street ». Tout le développement de la technologie Blockchain, qu’elle soit ouverte ou fermée, a pour conséquence positive d’informer les développeurs sur les limites et les capacités de la technologie. Les projets Open Source produisent les technologies les plus accessibles et les plus utiles, c’est un « facilitateur » d’innovation. Cependant, même les développements à partir de sources « fermées » produisent des connaissances utiles sur les utilisations possibles de la technologie blockchain. Pour reprendre l’exemple de Blythe masters, le whitepaper qui a été publié par sa firme, Digital Asset Holdings, est très approfondi sur les nombreuses utilisations possibles de la technologie Blockchain.

Cela ne veut pas dire que tous les systèmes basés sur cette technologie seront positifs ou auront une valeur normative d’un point de vue moralement conséquentialiste. La technologie Blockchain est incroyablement puissante et façonnera l’avenir de l’interaction humaine et des architectures systèmes de la société, pour le meilleur ou pour le pire, et il appartient en grande partie aux développeurs de s’assurer que les blockchains peuvent être utilisées pour accroître le bien-être dans le monde.

BM : La fin est-elle censée suggérer que Craig Wright est Satoshi ? Quel est votre avis ? Qui est Satoshi ?

Christopher Cannucciari : Il est intéressant de savoir que bitcoin pose question dès qu’il s’agit de connaitre l’identité du créateur. Craig Wright a été présenté de la même manière que Dorian [Nakamoto]. Les spéculations sur l’identité de Satoshi se poursuivront. Wright ne sera pas le dernier à se présenter. (A ce propos, nous vous invitons à lire les derniers rebondissement de la série « Qui est Satoshi nakamoto » sur Bitcoin.fr : On a (encore) retrouvé Satoshi)

BM : Travaillez-vous sur une suite du film et quelle place aura la technologie blockchain dans vos futurs productions ?

Phillip Galinsky : le nombre de sujets pouvant intéresser les cinéastes va être croissant dans les années à venir : smarts contracts, oracles, organisations autonomes distribuées, et ce qui me fascine le plus : les systèmes de régulation de la société basée sur des blockchains. Chris et moi avons envisagé de faire une suite, mais nous n’avons pas encore trouvé le bon fil conducteur.

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Source : Bitcoinmagasine

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Lucas E.

Cofondateur & ex-Directeur de publication du média que vous lisez en ce moment même, je refais surface de temps en temps, pour écrire des billets d'analyse financière sur le marché des cryptomonnaies.